Depuis la Révolution Française de nombreux députés élus par les citoyens de Haute-Vienne, de Creuse ou de Corrèze ont siégé dans les assemblées qui se sont succédées au fil des législatures. Quelques uns ont marqué l'histoire et les mémoires.
En Limousin, depuis 1789, les citoyens ont élu 369 députés pour les représenter dans l'une des assemblées chargée de faire la loi : 141 en Haute-Vienne, 124 en Corrèze et 104 en Creuse.
La plupart n'ont laissé aucune trace particulière dans la mémoire des Français.
Le patronyme de quelques uns nous est parfois resté familier dans la région par la grâce du nom d'une rue que nous empruntons régulièrement.
Seul un petit nombre d'entre eux a su dépasser le périmètre de la gloire locale pour investir la mémoire collective nationale et franchir les échelons de la postérité.
La liste n'est pas exhaustive, et chacun pourra citer un nom pour illustrer son panthéon personnel des gloires politiques.
A la veille d'une nouvelle législature, nous vous en proposons quelque'uns qui inspireront peut-être les nouveaux élus et guideront leurs premiers pas dans les couloirs encore inconnus du Palais Bourbon.
En Haute-Vienne
Jean-Baptiste Jourdan
Né le 29 avril 1762 à Limoges et mort le 23 novembre 1833 à Paris, le maréchal Jourdan est surtout connu pour sa carrière militaire. Après des débuts prometteurs aux côtés des américains dans la guerre d’indépendance des Etats-Unis il revient à Limoges à la tête d’un petit commerce quand éclate la Révolution.
Fervent Républicain il s’engage à nouveau dans l’armée devenue révolutionnaire et devient très vite général, enchaînant les victoires comme la célèbre bataille de Fleurus.
En 1797, il est nommé au « Conseil des Cinq-Cents », l’assemblée législative du Directoire, pour représenter la Haute-Vienne. Il en devient le président. Il y fera notamment voter une loi sur le service militaire obligatoire.
Puis il reprend sa carrière militaire aux quatre coins de l’Europe, prend la tête de l’Armée d’Italie et devient maréchal d’Empire. Nommé gouverneur de Naples, puis major général de l’armée d’Espagne où Napoléon le rendra responsable d’une bataille décisive.
Il continuera sa carrière après la chute de l’Empire et deviendra gouverneur des Invalides après s’être rallié à la Monarchie qui le nommera, cette fois-ci, à la chambre des Pairs.
Joseph Louis Gay-Lussac
Né le 6 décembre 1778 à Saint-Léonard-de-Noblat et mort le 9 mai 1850 à Paris, Gay-Lussac est un grand scientifique connu notamment pour sa loi sur la dilatation des gaz.
Ce sera également un chimiste éminent. Ses travaux permettront d’établir la loi sur la concentration en alcool des boissons alcoolisées, et donc, leur taxation.
Polytechnicien, titulaire d’une chaire de chimie à la faculté des Sciences de Paris, il est aussi membres de nombreuses sociétés savantes à l’étranger.
Gay-Lussac est élu député de l'arrondissement de Limoges en 1831. Il y siégera jusqu’en 1839. Puis il sera nommé pair de France en 1839 par Louis-Philippe.
Léon Roche
Né le 29 juin 1895 à Oradour-sur-Vayres et mort le 26 juin 1944 à Paris, Léon Roche était agriculteur, militant socialiste et maire de d’Oradour-sur-Vayres.
Il fut député socialiste (SFIO) de la Haute-Vienne de 1932 à 1942.
Léon Roche fut surtout l’un des 80 parlementaires (dont 3 limousins sur les 14 députés de la région) et le seul de Haute-Vienne à refuser d’octroyer les pleins pouvoirs au maréchal Pétain le 10 juillet 1940 à Vichy après la débâcle face à l’armée nazie.
Avant cette date il fut un député particulièrement actif pour défendre un certain nombre de lois sociales ou concernant le monde rural et agricole.
Léon Roche s’engagera ensuite dans la Résistance, participera à la reconstruction de la SFIO clandestine, et travaillera en liaison avec le Conseil National de la Résistance.
