Dans cette période de campagne électorale, "la rhétorique de la haine" se déploie. C'est la raison pour laquelle, l’historien Gérard Noiriel se mobilise pour faire de la pédagogie. Des rencontres pour lutter contre la banalisation de la haine dans les discours politiques de certains candidats à l'élection présidentielle.
Déconstruire
"On vous cite comme ça des grands noms, comme Victor Hugo, Richelieu, etc. Mais, ce sont des phrases en l’air qui ne correspondent à rien", lance avec fermeté l’historien Gérard Noiriel, invité de plusieurs associations antiracistes à Limoges.
Aux élèves médusés, il interroge : "A Athènes, leur demande-t-il, pourquoi est-ce que c'est la tragédie qui marchait le mieux, comme genre ? Et bien, parce que quand vous convoquez des émotions, des angoisses de mort, qui traversent tous les êtres humains, et bien, vous pouvez capter leurs émotions. Donc le discours apocalyptique qui annonce les catastrophes, attire le maximum de monde".
Devant lui ce jour-là, ce sont plus de 200 élèves des lycées Gay-Lussac et Raoul Dautry, qui sont venus écouter un universitaire, décidé à dénoncer la haine, très présente dans cette campagne présidentielle, par la voix de polémistes, aux propos ouvertement racistes et qui n'hésitent pas falsifier l'Histoire.
Gérard Noiriel, historien, spécialiste de l'immigration, de saynètes en pastiches, tente de déconstruire ce qu'il nomme "la rhétorique de la haine".
Sa conférence théâtralisée s’est tenue ce vendredi 4 mars à l'espace Simone Veil à Limoges, d’abord devant trois classes de première et terminale, puis devant le grand public dans un deuxième temps.
"Dans la rhétorique, qui veut dire l’art de convaincre, il y a toute une dimension émotionnelle. C’est toujours difficile quand vos seules armes sont la raison, la connaissance, d’invalider cela. Parce que comme vous le voyez, on n’est pas dans le même langage. C’est cela la grande difficulté", explique Gérard Noiriel, directeur d'études à l'EHESS (école des hautes études en sciences sociales).
Mobilisation des antiracistes
A l'initiative de cette conférence, un collectif de dix-sept associations haut-viennoises. Le groupe tire la sonnette d'alarme face à la montée en puissance des idées populistes, au détriment des vrais enjeux de cette présidentielle.
"Les vraies causes de cette insécurité au travail, de ces difficultés à vivre sont occultés par un discours de haine, et on déporte les responsabilités sur l’autre, alors que les responsabilités, elles sont peut-être sur ceux qui arment ces discours-là", argumente Michèle Baracat, présidente de l'institut d'histoire sociale CGT 87.
Des discours similaires, des années 30 à l'époque actuelle, de quoi jeter une lumière crue, sur ce qui se joue dans la société. "C’est poignant, en fait. On se rend compte qu’on vit dans un monde violent, confie Anaëlle Hertzog, élève du lycée Raoul Dautry. En fait, on ne s’en rend pas compte pas compte parce qu’on est jeune, encore, mais sur les réseaux sociaux, ça véhicule énormément de haine, et c’est maintenant qu’on commence à s’en rendre compte, je pense", reconnait la jeune femme.
Développer son esprit critique demeure le rempart le plus sûr face aux petites phrases assassines de certains candidats.