Créé ex nihilo en 2016, le parti politique d’Emmanuel Macron, qui a connu plusieurs noms, a fait une entrée fracassante dans le paysage politique limousin l’année suivante, lors des élections législatives. Mais il peine, depuis, à retrouver les hauteurs atteintes, faute peut-être de véritables têtes d’affiche implantées, hormis le Creusois Jean-Baptiste Moreau. Et les prochaines législatives s’annoncent incertaines.
Des débuts en fanfare, avant un long déclin
Des quasis 70% obtenus par Emmanuel Macron lors des présidentielles de 2017 aux 12% de Valérie Hayer lors des dernières européennes… Si l’on ne peut bien sûr comparer les deux élections, force est tout de même de constater qu’en sept ans, après l’avoir accueilli à bras ouverts, le Limousin n’est plus guère enthousiaste vis-à-vis du parti présidentiel.
Dans la foulée de la présidentielle, La République en Marche, telle que Renaissance se nommait alors, manque, à vingt-cinq voix près dans la deuxième circonscription de Corrèze, le grand chelem dans la région : cinq députés sur six ! En Creuse, Jean-Baptiste Moreau, proche du président, et en Haute-Vienne, Jean-Baptiste Djebarri, à l’ambition peu cachée, incarnent, à l'époque, cet élan nouveau.
Il va pourtant se briser, au fur et à mesure des élections suivantes.
Dès les Européennes de 2019, la liste LREM-Modem, emmenée par Nathalie Loiseau, ne dépasse pas les 20%, ou à peine, et termine dans les trois départements derrière, déjà, la liste du Rassemblement National.
Lors des municipales de 2020, aucune ville limousine d’importance n’est enlevée, directement, sous l’étiquette du parti présidentiel. Seuls, au jeu des alliances, des conseillers municipaux y sont élus.
Aux élections régionales de 2021, le Limousin n’envoie qu’une seule candidate LREM siéger à Bordeaux, Marie-Ange Magne, qui était alors députée de Haute-Vienne.
" Oui, c’est notre seule élue limousine au Conseil Régional. Enfin, paraît-il. Voilà trois ans que nous n’avons plus de ses nouvelles ", nous confiait, ce mardi au téléphone, Roland Mérigoux, président de Renaissance 87.
Les mêmes jours avaient lieu les élections départementales : seuls Isabelle Négrier en Haute-Vienne et Philippe Lescure en Corrèze sont élus, sur des listes d’union, mais en revendiquant leur étiquette LREM.
Aux présidentielles de 2022, le Limousin reconduit Emmanuel Macron, mais à peine avec 55.6% : quinze points de moins que cinq ans avant.
Les législatives sont une débâcle : les cinq députés sortants sont battus.
Les sénatoriales de 2023 ne voient aucun sénateur Renaissance (nouveau nom du parti) Limousin élu, même si Daniel Chasseing, élu en Corrèze, est reconnu par Renaissance 19 comme un allié.
Et enfin les dernières Européennes, où la liste Renaissance n’est arrivée que 3ᵉ dans nos trois départements.
Quelles explications ?
Pour les trois présidents Renaissance en Limousin, Isabelle Celle en Corrèze, Roland Mérigoux en Haute-Vienne et Alexandra Monnet en Creuse, les raisons sont multiples.
La première invoquée est l’âge du parti.
Nous sommes un parti jeune, après tout, nous n’avons que sept ans d’existence. Alors, nous avons peut-être un peu péché par manque d’expérience. Notamment après 2020, où certains de nos élus se sont faits un peu piéger dans le jeu des alliances.
Roland MérigouxPrésident de Renaissance 87
Liée à cela, la difficulté aussi de mobiliser un parti, un appareil. Pour Jean-Baptiste Moreau, "le militantisme, dans tous les partis d’ailleurs, est en net recul. Je ne vous parle pas du nombre d’adhérents, qui est forcément supérieur, mais qui ne veut pas forcément dire grand-chose. Je parle des militants actifs, qui sont essentiels lors d’une campagne. Ceux qui aident, et qui font bouger les choses. Si je vous dis, à la louche, qu’on peut en compter près de 150 en Limousin, ce sera déjà bien. Et c’est vrai aussi qu’on a peut-être mis du temps à se structurer de manière durable, dans nos trois départements."
Certains évoquent aussi l’usure du pouvoir, et les sept ans d’Emmanuel Macron à la tête du pays, avec de fortes périodes de contestations, comme lors de la crise des gilets jaunes, ou de la réforme des retraites. Mais tous reconnaissent : le véritable problème vient sans doute des têtes d’affiche, ou de leur absence.
Ainsi, pour Roland Mérigoux : "On a vu ce que ça a donné avec Jean-Baptiste Djebarri, il roulait surtout pour lui. Après, pourquoi ça n’a pas marché avec Pierre Vanteau, je ne sais pas, je n’ai pas compris. Quant à Geoffroy Sardin, c’était compliqué avec ses affaires sur Paris. Il vient toujours et souvent, mais cela ne se sait guère. "
Il y a plusieurs raisons, ou en tout cas, on peut voir plusieurs explications. D’une part, le militantisme, dans tous les partis d’ailleurs, est en net recul. Je ne vous parle pas du nombre de nos adhérents, qui est, vous comprendrez que ça me gêne d’en parler, il y a le problème des têtes d’affiche. Oui, j’en suis une, sans doute la seule, même après avoir été battu en 2022. On a eu du mal, c’est vrai sur les trois départements, à en faire émerger d’autres. Il y a ceux qui sont allés vers d’autres partis, et ceux partis vers d’autres aventures. Mais il faut dire, nos ex-députés, surtout en Haute-Vienne, on ne les a guère vus après, ou alors pour d’autres raisons…
Jean-Baptiste Moreau, ex-députéCandidat Renaissance aux législatives 2024 en Creuse
Quid des législatives qui s’annoncent ?
À l’heure où ces lignes sont écrites, une seule certitude : Jean-Baptiste Moreau sera candidat sous l’étiquette Renaissance, dans l’unique circonscription de Creuse, peu importe que Valérie Simonet, la présidente du département, y aille ou pas pour LR.
En Corrèze, selon Isabelle Celle, si l’on travaille sur des candidatures pour les deux circonscriptions, la tendance actuelle serait de ne vraisemblablement pas s’aligner face à la LR Frédérique Meunier dans la deuxième, puisqu’elle aurait dénoncé le rapprochement avec le RN souhaité par Éric Ciotti, et d’attendre plus de garanties de la part du LR Francis Dubois dans la première. "Cela va se décider au niveau des instances nationales ", nous confiait au téléphone Isabelle Celle ce mercredi.
Quant à la Haute-Vienne, c’est encore très incertain, selon Roland Mérigoux : " Nous avons une très importante réunion ce soir, où tout ne sera sans doute pas décidé ou en tout cas arrêté. Cela devrait l’être d’ici vendredi. Nous travaillons sur les trois circonscriptions, pour proposer un choix, mais il faut voir aussi ce que vont faire ceux avec qui nous pourrions éventuellement nous allier. Guillaume Guérin notamment doit clarifier sa position. Voir si d’autres préfèrent vraiment le Front Populaire, à l’Arc Républicain. Enfin, il y a en d’autres qui pourraient partir avec nous, ou avec notre soutien, mais qui hésitent par rapport à leur situation personnelle. "