En Creuse
Martin Nadaud
Né le 17 novembre 1815 à Soubrebost en Creuse et mort le 28 décembre 1898 dans ce même village, Martin Nadaud était le fils de cultivateurs analphabètes.
Comme beaucoup de Creusois, à 14 ans il part avec son père à Paris comme maçon sur les chantiers pour ramener un peu d’argent dans la famille. Il parfait son instruction et fréquente les militants et théoriciens socialistes comme Pierre Leroux dont il deviendra l’ami. En 1849 il est élu député de la Creuse une première fois tout en continuant à travailler sur les chantiers dans le XIIème arrondissement.
Banni sous le Second Empire il est contraint à l’exil à Bruxelles puis à Londres.
Lors de la guerre de 1870 il revient en France et il est nommé préfet de la Creuse. En 1876 il est réélu député de la Creuse. Il le restera jusqu’à sa mort en 1898.
A l’Assemblée il défendra notamment l’instauration des retraites ouvrières, la protection contre les accidents du travail et la responsabilité de l’employeur. Il demandera l’amnistie pour les Communards et il se battra avec Jules Ferry pour l’enseignement Laïc.
Ami de Georges Sand Martin Nadaud est notamment l’auteur du fameux adage « quand le bâtiment va, tout va ».
René Viviani
Né le 8 novembre 1863 à Sidi Bel Abbès en Algérie et mort le 6 septembre 1925 au Plessis-Robinson, René Viviani a été député de la Creuse de 1910 à 1922.
Militant socialiste et avocat, il a cofondé le journal L'Humanité avec Jean Jaurès.
Il a été ministre du Travail de 1906 à 1910 et il a fait voter des lois réformistes sur le repos hebdomadaire, les assurances du travail et le salaire des femmes mariées.
Il est élu président du Conseil au moment de la déclaration de la guerre de 1914-1918. Le 1er août 1914, il ordonne la mobilisation du pays puis annonce l'entrée en guerre.
André Chandernagor
Né le 19 septembre 1921 dans la Vienne, André Chandernagor est aujourd’hui centenaire. Il vit en Creuse où il a été député du département pendant 23 ans, de 1958 à 1981. Il est le parlementaire creusois qui a eu le plus long mandat l’Assemblée Nationale.
Il adhère à la SFIO en 1944 puis il est énarque dans la même promotion que Valéry Giscard d’Estaing.
En 1953 il est élu maire de Mortroux dans la Creuse, puis il entre au Conseil Général du département en 1961. Il en deviendra le président en 1973.
En 1974 il devient président du Conseil Régional du Limousin.
Durant ses 23 ans de mandat successifs à l’Assemblée Nationale il est l’un des principaux porte-parole du groupe socialiste.
Après l’arrivée au pouvoir de la Gauche en 1981 il entre dans le gouvernement Pierre Mauroy comme ministre des Affaires Européennes.
En 1983 il est nommé premier président de la Cour des Comptes jusqu’en 1990.
André Chandernagor est le père père de l’écrivaine Françoise Chandernagor;
En Corrèze
Henri Queuille
Surnommé « le père Queuille », né le 31 mars 1884 à Neuvic-d'ussel en Corrèze, décédé le 15 juin 1970 à Paris, Henri Queuille est probablement le recordman toutes catégories du nombre de mandats et fonctions politiques qu’un Limousin ait jamais accumulé.
Engagé très jeune au Parti Radical Socialiste, il revient à Neuvic après ses études et s’installe comme médecin généraliste.
Il est élu maire de la ville en 1912, conseiller général de Corrèze en 1913 et député de Corrèze en 1914.
Henri Queuille sera maire de Neuvic pendant 53 ans (de 1912 à 1965), au Conseil Général de Corrèze pendant 48 ans (de 1913 à 1961), dont 21 ans comme président, député de la Corrèze pendant 44 ans (de 1914 à 1958), sénateur pendant 10 ans (de 1935 à 1945).
Sous la IIIème République Henri Queuille est sans doute la personnalité politique qui fit partie du maximum de gouvernements dans le minimum de temps. En vingt ans, de 1920 à 1940, il fut dix-neuf fois membre d'un cabinet ministériel, dont treize fois à l’Agriculture.
