Pénurie de personnel, conditions de travail trop difficiles ou encore refus de se faire vacciner : après le Covid, beaucoup de soignants ont jeté l’éponge pour plusieurs raisons : depuis, avec le Ségur, les pouvoirs publics ont multiplié les financements pour pourvoir les postes vacants. En 2022, les métiers du soin reviennent donc en odeur de sainteté. La formation d’aide-soignante arrive en tête des demandes de reconversion en Nouvelle-Aquitaine. Illustration en Limousin.

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Y a-t-il une réelle désaffection pour les métiers du soin ou sont-ils toujours attractifs ?

2021, les soignants raccrochent leur blouse

Nagette Messaoudi est aujourd’hui conseillère en insertion professionnelle. En 2021, le Covid est la goutte d’eau qui la pousse à raccrocher sa blouse de soignante. Elle était aide médico-psychologique (AMP) auprès de personnes handicapées. 

"Ça n'a pas été facile parce qu'on a eu des décès parmi nos patients. J'ai été malade, des collègues aussi. Devoir se changer et s'habiller avec une combinaison tous les jours, c'était très dur. Ça n'a pas été simple de voir les personnes que l'on accompagne tous les jours affaiblies".  

Une situation venue se greffer sur des conditions de travail déjà difficiles. La moindre absence suscitant un surcroît d'activité important, le retour au travail sur les jours de congés... Difficile également, dans ces conditions, d'avoir une vie de famille sereine avec deux enfants. "Concrètement, avec les contraintes du métier, je pouvais voir mes enfants à 8h un matin et ne pas les revoir avant le lendemain soir", ajoute encore Nagette.

Cinq de ses collègues lui emboîtent bientôt le pas et quittent également l'établissement. 

Combien sont-ils à avoir raccroché ? Difficile d’obtenir des chiffres. Le sujet est sensible. Ni l’ARS, ni les établissements ne communiquent. Tous souhaitent au contraire mettre en avant l'attrait nouveau que suscitent ces métiers en 2022. Pas question de parler des aspects négatifs et de démotiver ceux qui seraient tentés de rejoindre les métiers du soin. 

Financement massif des pouvoirs publics pour attirer des candidats

Pour circonscrire l’hémorragie, les pouvoirs publics ont, en effet, lancé des financements massifs pour attirer des candidats, notamment via les reconversions. 

"En 2021, clairement, il y a eu une réelle désaffection pour ces métiers. Nous traitions beaucoup de demandes de soignants souhaitant faire autre chose. La nouveauté, c'est qu'en 2022, la formation d'aide-soignant est en tête des demandes de reconversion" précise Valérie Toulouse de Transition Pro Nouvelle Aquitaine. 

L'organisme a ainsi financé plus de 300 dossiers de reconversion vers les métiers du soin en 2022. Un chiffre totalement inédit. Comment l'expliquer ?

"Après le Covid, nous avons vu beaucoup de projets de création, reprise d'entreprise. Avec la crise, le profil type a changé. Plutôt que des femmes cadres de 40 ans, on est passé à une femme plus jeune avec le bac.  Et les reconversions se portent davantage vers des métiers salariés, à vocation, qui font sens et avec une certaine sécurité de l'emploi", ajoute Valérie Toulouse.

Ces reconversions concernent majoritairement des salariés qui exercent déjà dans le secteur du soin et qui en profitent pour monter en compétence. Ils y sont d'ailleurs fortement incités et les besoins sont tels que leurs dossiers sont acceptés à plus de 90%. 

À l'Institut de Formation d'Aides-Soignants (I.F.A.S) de Limoges, une vingtaine de personnes sont en reconversion. Comme Alexandra, auxiliaire de vie depuis 25 ans : à 43 ans, la voilà de retour sur les bancs de l’école. 

"Je n'aurais pas plus de contraintes en étant aide-soignante qu'en étant auxiliaire de vie à domicile. Je travaillais déjà les week-ends, les jours fériés, avec des horaires décalés. Par contre, en étant aide-soignante, je pourrais travailler en structure, en équipe. Si vous avez un petit coup de mou, vous avez vos collègues. En auxiliaire de vie à domicile, vous êtes tout seul", explique Alexandra Guillerme. À la clef donc, une montée en compétence, plus de confort et une meilleure rémunération. 

Débouchés assurés 

Autre facilité : à la sortie, les débouchés sont assurés. "Nous avons 100% d'insertion professionnelle", constate François Terrier, directeur de l'IFAS. Au CHU, les conditions d’embauches sont même particulièrement favorables pour attirer et fidéliser les élèves des écoles d'aides-soignantes et d'infirmières.

" Nous sommes en campagne de recrutement permanente au CHU. Une jeune infirmière qui sort de l'école est recrutée immédiatement en CDI. Nous facilitons aussi la promotion en interne", précise Fabienne Lauze, directrice des relations humaines au CHU de Limoges. 

60 postes d’infirmières et 40 d’aides-soignantes sont toujours non pourvus au CHU. La moitié devrait être comblée par les élèves sortant de l'école. La concurrence est rude entre les établissements de santé. L'établissement a fait le nécessaire pour rapidement les convaincre. 

Autre donnée rassurante, malgré les difficultés, la profession suscite toujours des vocations chez les jeunes : "On ne constate pas du tout de désaffection des métiers de la santé chez les jeunes en terme d'attrait vers les formations initiales. Ça se vérifie sur la profession d'aide-soignant, mais aussi sur celle d'infirmier qui est sur Parcoursup la première profession demandée nationalement", constate, presque incrédule, Stéphane Laffon, directeur délégué aux personnels de santé à l'ARS Nouvelle Aquitaine.  

Malgré l'image écornée, la relève semble donc assurée. 

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