Le théâtre de La Passerelle, le CDN de l'Union, l'Opéra-Théâtre... Bien qu'incertaines face à l'avenir, les scènes limougeaudes vont à nouveau jouer pour leurs spectateurs, en cette rentrée.
C'était hier, c'était il y a une éternité...
Souvenez-vous, le samedi 14 mars dernier, Édouard Philippe, alors encore premier ministre, annonçait peu après 20h la fermeture des bars, des restaurants... Mais aussi des cinémas et des salles de spectacles.
Les feux de la rampe avaient alors eu moins de quatre heures pour s'éteindre, à quelques soixante-douze heures du confinement général.
Ce soir-là, Michel Bruzat, directeur du théâtre de La Passerelle à Limoges, et metteur en scène, s'en souvient comme si c'était hier.
"On venait de terminer la générale de «Émilie ne sera plus jamais cueillie par l'anémone», une pièce de Michel Garneau, qui devait être un des temps forts de notre saison. Avec l'équipe, on était allé prendre un verre, pour fêter cela quand, à 21h, on a appris que tout s’arrêtait. On était un samedi soir et les représentations devaient commencer le mardi...".
Depuis, plus rien, ou presque.
Certes, début juin, les théâtres ont pu rouvrir, d'abord avec demi-jauge, puis en entier, mais très peu l'ont fait, aucun à Limoges en tout cas. Pas possible, pas assez rentable, trop compliqué, trop tard... Et cela, alors que le monde de la Culture dans son ensemble se sentait le grand oublié du Coronavirus.
Michel Bruzat a bien aidé d'anciens élèves à répéter leur spectacle de rues, joué durant l'été à Limoges et ailleurs, tout comme, au CDN de l'Union, Jean Lambert-wild avait repris deux semaines de répétions, début juillet, de sa « Chanson de Roland », initialement programmée ce printemps.
Mais le cœur n'y était pas, d'autant moins que l'annulation du festival d'Avignon, In et Off, auguraient de sinistres lendemains.
C'est en effet là-bas que les théâtres, les compagnies, en plus de jouer, vendent leurs spectacles, montent leurs tournées, souvent pour les trois ans à venir...
De l'Opéra-Théâtre aux Zébrures d'automne, de La Passerelle à l'Union, tous à Limoges préféraient attendre et se consacrer, au gré des nouvelles, au fil de l'évolution de la Covid-19, à ce qu'ils espéraient tout de même, leur saison 2020-2021.
Dans des situations parfois paradoxales ! On sait, depuis plus de trente ans, La Passerelle et son directeur sans cesse sur le fil, toujours sur la corde raide. On pensait, craignait donc, de retrouver Michel Bruzat exsangue en cette rentrée. Sans doute l'est il. Mais il préfère balayer cela non sans humour !
"Tu sais, je ne devrais pas le dire, c'est un secret mais, comme on n'a pas joué, on n'a rien dépensé ! Pour une fois, cela irait presque bien ! C'est maintenant que cela va reprendre que cela va devenir compliqué, car on va recommencer à dépenser de l'argent.".
Car oui, tous reprennent ! Avec des masques, avec du gel, avec des adaptations s'il le faut, avec des programmes plus spécifiques, comme à l'opéra, où il y aura moins de chœurs, avec la crainte que tout s'arrête à nouveau brutalement, et même, avec quelques coquetteries.
Michel Bruzat par exemple, annonce sur ses affiches QUE une saison de septembre à décembre, même si la suite est prévue et surtout connue ! Sur le site du théâtre, il faut descendre plus bas sur la page pour trouver... la suite.
Les dernières déclarations de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, incitent à espérer des jauges pleines, du moins pour les spectacles assis, les grands concerts et festival étant encore dans l'incertitude.
Alors saison il y aura et, depuis le 30 août dernier et celle des Zébrures d'Automne, elles sont peu à peu présentées. Sous des formes différentes et inhabituelles. L'Opéra-Théâtre l'a par exemple fait sur internet, le CDN de l'Union le fera sous formes de fichiers informatiques, envoyés à ses abonnés.
Et La Passerelle, elle, convie ses fidèles, le 18 septembre prochain, pour une présentation festive et conviviale, non pas au théâtre mais dans sa rue, du général Bessol, qui sera fermée à la circulation pour l'occasion.
On y apprendra, sans surprises, que beaucoup d'habitués s'y produiront, de Flavie Edel Jaume à Yann Karaquillo, de Marie Thomas à Nadine Béchade, de Philippe Labonne à Mauricette Touyéras...
Que le si attendu et donc fauché avant son envol «Émilie ne sera plus jamais cueillie par l'anémone» sera donné au mois de novembre...
Et que, si tout va bien, l'immense cantatrice Hélène Delavault, éternelle Carmen de Peter Brook et diseuse hors pair de chanson à textes, sera là début février.
Bref, les feux de la rampe se rallume mais le spectacle vivant, lui, n'a pas encore vu le bout du tunnel...où il a bien cru ses derniers mois, y voir sa funeste lumière blanche.