Ludivine Bignon est infirmière au service de maladies infectieuses du CHU de Limoges, qui prend en charge les patients atteints du Coronavirus. Elle a accepté de se filmer pour nous montrer ses nouvelles conditions de travail et nous livrer son ressenti.
Ludivine Bignon est infirmière au CHU de Limoges depuis six, et elle est rattachée depuis deux ans au service des maladies infectieuses.Dans notre service, nous sommes habitués à prendre en charge les patients infectés et potentiellement contagieux. Cela ne nous fait pas peur. Mais avec le Covid 19, il a fallu mettre en place de nouveaux protocoles, une nouvelle façon de travailler. Et la charge de travail a considérablement augmenté, même si la vague n'est pas encore là, en Limousin.
Ce service est en première ligne dans la prise en charge des patients atteints de Covid 19 qui ne nécessitent pas de réanimation.
Les 16 lits sont réservés aux cas avérés de Coronavirus. Les patients atteints d'autres pathologies infectieuses sont pris en charge dans d'autres services.
Pour l'instant, l'affluence est gérable. Au moment où je vous parle [samedi 4 avril 2020], nous avons fait trois entrées dans la nuit, et 10 lits sur 16 sont occupés. Mais cela évolue très vite. D'autres services comme l'Unité Covid, la Polyclinique et bien sûr la réanimation accueillent aussi des patients infectés. Nous faisons en sorte de répartir les patients.
Une nouvelle organisation
Le service est équipé pour gérer les patients hautement infectieux. Toutes les chambres sont individuelles et possèdent un sas à l'entrée et un système de dépression pour réduire le risque de contamination.
Malgré tout, une nouvelle organisation a été mise en place. Le personnel travaille en binôme : une infirmière et une aide-soignante. Les effectifs ont été renforcés, quasiment triplés, permettant d'avoir un binôme de soignants pour 5 à 6 patients au lieu de 8 habituellement.
Les entrées dans les chambres sont limitées au maximum : le service a été équipé de nouveaux Scopes, ces appareils qui permettent de surveiller à distance les constantes des patients. Et la communication avec les patients se fait par interphone.
Du fait d'avoir augmenté les effectifs, on est amenés au quotidien à former d'autres collègues, ce qui augmente vraiment notre charge mentale. Cela leur demande à eux aussi une grande adaptabilité. Tout cela est vraiment conséquent, et le planning est aussi variable de jour comme de nuit.
Seul contact pour les patients
Pour Ludivine, la principale difficulté reste l'isolement des patients, car les visites ne sont pas autorisées dans le service.
Une cellule psychologique a été créée au sein du CHU pour accompagner les soignants lors de cette période particulière.Nous sommes le seul contact pour les patients, et aussi pour les familles avec qui nous communiquons par téléphone. Le fait d'être la seule présence pour les patients nous marque d'autant plus. Cela crée des changements dans notre prise en charge, notamment lors des situations vraiment marquantes de fin de vie, qui sollicitent d'autant plus nos âmes de soignants.
Le personnel a aussi suivi des formations spécifiques, pour les mesures sanitaires mais aussi pour l'accompagnement des familles lors d'un décès.
Cette période particulière génère aussi des craintes plus personnelles.
Le virus ne s'arrête pas aux portes de l'hôpital. On se questionne chacun le soir en rentrant à nos domiciles, on s'inquiète pour nos familles. Heureusement, dans cette crise on ressent un grand élan de solidarité, une entraide entre tous les acteurs. On a tous un rôle à jouer, il faut respecter le confinement pour combattre tous ensemble le virus.