Il s’abstint lors du vote des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain en 1940 puis s’exila à Londres en 1943 pour rejoindre le Général De Gaulle.
Sous la IV ème République, Henri Queuille accumule à nouveau les mandats parlementaires et les fonctions ministérielles, dont la présidence du Conseil (chef du gouvernement) à trois reprises.
Symbole du « régime politique des partis » de la IIIème et IVème République, Henri Queuille est à l’origine, entre autres, de la SNCF, de la Caisse Nationale du Crédit Agricole et de la modernisation de la Corrèze.
On prête à Henri Queuille plusieurs citations restées célèbres dans le monde politique : « Il n’est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout », « la politique ce n’est pas de faire taire les problèmes, c’est de faire taire ceux qui les posent » et le fameux « les promesse n’engagent que ceux qui les écoutent », repris quelques années plus tard par celui que certains considèrent comme son fils spirituel : Jacques Chirac.
Jacques Chirac
Né le 29 novembre 1932 à Paris et mort le 26 septembre 2019 à Paris Jacques Chirac est issue d’une famille corrézienne, tant du côté maternel que paternel. Ses deux grands pères furent instituteurs en Corrèze et il y passa une partie de sa petite enfance.
Enarque, conseiller à la Cour des Comptes, il rencontre Georges Pompidou à Matignon qui lui conseille de se lancer en politique.
La légende veut qu’en 1966, à Solignac près de Limoges, avec Bernard Pons, Pierre Mazeaud,et Jean Charbonnel, Jacques Chirac, fit le serment de « vaincre l’emprise socialiste et communiste dans le Limousin ».
Plutôt que de viser une circonscription facile en région parisienne, Jacques Chirac se présente donc aux législatives de 1967 en Corrèze, dans le canton d’Ussel, où il est élu à l’issue d’une campagne « de terrain » et de contact direct avec la population dont le style fera sa réputation dans le département.
Jacques Chirac sera député de la Corrèze sans interruption de 1967 à 1995.
Egalement président du Conseil général de la Corrèze de 1970 à 1979, fort de la profondeur d’un ancrage local qu’il revendiquera sans cesse et ne laissera jamais en jachère, Jacques Chirac déroulera une carrière politique nationale qui le mènera à la présidence de la République en 1995 puis en 2002.
Entre temps, il aura été nommé quatre fois secrétaire d’Etat, quatre fois ministre, deux fois premier ministre.
Jacques Chirac aura également été élu maire de Paris pendant 18 ans.
Durant tous ses mandats « le grand Jacques » comme ont fini par l’appeler de nombreux corréziens n’oubliera jamais de donner un petit « coup de
main » à son département et à ses habitants, multipliant les investissements, les subventions et les emplois.
Aujourd’hui, l’image de Jacques Chirac est reprise par de jeunes générations de corréziens et associée de façon quasi iconique au département.
François Hollande
Né le 12 août 1954 à Rouen, François Hollande est un énarque, militant socialiste depuis 1979, député de la Corrèze en 1988 à 2012.
François Hollande a commencé son implantation en Corrèze en 1983 comme conseiller municipal à Ussel puis à Tulle en 1989, ville dont il deviendra le maire de 2001 à 2008.
Conseiller régional du Limousin de 1992 à 2001, il est élu au conseil général de Corrèze en 2008 et il en devient le président.
François Hollande a été premier secrétaire du Parti socialiste de 1997 à 2008, pendant la troisième cohabitation puis dans l’opposition.
En 2012, François Hollande est élu Président de la République et vient fêter sa victoire à Tulle où il se rendra régulièrement et gardera des liens durant tout son mandat de Président.
Il se marie à Tulle avec l’actrice et productrice Julie Gayet en juin 2022.
En 2015, à l’occasion de la réforme des régions, François Hollande dissout la région Limousin au sein de la région Nouvelle-Aquitaine.
En 2017 il renonce à se présenter à l’élection présidentielle pour un second mandat.
En 2022, François Hollande renonce à se présenter aux élections législatives en Corrèze, malgré son opposition à l’accord NUPES signé par le Parti Socialiste.