Des recherches lancées à Limoges sur une immunothérapie contre le cancer colorectal vont se poursuivre grâce à Abcely, une entreprise de biotechnologie de Nantes. À Limoges, la société B Cell Design avait dû interrompre ses travaux pour des raisons financières.
Au moment de la crise de la COVID-19, la société B Cell Design a beaucoup fait parler d'elle à Limoges. S'appuyant sur ses travaux sur les igA, des anticorps présents dans le lait maternel, elle envisageait alors de créer un test de dépistage de la Covid ainsi qu'un collutoire capable de tuer le virus.
Mais c'est en fait dans la lutte contre le cancer colorectal que les deux chercheurs qui ont créé B Cell Design étaient les plus avancés. Après plus de quinze ans de travail, ils étaient sur le point de créer un remède contre ce fléau qui tue 15 000 personnes en France, chaque année.
Malheureusement, il a manqué 500 000 euros et six mois de travail à Armelle Cuvilliers et Gael Champier pour arriver à un résultat concret.
À l'automne 2021, le tribunal de commerce de Limoges a mis B Cell Design en redressement judiciaire. La société a fini par être absorbée par un important groupe. Aujourd'hui, elle n'existe quasiment plus à Limoges.
Armelle Cuvillier et Gael Champier ont fini par être licenciés. L'affaire devrait être jugée en décembre par le tribunal de Prud'hommes.
Licence d'utilisation
Il aurait, bien sûr, été plus que regrettable pour les patients atteints de cancer colorectal, que les recherches de B Cell Design soient abandonnées.
Heureusement, Abcely, une société nantaise, a négocié une licence exclusive d'utilisation qui va lui permettre de continuer l'aventure. Dans 2 à 3 ans, l'objectif est d'obtenir de l'Agence Européenne du Médicament, l'autorisation d'une première administration aux patients atteints de cancers digestifs, dans le cadre d'un essai clinique.
Le produit inventé par B Cell Design s'appelle ABC-101. L'objectif est d'en faire un traitement oral qui sera directement avalé par le malade.
L'ABC-101 représente une innovation unique au monde qui pourrait aussi dans le futur être utilisée dans d'autres types de cancers des muqueuses tels que les cancers gastriques, de la bouche ou de l'oesophage.
Abcely souhaite aussi développer d'autres approches thérapeuthiques proches de l'ABC-101, pour le traitement de l'endométriose.
Les recherches seront menées à Nantes et Limoges. En août 2023, Armelle Cuvillier a été embauchée par Abcely pour continuer son travail depuis Limoges.
Remède complémentaire
Le remède qu'envisage de créer Abcely va permettre au système immunitaire des patients de tuer les cellules cancereuses. C'est ce qu'on appelle de l'immunothérapie.
Selon le professeur Muriel Mathonnet, chirurgienne et spécialiste du cancer colorectal au CHU de Limoges, "l'immunothérapie ne fonctionne, jusqu'à aujourd'hui, que sur un certain type de cancer colorectal qui représente 10% de la totalité des cancers colorectaux".
L'objectif d'Abcely est d'être bien plus efficace.
Malheureusement, il est probable que les patients soient obligés d'être sous traitement pendant très longtemps. Car l'immunothérapie s'attaque aux conséquences, et non aux causes des cancer. Ils sont dûs à d'innombrables facteurs génétiques, environnementaux, ou peuvent être la conséquence d'une mauvaise hygiène de vie.
On arrive complètement dans la médecine personnalisée. Il faut penser à ce qui a été à l'origine du développement de la tumeur, et non plus traiter la tumeur en elle même.
Professeur Muriel Mathonnet, spécialiste du cancer colorectal
Le remède d'Abcely sera donc complémentaire à d'autres traitements qu'auront à subir les malades. Les chances de survie augmentent grâce à la recherche. Mais selon le professeur Mathonnet, un problème éthique va se poser dans le futur : "quelle survie avec quelle qualité de vie ?".