L'hommage à Robert Hébras s'est déroulé ce vendredi 17 février à Oradour-sur-Glane. La cérémonie officielle a permis à de nombreuses personnalités de rendre hommage à ce passeur de mémoire. France 3 Nouvelle-Aquitaine vous propose de redécouvrir les moments marquants de cette cérémonie en images.
Il avait rêvé d’être garagiste, dans le village où il était né le 29 juin 1925. Il avait rêvé le midi, après son travail, de déjeuner dans la maison où il avait grandi… il avait rêvé, le soir après sa débauche, de retrouver ses amis Henri, André et tant d’autres au café du chêne (…) Il avait rêvé d’une vie simple, tranquille. Hélas, des hommes en avaient décidé autrement. Une belle présentation du maire d'Oradour-sur-Glane, Philippe Lacroix, pour rappeler, lors de cette cérémonie officielle, que derrière le passeur de mémoires, il y avait un homme.
Les discours en hommage à Robert Hébras vont se succéder ce vendredi après-midi. Au-delà du passeur de mémoire, de l’homme de paix et de réconciliation entre les peuples, Benoît Sadry, président de l’association nationale des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane, a aussi tenu à rappeler, dans son discours, qui était aussi Robert Hébras :
Pour nous, c’était aussi l’incarnation de la gentillesse et de la simplicité, un homme au regard pétillant et au sourire malicieux. Un homme rempli d’humilité. Jamais, il ne s’est considéré comme un héros.
Benoît SadryPrésident de l’Association nationale des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane
Puis vient le témoignage de Fritz Körber, ami intime de Robert Hébras : "après la douleur du départ, il y a la gratitude d'avoir connu Robert Hébras. Sans vouloir préjuger ce que les historiens ou les biographes diront un jour de l'œuvre de mon ami Robert, je ressens le devoir de lui rendre hommage. (...) Il s'est toujours battu pour l'entente et la paix entre les peuples. Nous nous souviendrons de lui avec une profonde gratitude.
Cher ami Robert, je me sens si seul sans toi. Tu vas me manquer, mais je t'assure de poursuivre le travail de mémoire.
Fritz KörberAmi de Robert Hébras
L'Allemagne est présente, avec aussi la parole d'Hans-Dieter Lucas, ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne dans l'hexagone.
François Hollande a également pris la parole pour un très long discours qui a rappelé le parcours de mémoire de Robert Hébras tout au long de ces dernières années.
L'ancien Président était venu en septembre 2013 avec le Président allemand Joachim Gauck et il se souvenait déjà avant le début de la cérémonie : « C’est un lieu de mémoire et de réconciliation… et en même temps de vigilance. (…) Nous devions, avec Robert Hébras, toujours réussir à transmettre et il en était le dernier survivant, le dernier témoin. Il y avait aussi la réconciliation, c’est aussi ce que Robert Hébras avait souhaité : être présent lorsqu’un président allemand venait ici à Oradour, et donc il nous avait pris dans ses bras pour dire "moi le dernier survivant, je vous appelle à vous unir toujours et à travailler pour l’Europe et pour la paix."
Et François Hollande de répéter lors de ce discours officiel : "Et puis la vigilance… Il était, lui aussi, frappé, heurté, bouleversé par les autres drames qui se produisaient dans le monde, ailleurs, loin d'ici... au Moyen-Orient, en Afrique. Il savait ce que représentait l'horreur et il voulait que la mémoire d'Oradour ne serve pas simplement à évoquer une tragédie en France, et que ça puisse aussi être une réunion de toutes les mémoires pour que le pire ne puisse plus être vécu et que le meilleur puisse être, à un moment espéré."
Pap Ndiaye, Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse a parlé au nom du Président de la République. Le chef de l'État a en effet écrit un message lu au moment des discours.
Et enfin, il y a la voix de celle qui poursuivra le travail, la petite fille : Agathe Hébras qui commence par remercier celui qui fut son papy : "Merci pour les incartades de nuit dans la cuisine pour manger de la glace, merci d'avoir épluché mes pommes, de m'avoir laissé déchiré mes pantalons en grimpant aux arbres, de m'avoir offert mes premières motos, d'avoir caché mes bêtises d'ado à papa et maman…" Cette petite fille devenue femme qui saura transmettre à son tour : "tu as su faire preuve de résilience pour témoigner de l'horreur pour les victimes d'abord, et pour leur mémoire, mais aussi pour que la vérité historique soit préservée et transmise de génération en génération. (...) je connais ma chance d'avoir profité de tous tes enseignements, tes valeurs humaines et morales, ton goût pour la vie."
Dans les ruines du village martyr
Après une messe en matinée dans la nouvelle église d'Oradour-sur-Glane, cette cérémonie officielle avait démarré dans le village martyr. Le cortège, d'environ 200 personnes, a, tout d'abord, défilé dans le village.
Une marche dans un grand recueillement, en présence d'Agathe Hébras, sa petite-fille, qui a déposé plusieurs gerbes de fleurs sur plusieurs sites marquants de ce lieu de recueillement, notamment l'ancienne maison du dernier survivant du massacre.
Le gouvernement français est représenté par Pap Ndiaye, Ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse ainsi que par Patricia Mirallès, secrétaire d’État aux Anciens combattants et à la Mémoire.
Après le silence, une vie passée à témoigner
"Pourquoi je suis là ? Je ne sais pas", Robert Hébras le dira toute sa vie. Son secret, il l'a gardé enfoui longtemps. Depuis les années 80, le dernier témoin du massacre d'Oradour-sur-Glane n'a cessé de raconter cette terrible journée du 10 juin 1944. Il a porté ce récit auprès de collégiens, lycéens, de toutes les générations pour se souvenir des 643 martyrs.
On n’aura plus de témoins qui pourront dire, j’y étais, je l’ai vu. Par contre, on a eu la chance de l’écouter et j’en appelle à tous les jeunes qu’il a rencontrés lors de multiples visites du village : ils sont sa voix aujourd’hui….
Benoît SadryPrésident de l’Association nationale des familles des martyrs d’Oradour-sur-Glane,
Robert Hébras est décédé le 11 février 2023 à l'âge de 97 ans. Il a laissé ses confidences dans un livre dans lequel on comprend son souci de transmettre pour les générations futures, car rien n'est jamais acquis.
Je suis bien peu de choses face à ce drame incommensurable. En revanche, j'estime que c'est mon devoir de faire passer le message et de rappeler que le drame qui s'est déroulé ici peut se reproduire partout, aujourd'hui, demain ou plus tard. C'est pour cela que je dois témoigner. Ce n'est jamais facile, mais c'est indispensable.
Robert Hébras"Avant que ma voix ne s'éteigne" (2014)
Robert Hébras a porté les valeurs de la réconciliation.