Trafic de stupéfiants, délinquance économique et financière, violences conjugales, recueil de la parole des enfants... Émilie Abrantes, nouvelle procureure de la République de Limoges, présente les différents travaux qu'elle compte mener avec son équipe.
Émilie Abrantes est officiellement la nouvelle procureure de la République de Limoges depuis qu'elle a effectué son audience de présentation ce lundi 7 octobre 2024. Elle était auparavant procureure de la République de Brive et a également exercé dans différents parquets de Nouvelle-Aquitaine, comme à Pau, Poitiers ou encore Bordeaux.
La magistrate succède à Baptiste Porcher, sanctionné par le Conseil supérieur de la magistrature pour des "comportements et des propos à connotation sexuelle, outrageants ou dégradants". Suite à deux plaintes d'une magistrate et d'une jeune auxiliaire de Justice, il a été muté au parquet de Bobigny, en Seine-Saint-Denis.
Retrouvez l'interview d'Emilie Abrantes dans l'édition ICI 12/13 du 9 octobre 2024
Délinquance et trafic de stupéfiants dans le viseur
Interrogée dans notre journal ce mercredi midi, la procureure de la République de Limoges fait le point sur les différents axes de travail qui vont mobiliser son équipe.
L’objectif est bien de s’attaquer au deal de rue, et puis de travailler aussi sur des strates supérieures.
Emilie AbrantesProcureure de la République de Limoges
Depuis le début du mois de septembre, Limoges fait face à un regain de tensions et de délinquance. Le 1ᵉʳ septembre, huit véhicules ont été incendiés au petit matin dans le quartier du Vigenal. Dans la nuit du 20 au 21 septembre, le tournage d'un clip de rap a dégénéré, entraînant des troubles en centre-ville puis des affrontements entre des individus et les forces de l'ordre dans le quartier du Val de l'Aurence.
En quelques semaines, une voiture de police a été visée par un tir (le 4 octobre) et dans le quartier de la Bastide, des individus ont tenté de s'introduire dans le commissariat (le 28 septembre). D'autres affrontements ont eu lieu avec la police, avec des échanges de mortiers d'artifice et de gaz lacrymogène (le 6 octobre).
Émilie Abrantes compte s'atteler à ce qu'elle qualifie ainsi de "phénomène de violences urbaines", faisant ainsi le lien avec le trafic de stupéfiants. Durant la période où elle officiait à Brive, elle a mené des opérations de grande envergure et compte poursuivre son travail en Haute-Vienne. "L’objectif est bien de s’attaquer au deal de rue, et puis de travailler aussi sur des strates supérieures", explique-t-elle. "Les trafics de stupéfiants sont bien organisés. Il n’y a pas lieu d’appréhender que la part visible sur la voie publique, mais aussi de s’attaquer aux personnes qui sont au-dessus, qui "managent" ces trafics de stupéfiants."
Meilleure prise en charge des victimes de violences conjugales et intrafamiliales
Alors que la cour d'assises de Limoges accueille actuellement le procès de deux hommes accusés d'un double meurtre, dont un féminicide par ex-conjoint, et d'une triple tentative de meurtre, sur trois enfants, la question des violences conjugales et intrafamiliales est incontournable dans l'agenda de la nouvelle procureure de la République.
Si elle estime que de nombreux dispositifs sont déjà en place en Haute-Vienne pour améliorer la prise en charge de victimes de ce type de violences, notamment en matière de conditions de prise de plainte et de coordination du travail associatif, Émilie Abrantes entend aller plus loin, notamment pour davantage considérer les enfants dans ce domaine. Elle compte par exemple "mettre à leur disposition un chien d'assistance judiciaire, un outil qui a déjà été expérimenté ailleurs pour aider le recueil de plainte". Elle a également l'intention de simplifier leurs démarches en proposant "un parcours en hôpital pour essayer de faire en sorte que, lorsqu’ils viennent pour être vus par un médecin légiste, ils puissent voir un psychologue sur site et être entendus par les forces de l’ordre en un seul endroit."
Enfin, la magistrate tient à rappeler un dernier objectif : lutter contre la délinquance économique et financière. Bien qu'elle soit plus discrète et moins évidente pour le grand public, Émilie Abrantes pense que cette lutte doit figurer parmi les priorités : "C'est une gangrène puisque nous souffrons tous finalement des fraudes quelles que soient leurs formes."