La lecture est l’une des occupations majeures de ce confinement. Pour lire des nouveautés, des libraires de Limoges ont enfin pu proposer de la vente physique devant leurs magasins.
Même constat chez son voisin de la rue du Consulat. Directeur d’Anecdotes, Jean-Michel Gillet a lui mis en place ce système de "click and collect", une semaine plus tôt et il ne le regrette pas : « 80 commandes pour les retraits du mercredi 22 avril, 100 pour le samedi et j’en ai déjà 200 de plus pour ce mercredi 29 avril ».Sachant que dans une commande il y a souvent plusieurs ouvrages, c’est un beau succès. Cela va de 7 euros à 200 euros. Le panier moyen tourne autour de 30 euros. Aurélie Jansens, libraire
Des livres à la commande
A la maison de la presse, ouverte tous les jours pour les journaux, le rayon littérature marche bien. « Malgré la faible fréquentation, les clients au lieu d’acheter un livre en prennent trois ou quatre », raconte une des gérantes.La librairie jeunesse Rev'en Pages a remplacé sa vitrine par des sacs de livraisons pour expliquer qu’elle aussi avait mis en place un drive chaque jour le matin pour que les enfants puissent toujours lire.
Car les lecteurs sont en demande, leurs librairies leur manquaient. Ces magasins n’ont pas été considérés comme étant de première nécessité, situation très paradoxale dans une France célèbre dans le monde pour ces auteurs.
"Lisez" dit Emmanuel Macron
Pourtant, le 16 mars dans son grand discours, Emmanuel Macron déclarait : « en restant chez vous, lisez, retrouvez aussi ce sens de l'essentiel. Je pense que c'est important dans les moments que nous vivons. La culture, l'éducation, le sens des choses sont importants »Lisez, mais vos librairies seront fermées ! Il aura fallu de longues discussions pour que, seulement, la semaine dernière, le ministère de l’économie autorise les libraires à vendre sur leur pas de porte.
Chez Anecdotes, Jean-Michel Gillet, n’a pas trainé. Il a posé à l’entrée une petite table. Masqué, ganté, avec un terminal carte bleu protégé à chaque utilisation, il reçoit un par un ses clients. Dans la rue, la queue s’allonge mais tout le monde patiente sagement.
Chez page et plumes, trois personnes seront mobilisées les mercredis matin et après-midi, et samedi matin.A partir de ce mercredi, on va être au moins deux, et au lieu de deux heures le matin, je vais ouvrir toute la journée pour que cela soit plus rapide. Jean-Michel Gillet, libraire
Des livres en stock
Comme la chaîne du livre est rompue, seuls les livres en stock sur place (51 000 pour J.M. Gillet) sont vendus.« On vend de nombreux polars. C’est étonnant de lire des romans angoissants dans cette période. Peut-être que les lecteurs soignent le mal par le mal » constate Aurélie Jansens. Elle a aussi remarqué que les livres qu’elle et ses collègues ont prescrit ou conseillé, sur le site internet ou les réseaux sociaux sont très achetés. « C’est agréable, il y a vraiment un lien de confiance ».Sur certains textes, je suis en rupture : le dernier Leïla Slimani, par exemple. Mais aussi La peste de Camus. Sinon, je n’ai pas mal de commandes d’essais philosophiques. Jean-Michel Gillet, libraire
Le livre préféré à la liseuse
Après avoir payé ses achats, une des clientes d’Anecdotes nous explique sa démarche : « Les liseuses c’est bien gentil, mais à un moment rien ne vaut le touché du papier, des feuilles. J’en avais envie. J’ai pris trois livres : la panthère des neiges de Sylvain Tesson, Nos espérances d’Anna Hope et, de Laurent Himbert, Comment vivre en héros ».
Tout un symbole ce titre, comme en écho au travail des soignants !
Des clients m’ont aussi dit qu’ils boycottaient Amazon et les ventes de livres en ligne. Certains, dans leurs commandes sur notre site nous mettent aussi un petit mot de soutien. Aurélie Jansens, libraire
Soutenir les libraires indépendants
Et du soutien, ils en ont bien besoin les libraires indépendants. Avec cette crise, leur filière va souffrir économiquement. « Les librairies comme les pharmacies auraient dû rester ouvertes dès le début de l’épidémie. Certains vont perdre jusqu’à 50% du chiffre d’affaires annuel. La marge des libraires est très faible » décrit, dans le Figaro du lundi 27 avril, Vincent Montagné président du syndicat du livre. « Auteurs, éditeurs, tout le secteur est cassé. Des sorties sont reportées, certains livres, même, ne sortiront jamais et puis les librairies ne peuvent pas tous absorbés. Il faudra que le ministère de la culture nous aide ».
"Lire à Limoges" annulé
Sans compter que dans la capitale limousine, mi-mai devait se tenir le salon « Lire à Limoges ». Il a été annulé. Pour les librairies locales, c’était l’événement économique de l’année. La foire du Livre de Brive, en novembre, sera, elle, peut être épargnée.
Jusqu’au 11 mai, ces passeurs de lecture vont poursuivre ce système de vente littéraire à emporter. Ils n’ont qu’une hâte, tourner définitivement la page de cette épidémie…