Tous les ans, depuis des siècles, c'est la même inquiétude : avant les "saints de glace", les 11, 12 et 13 mai, les jardiniers redoutent un coup de froid. Et quand le dérèglement climatique vient compliquer le calendrier populaire, les adeptes du jardinage ne savent plus à quel saint se vouer.
Saint Mamert, Saint Pancrace et Saint Servais. Si vous n'êtes pas jardinier, le nom de ces trois martyrs de la chrétienté célébrés respectivement les 11, 12 et 13 mai, ne vous dit sans doute rien.
Si, en revanche, vous avez déjà perdu une partie de vos plantations de printemps à cause d'un gel tardif en cette période généralement clémente, vous ne les avez pas oubliés.
" En mai, fais ce qu'il te plaît " annonce pourtant un dicton populaire. Mais depuis des lustres, d'autres adages conseillent la prudence.
Avant Saint-Servais, point d'été ; après Saint-Servais, plus de gelée.
dicton populaire
La liste est longue des mises en garde qui accusent les "saints de glace" de saboter le travail et les espoirs des jardiniers.
Alors faut-il cette année encore se fier à la sagesse populaire, y adjoindre les modifications engendrées par lles changements climatiques ou se contenter de faire confiance à la science en consultant régulièrement les prévisions de Météo France ? En résumé : peut-on commencer à planter avant la mi-mai ?
Samedi 11 mai, à Crozant, en Creuse, les passionnés sont réunis pour l'une des plus belles foires aux plantes de la région. Sous un soleil radieux, dans le cadre somptueux de l'arboretum de La Sedelle, les amoureux des plantes et des jardins ont tous un avis sur la question.
Pour Yann Duflot, guide conférencier de l'Arboretum, " on a eu un printemps précoce, suivi d’une gelée tardive donc il y a déjà eu de petits dégâts ".
Au pire, on va perdre quelques jeunes pousses mais rien de grave. Il faut juste rester attentif.
Yann DuflotGuide conférencier à l'arboretum de La Sedelle
Parmi les visiteurs, d'autres restent attachés aux traditions : " les repères qu’avaient nos grands-parents sont en train de se déplacer avec le changement du climat. Je n’ai pas encore planté mes tomates. J’ai gardé un fond de prudence ".
Pour certains producteurs, gelées tardives ou pas, désormais il faut surtout s'adapter au climat.
" L’important, c’est surtout les choix qu’on fait par rapport aux plantes qu’on veut installer dans son jardin. Il faut être de plus en plus précis. Nous, on se spécialise dans les plantes pour les jardins sans arrosage".
Un phénomène météo qui s'explique
D'un strict point de vue météorologique, dans l'hémisphère nord et notamment en l'Europe de l'Ouest, les "saints de glace" correspondent à une période où le passage de fronts froids amène régulièrement de l'air du nord. Avec les déplacements plus ou moins erratiques de l'anticyclone des Açores à cette époque de l'année, quand le ciel vient à se dégager, la perte de la chaleur accumulée dans une journée de printemps peut être importante pendant la nuit, d'où certains épisodes de gel tardifs et incongrus.
Mais les archives de Météo France montrent que le gel dans la période des "saints de glace" ne se produit qu'assez rarement. Ce ne devrait en tout cas pas être le cas durant ce week-end aux températures relativement clémentes.
Une prudence qui persiste
Les plus prudents ou les plus pessimistes vous conseilleront pourtant de ne pas vous précipiter. Car si " quand la saint Urbain est passée, le vigneron est rassuré ", ils n'oublient pas que " Mamert, Pancrace, Boniface sont les trois saints de glaces, mais saint Urbain les tient tous dans sa main". Et la saint Urbain c'est le 25 mai !
VIDEO ⇒ Reportage à l'occasion de la foire aux plantes de l'arboretum de la Sedelle.