C’est une tradition, chaque dimanche, nous remontons le temps pour dénicher dans l’abondante photothèque de Paul Colmar des moments de l’Histoire du Limousin. Aujourd'hui, au lendemain des commémorations du 11 novembre, nous allons évoquer la question de la rééducation des blessés de la guerre de 14-18 à Limoges.
À la fin de la Première Guerre mondiale, plus d'un million de soldats reviennent dans leurs foyers, blessés. Beaucoup d'hommes sont tombés au front et le pays manque de bras. Le 2 août 1918, par décret, tout militaire peut demander son inscription à une école de rééducation.
300 à 400 lits sont réquisitionnés, ainsi que des bâtiments, des casernes à la fin de la guerre. Pour rappel, 410.000 hommes sont mobilisés pendant quatre années de conflit dont 45% d'agriculteurs ou auxiliaires agricoles. Au sortir de la guerre, 47% des invalides sont des anciens agriculteurs, et près 1,5 millions de Français.
Un conflit qui a provoqué la mort de 325.000 personnes. 380.000 blessés intègrent des établissements hospitaliers du centre de santé militaire. Plus de 70.000 mutilés entrent en rééducation.
Les militaires en instance de réforme perçoivent une allocation journalière de 1,70 franc (ceux qui sont mutilés ont un prélèvement de 1,20 euro sur cette allocation).
Selon la loi du 2 août 1918, tout militaire peut demander son inscription à une école de rééducation professionnelle en de sa réadaptation au travail. À cause de la crise de main d'œuvre, au sortir de la guerre, certains reçoivent des courtes formations. Près de trois mois d'apprentissage. Un ouvrier cordier reçoit 5 à 7 francs par jour selon le rendement atteint. Les petits métiers venant souvent en complément d'une pension de guerre. Quelques cadres sont tout de même formés parmi la cohorte : le machinisme exige des ouvriers qualifiés et cultivés.
L'office national des mutilés et réformés (ONMR), possède un parc de plus de 200 écoles, dont dix entreprises gérées par l'ONMR, dont un à Limoges.
Pour une grande partie des mutilés, il faut se réadapter dans l'entreprise face à des valides. Il y a des emplois réservés dans les administrations publiques, dans les compagnies de chemin de fer, les entreprises du privé.
L'idée étant d'éviter qu'ils perdent la dignité acquise sur le champ de bataille. Une première école créée par Edouard Herriot, maire de Lyon en décembre 1914, pour leur permettre de retrouver leur métier d'avant-guerre, grâce à des prothèses ou des appareillages.
Des écoles spécialisées dans la rééducation agricole, mais aussi de cordonnier, vannier, ferblantier, ou encore des formations d'employés de bureau. Des écoles au sein desquelles certains reçoivent des cours de semence, d'horticulture, de maîtrise des machines agricoles.
Ainsi, partout dans les entreprises, on voit des béquilles posées contre un mur, et dans lesquelles on apprend à fabriquer des paniers en osier. Dans leur atelier, les blessés assemblent des chaises. Un photographe limougeaud, Jean Jové, invente même un système de retouche pour les mutilés d'un bras. Tout en conservant son uniforme du 311ᵉ régiment d'infanterie, on aperçoit sur l'une des photos de la photothèque Paul Colmar, un vétéran qui s'exerce à la dactylographie.
Dans l'immédiat après-guerre, pour des anciens combattants, des emplois sont réservés pour tenter de se réadapter à cette nouvelle société. Il s'agit avant tout de conserver sa dignité.
Des prêts d'honneur sont même accordés permettant aux invalides de lancer leur affaire artisanale. Une politique pionnière de l'emploi des invalides en entreprise.