Auteurs de violences conjugales : Limoges prend la coordination nationale des 30 centres d'accompagnement en France

On les appelle les CPCA, les Centres de Prise en Charge des Auteurs de violences conjugales. Il y en a 30 en France. L'ARSL, l'Association de Réinsertion Sociale du Limousin, vient d'être missionnée pour coordonner l'ensemble.

C'est une mesure issue des réflexions du Grenelle des violences conjugales. A la suite d'un appel à projets, l'ARSL, l'association de réinsertion sociale du Limousin,  a reçu la mission de coordonner sur le plan national les 30 CPCA qui existent en France, comprenez les Centres de Prise en Charge des Auteurs de violences conjugales. Ce réseau sera officiellement lancé le 30 novembre prochain.

Une mission inspirée par les actions que menait déjà le CPCA Nord Nouvelle-Aquitaine, depuis décembre 2020, suite à un premier appel à projets. Ce CPCA couvre à lui seul six départements. Il a pris en charge 239 auteurs de violences entre décembre 2020 et février 2021. Il s'appuie sur les associations qui oeuvraient déjà sur le terrain, certaines depuis des années, comme l'association Mots pour maux implantée à Limoges depuis 27 ans.

L'objectif du CPCA Nord Nouvelle Aquitaine est de valoriser les pratiques de chacune de ces associations et de les enrichir, pour qu'elles profitent aux autres. C'est aussi coordonner tout un réseau d'acteurs du milieu social, judiciaire, soignant qui doit communiquer et s'entendre pour des résultats concrets, rapides et efficaces. Les échanges et retours d'expériences doivent être réguliers. La mise en oeuvre de ce CPCA, début 2021, s'est faite en étroite collaboration avec la Direction Régionale du Droit des Femmes et de l’Egalité.

C'est à la suite de la visite, le 4 février 2021, d'Elisabeth Moréno, Ministre déléguée auprès du Premier ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, que l'ARSL s'est vue confier une mission de coordination de l'ensemble des centres en France.

C’est une reconnaissance d’expertise par l’ensemble des équipes de l’ARSL, sur la base d'un état des lieux qui a permis au ministère de regarder et de se dire que l’ARSL a les reins solides et l’expertise pour mener une coordination nationale

Tarik-Alexandre Ali Benali - Chargé de mission pour la coordination nationale des CPCA

C'est en effet sur le modèle des missions du CPCA Nord Nouvelle-Aquitaine à l'échelle régionale que les missions de la coordination nationale ont été définies. Cette coordination a pour but, au niveau national, d'évaluer le travail réalisé sur le terrain par chacun des 30 centres d'accompagnement, avec un point tous les trois ans. L'objectif est aussi d'évaluer les bonnes pratiques pour les partager à l'ensemble, en tenant compte des spécificités des territoires et des difficultés rencontrées pour les améliorer. C'est enfin permettre aux salariés et aux partenaires de recevoir une formation continue.

Un chargé de mission a été recruté pour animer ce réseau des 30 CPCA, en métropole et dans les territoires outre mer. Chaque mois, un séminaire en présentiel ou en distanciel est prévu, par sous-groupes, puis au complet une fois par trimestre, pour garder la dynamique des échanges et le retour d'expérience.

Outre le comité de pilotage mené par le ministère, des fonctionnaires et des représentants d'institutions, on trouve aussi dans la gouvernance un comité scientifique présidé par un Professeur, expert dans le domaine des violences conjugales mais qui réunit 5 à 6 experts nationaux et internationaux dans les domaines notamment de la santé, de la justice, social et de la sécurité intérieure. 

C’est depuis le grenelle des violences conjugales qu’on a pris conscience qu’en parallèle du traitement des victimes, on devait absolument prendre en charge les auteurs pour prévenir la récidive et le passage à l’acte… tout est à faire, il y a très peu d’indicateurs encore dans ce domaine.

