Une cinquantaine d'agriculteurs bio manifestaient ce mardi 21 mai à Limoges devant le centre de paiement des aides agricoles. Ils demandent le versement des primes européennes, car ils ne veulent pas revivre la situation de 2018, où ils avaient reçu l'argent avec trois ans de retard.
La situation a assez duré pour les agriculteurs bio ! Les retards de paiement d'une partie des aides européennes aggravent la situation d'une filière en difficulté :"On n'a pas de délais, pas d'information. On a des fermes qui vivent une crise sans précédent dans l'agriculture bio et à côté de ça, l'état ne verse pas les primes européennes qui nous sont dues", lâche exaspéré Emmanuel Bourgy, le président du groupement des agriculteurs Bio pour la région Centre avant d'ajouter :"Initialement, le Premier ministre avait déclaré que les primes seraient versées le 15 mars, puis on nous a annoncé que cela ne concernerait qu'une partie des aides. Là, l'état nous annonce le 30 juin, dernier délai, sauf que l'on a déjà connu cela, il y a plusieurs années, avec des retards de plus de trois ans, donc nous, on manifeste dès maintenant, car on ne veut plus attendre".
Cette mobilisation est donc placée sous le signe d'un ras-le-bol de la filière bio, qui représente 10% des surfaces agricoles utilisées en Nouvelle-Aquitaine, soit 377 830 hectares, en 2022. Une surface qui a été multipliée par deux en cinq ans, et qui place notre région au second rang des régions françaises quant aux en nombre d'exploitations et des surfaces agricoles engagées en agriculture biologique.
1341 fermes en Limousin pratiquaient la culture biologique en 2022
En 2022, le Bio en Limousin, c'était 322 fermes en Creuse, 463 en Corrèze et 556 en Haute-Vienne. Des chiffres en constante augmentation depuis la fin de la crise sanitaire, mais la tendance semble se ralentir, voire s'inverser.
En effet, depuis deux ans, la filière connaît un certain ralentissement que l'on peut constater en observant les chiffres des conversions d'exploitations traditionnelles vers le bio. Entre 2021 et 2022, les pourcentages de conversion ont chuté : - 20% en Corrèze, - 16 % en Haute-Vienne, contrairement à la Creuse, où ces conversions sont en hausse de + 16 % (chiffres issus de la Direction Régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt de Nouvelle Aquitaine).
Et ce ne sont pas les retards dans le versement des primes de la PAC qui vont inciter de nouveaux agriculteurs à se lancer dans la production bio. Ceux qui ont fait ce choix, il y a quelques années, de l'engagement dans la transition agroécologique, poursuivent leur activité, sous perfusion, tandis que les nouveaux producteurs bio se font plus rares.
Des collègues ont dû licencier des salariés, car les aides ne sont pas arrivées.
Emmanuel BourgyPrésident Bio Centre
Malheureusement les aides n'arrivent pas, ou avec trop de retard. Il est donc difficile de faire face à la conjoncture actuelle, comme les problèmes liés à un printemps trop pluvieux, et qui se traduiront forcément par un manque à gagner. En outre, faute de trésorerie, les producteurs bio ont dû emprunter pour investir dans leur exploitation. Des investissements qui auraient dû, ou pu, être couverts grâce aux aides qu'ils attendent toujours comme nous le confie Emmanuel Bourgy venu du Centre-Loire, pour manifester à Limoges :"Aujourd'hui, même les aides à l'installation ne sont pas versées alors quand le gouvernement dit qu'il faut installer des jeunes, on se rend compte que les moyens ne suivent pas, donc ils ne peuvent pas réaliser les investissements qu'ils avaient prévu de faire. De plus, on paie des taux intérêts énormes. Des collègues ont dû licencier des salariés, car les aides ne sont pas arrivées. Voilà, tout ça mis bout à bout, cela fragilise notre filière bio dans une période compliquée".
Une cinquantaine de personnes ont donc manifesté ce matin, à l'appel de la Fédération Nationale d'Agriculture Biologique, des producteurs du Centre-Loire, d'Auvergne-Rhône-Alpes, d'Agri Bio 87, de la Confédération Paysanne de la Haute-Vienne, de la Coordination Rurale de l'Indre.
Une manifestation qui s'est tenue dans le calme devant le centre de paiement des aides agricoles de Limoges. En fin de matinée, les représentants des organisations syndicales ont été reçus en Préfecture. Ils espèrent obtenir le versement des aides avant la fin du mois de juin. Sans quoi, ils menacent de mettre en demeure l'État français pour qu'il paie les primes versées par l'Europe.