EN IMAGES. Colère des agriculteurs : une nuit de mobilisation commence sur l'autoroute A20, le point sur les perturbations

Le blocage de l'autoroute A20 à la hauteur de la Croisière est en cours depuis ce mardi midi. Les agriculteurs bloquent au niveau de l'échangeur avec la RN145. La mobilisation se poursuit dans le calme dans la nuit de mardi à mercredi sur l'A20. D'importants ralentissements ont été signalés au niveau des itinéraires alternatifs.

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Ce mardi soir, l'Autoroute A20 est toujours bloquée, et elle le restera toute la nuit. La circulation est toujours interrompue entre les échangeurs 22 et 25 dans les deux sens de circulation.

Des déviations ont été mises en place, ce qui occasionne d'importants bouchons en amont dans le secteur d'Ambazac. D'importants ralentissements sont à noter, selon notre équipe sur place à 21 heures. 

Selon la préfecture ce mardi soir, des poids lourds qui n'ont pas utilisé les itinéraires alternatifs passeront la nuit dans la zone, dans des aires de repos ou sur la RD220 (car, sur ce dernier axe, ils ne peuvent pas faire demi-tour.)

Des voitures dans un premier temps bloquées dans le secteur, car les automobilistes espéraient une réouverture de l'axe Paris - Toulouse ont pu être réacheminées, selon les services de l'État. Ces personnes ont été informées que l'A20 ne rouvriraient pas. La gendarmerie sur place a aidé les passagers bloqués à faire demi-tour ou à rejoindre les déviations mises en place. 

La préfecture de Haute-Vienne fait le point ce mardi soir sur les perturbations à venir mercredi matin.

Une longue journée

Au loin, une fumée noire et une barrière constituée de véhicules bariolés signale la présence du barrage. Il était un peu plus de 12 h 30 quand ils se sont avancés, en cortège, pour bloquer l'A20, ce mardi 23 janvier. Environ trente tracteurs avec leurs bennes, prêtes à déverser pneus, paille et bâches en plastique sur l'asphalte de l'autoroute. Des pneus rapidement enflammés. Les agriculteurs ont répondu à l'appel de la coordination rurale. Ils sont équipés pour un siège de longue durée. Sur des tréteaux, des tables ont été montées et vite garnies de victuailles.

L'organisation appelait dans son communiqué à s'équiper de couvertures pour passer la nuit sur place. Les participants, approximativement 150, sont remontés. "C'est la première fois que je les vois motivés comme ça", confie Thomas Hégarty, président de la coordination rurale 87.

 

Le malaise agricole s'exprime

Une mobilisation qui vient concrétiser la colère qui couvait déjà depuis un certain temps dans le monde agricole.

Juché sur un télescopique, un organisateur harangue la foule. "Maintenant, c'est installé ! Prenez vos téléphones, appelez vos contacts et dites-leur de venir nous rejoindre. On ira à aucune réunion, si le préfet veut nous parler, ce sera à lui de venir ! Les députés, s'ils viennent ici, on les renvoie à coup de pied au cul. Les bobos écolos, on n'en veut pas !".

Au gré des témoignages, les raisons du ras-le-bol s'égrènent. Nous les exposons à longueur d'année, mais elles sont ici toutes condensées au même endroit. Il se dessine une profession meurtrie qui souffre de la faiblesse des revenus par rapport à la quantité de travail. Un éleveur limousin ne gagne assez fréquemment guère plus de 6 à 700 euros par mois.

Au-delà de ce fait qui n'est pas nouveau, c'est l'accumulation de contraintes qui a fait déborder le vase. Avec l'inflation, les trésoreries sont vides. Autrefois louée et voulue par les pouvoir publics, l'agriculture productiviste souffre d'une position schizophrène de la société. L'impératif du changement climatique et la détérioration sans précédent des écosystèmes poussent la société à exiger toujours plus des agriculteurs. Les consommateurs veulent manger mieux, mais ne veulent ou ne peuvent tout simplement pas payer plus cher. 

Pour suivre ces aspirations légitimes, le politique prend des décisions qui amputent encore plus des revenus déjà maigres et accumule les contraintes administratives. "C'est plus possible. En tant qu'agriculteur, on est là pour prendre soin de nos animaux. Or, nous passons 70% de notre temps à remplir des déclarations. Derrière, il y a des normes, des contrôles et on ne nous paye pas en temps et en heure. Ça devient intolérable. La hausse de prix nous a plombés également. Il faut qu'elle soit compensée par une hausse de nos produits de 25%. Quel autre métier accepterait de travailler pour 2 euros de l'heure ?", s'emporte Pascal Missou, éleveur à Vicq-sur-Breuilh. 

Influencer les négociations annuelles avec la grande distribution

Cette mobilisation n'intervient pas à n'importe quel moment. Les négociations annuelles sont en cours entre les agriculteurs, les industriels et la grande distribution jusqu'au 31 janvier. L'idée est évidemment d'établir un rapport de force.

La loi Egalim prévoyait d'établir une contractualisation entre les agriculteurs et l'aval qui prendrait en compte les coûts de production. Ceux-ci ont explosé avec la guerre en Ukraine (Gasoil, engrais, aliment, etc). Pour autant, les industriels et la grande distribution sont accusés de ne toujours pas jouer le jeu. 

"C'est révélateur d'un très grand malaise dans le milieu agricole. Le mouvement risque de durer, car tout le monde nous prend pour des idiots. L'État continue de ne pas respecter les consignes alors que nous avons de plus en plus de contraintes. On a pourtant l'agriculture la plus durable au monde, mais on est en train de nous tuer à petit feu", estime Elise Gourdon, agricultrice à Verneuil-sur-Vienne. 

"C'est un ras-le-bol quotidien. Ça fait des années qu'on alerte politiques et préfets sur le malaise dans nos cours de ferme. C'est un acharnement sur nous, les contrôles, les surcharges de la mutualité sociale agricole, le prix du GNR, aujourd'hui, on ne peut plus" explique Pierrick Gouteron, éleveur à Saint-Brice-sur-Vienne.

À lire aussi : CARTE. Colère des agriculteurs : l'A20 bloquée, opération sur la RN145, les manifestations en Haute-Vienne et en Creuse

La mobilisation est partie pour durer. Les agriculteurs se disent prêts à se relayer pour maintenir le blocage jusqu'à obtenir quelque chose de concret. 

"Les images, c'est bien, mais nous, on veut du réel", résume un manifestant. 

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