Claire Robert Haury - directrice générale de l'ARSL, pilote de la mission de coordination nationale des CPCA en France

Cet accompagnement des auteurs va se faire en parallèle avec l'accompagnement des victimes, car c'est un dispositif qui se pense avec une transversalité, un partenariat élargi.

Il y a une interdisciplinarité qui existe depuis plusieurs années mais pas forcément de manière structurée et pensée collectivement, puisque la priorité des politiques publiques autour de la question des violences conjugales a surtout été portée jusqu’à présent sur la protection des victimes et pas tant sur la prise en charge des auteurs

Stéphane Razgallah, Directeur de pôle à l'ARSL

 

A Limoges, les auteurs de violences sont pris en charge par l'association mots pour maux

L'association accompagne les auteurs - en grande majorité des hommes même s'il existe quelques femmes - soit sur une démarche volontaire de leur part, soit sous contrainte judiciaire parce que ces personnes ont été condamnées pour des délits de violences sur leurs conjointes ou compagnes, leurs enfants. Une prise en charge avec le SPIP, le Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation. Elle s'exerce de façon individuelle et collective, par une participation à des groupes de parole.

L'objectif est de prévenir les récidives. Ce sont des rencontres régulières, sur une durée de six mois, pour :

  • permettre l'écoute
  • conduire à une prise de conscience des actes violents
  • une identification des facteurs déclencheurs 
  • permettre des stratégies d'évitement

 

Souvent les personnes poursuivent de leur propre initiative l'accompagnement, au -delà de la contrainte, parce qu'elles ont trouvé une écoute et du sens...elles ont pointé ce besoin de parler, identifié les situations où elles se sont trouvées envahies par leurs émotions, la colère, l'impuissance, la peur, l'échec, l'abandon...

Magalie Barre, éducatrice spécialisée de l'association Mots pour maux à Limoges

Il s'agit de libérer toutes ces émotions qui peuvent expliquer le passage à l'acte. La violence vient souvent exprimer ce que la personne n'arrive pas à exprimer par les mots. L'auteur n'est pas forcément une personne violente, c'est une personne qui va avoir, à un moment donné, dans un contexte particulier, une montée de violence. Le principe est donc de parvenir à identifier ce qui a pu déclencher cette impulsivité, par exemple une insulte, en cherchant à comprendre pourquoi cette insulte là en particulier le conduit à la violence... C'est souvent une étape qui met le doigt sur des douleurs profondes, qui peuvent remonter à l'enfance, ou sur des événements douloureux de la vie. Il faut aussi identifier les conditions qui conduisent au comportement violent, comme une consommation d'alcool ou de stupéfiants, pour responsabiliser l'auteur sur "l'avant" du comportement violent. Les rencontres permettent ensuite de mettre en place tout ce qui peut éviter d'en arriver là.

Désormais, un numéro existe aussi pour la parole des auteurs : 08 019 019 11

Il était attendu. Car à qui parler lorsqu'on ressent une pression mentale telle qu'on pourrait ne plus se maitriser... Si un numéro vert existe pour les victimes (3919 ou 0 801 230 520), un numéro existe désormais pour venir en aide aux hommes, auteurs des violences dans 87% des cas de violences conjugales. Il s'agit du 08 019 019 11, joignable 6 jours/7.

Ces violences conjugales ont augmenté de 10% en 2020 selon le ministère de l'Intérieur.

L'ARSL en chiffres

L'ARSL, l'Association de Réinsertion Sociale du Limousin, est une association qui lutte contre toutes les formes d’exclusions sociales. Ses missions sont multiples auprès de toutes les personnes en situation de grande précarité. Elle emploie 120 salariés et gère 10 millions de budget annuel pour l’année 2020 contre 6,8 millions en 2017. Elle a ainsi accompagné 3592 personnes en 2020, en partenariat avec 30 établissements et services qui accueillent, orientent, hébergent ces personnes.

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