Katia est infirmière aux urgences psychiatriques d'un hôpital parisien, au coeur de la crise sanitaire. Son mari et ses trois enfants habitent à Limoges. Depuis le début de l'épidémie, elle jongle entre les horaires à rallonge à l'hôpital et les difficultés de transport pour relier les deux villes.
Je ne peux pas me plaindre, c'est un choix de vie. Lorsque mon mari a été muté à Limoges il y a dix ans, j'ai préféré garder mon travail que j'adore à Paris, et faire des allers-retours. Aujourd'hui, en pleine crise du Coronavirus, c'est compliqué !
Katia vient de passer plusieurs jours à Limoges, où elle a pu retrouver sa famille - son mari et ses trois enfants - après des journées de travail particulièrement intenses. Mais c'est déjà l'heure de repartir à Paris, elle ne sait pas pour combien de temps, au moins trois semaines.
Cette fois-ci, c'est son mari qui va la conduire jusqu'à la capitale (elle n'a pas son permis). L'hôpital parisien lui a préparé une autorisation de circulation. Le couple espère qu'elle fonctionnera s'ils se font contrôler...
Depuis le début de l'épidémie, Katia est confrontée aux galères de transport pour pouvoir aller travailler.
Il n'y a plus aucun train entre Paris et Limoges. La dernière fois, je suis passée par Poitiers, mais maintenant ce n'est même plus possible, ça prend 10 heures avec trois correspondances !... Il n'y a plus de Bla Bla Car ni de "bus Macron"... C'est vraiment compliqué. On nous annonce des taxis gratuits pour les soignants et des bons d'essence, mais il y a des conditions, tout le monde n'en bénéficie pas.
La solidarité pour trouver un logement
Et une fois sur place, les difficultés continuent. Jusque là, Katia vivait en Seine-Saint-Denis, dans le 93, à 40 minutes environ en métro et bus de son travail dans le 10ème arrondissement de Paris.
Mais depuis quelques semaines, les horaires et les fréquences de passage des transports en commun ont été revus à la baisse. Il n'y a plus de métro après 22h.
Avec ses horaires décalés, se rendre au travail ou rentrer chez soi après une journée bien chargée ressemblait au parcours du combattant.
Grâce à la solidarité, l'hôpital lui a trouvé un logement à 30 minutes à pied : le cabinet d'une psychologue, inoccupé en ce moment.
L'hécatombe chez les soignants
Katia repart donc plus sereine quant à ses conditions de logement, mais elle sait que cette nouvelle session parisienne s'annonce particulièrement chargée.
En tant qu'infirmière aux urgences psychiatriques de l'hôpital Saint-Anne, elle est aussi confrontée au virus.
Les urgences reçoivent beaucoup moins de monde que d'habitude. Mais il y a toujours des dépressifs, des psychotiques qui ont vraiment du mal à vivre confinés. Deux unités Covid ont été aménagées à Saint-Anne, il y en a six au total dans les hôpitaux psychiatriques parisiens. Donc nous allons prendre en charge des patients infectés.
Ce qui l'inquiète particulièrement : le manque de protections et le risque de contamination des soignants :
A Paris, c'est l'hécatombe ! Beaucoup de mes collègues commencent à tomber malades. On m'a demandé d'aller faire un remplacement en Ehpad sur mes jours de repos, parce qu'il y avait 19 infirmières malades ! Certains collègues retraités sont rappelés pour prêter main forte. A ce rythme, je me demande vraiment comment ça va se passer dans trois semaines...
Travailler à fond, se sentir utile
Malgré tout, Katia repart à Paris avec la ferme intention de travailler à fond. L'hôpital autorise désormais les infirmières à enchaîner cinq jours de 12h. En comptant trois semaines à ce rythme, elle pourra peut-être cumuler plusieurs jours de repos d'affilée pour revenir profiter de sa famille à Limoges...
Katia s'est portée volontaire pour aller travailler dans l'unité Covid.
Cela ne me fait pas peur. J'ai l'habitude des gestes barrière. Et finalement, dans ces services on est mieux équipés. Je veux m'occuper, me sentir utile.
Pendant ce temps, son fils aîné de 19 ans ira s'occuper des personnes âgées. Il s'est engagé dans la réserve civique. Et Katia en est particulièrement fière...