Plus de 5 000 personnes ont bénéficié d'une greffe de cornée en France en 2019, mais les donneurs se font rares et la demande est grandissante. Au CHU de Limoges, des recherches sont en cours sur des cellules souches qui pourraient permettre des greffes plus nombreuses.
La cornée, c'est cette couche transparente qui se trouve devant l'iris et la pupille de l'oeil. Lorsqu'elle est défaillante, la vue est très affectée. Dans la moitié des cas, il s'agit d'un déficit cellulaire et la seule solution, pour rendre une vue correcte au patient, c'est la greffe. En 2019 en France, 5 032 personnes en ont bénéficié.
Aujourd'hui, même si une seule petite couche est déficiente, et c'est tout l'oeil qui ne fonctionne pas et il faut greffer toute une cornée. Il s'agit d'une chirurgie qui dure environ 45 minutes. Le chirurgien manipule alors un tissu de quelques dizaines de microns.
Cette technique se heurte à certains écueils. Il faut évidemment des greffons disponibles : la cornée est un tissu qui ne peut être prélevé que sur les donneurs décédés et face à une demande croissante, les listes d'attente s'allonge. Il y a aussi un risque de rejet.
Alors aujourd'hui, d'autres méthodes sont à l'étude.
►Greffe de cornée : recherches sur des cellules souches à Limoges, reportage de François Clapeau et de Thomas Milon - France 3 Limousin
Des cellules humaines reconverties
C'est par la médecine régénérative que pourrait arriver la solution, car "à partir de cellules souches, l'objectif est de ne plus remplacer toute la cornée, mais juste la couche déficiente", explique Yohan Benayoun, chirurgien ophtalmologiste à la Polyclinique de Limoges. Les recherches menées par Pierre-Antoine Faye du CHU de Limoges, ouvrent donc des perspectives sérieuses.
De quoi s'agit-il ? Une cellule souche est une cellule indifférenciée. C'est-à-dire capable de devenir n'importe quel organe. Il s'agit principalement de cellules embryonnaires, prélevées (dans l'embryon, comme son nom l'indique) avant même de se "spécialiser". Mais les recherches de Pierre-Antoine Faye portent sur des cellules adultes. "Nous travaillons sur des cellules de la peau, que nous déprogrammons, on les rajeunit, elles sont manipulées pour revenir en arrière, vers un état de souche, et dans ce cas précis, pour qu'elles deviennent de la cornée."
Le corps humain peut alors produire ses propres pièces de rechange !
La technique est chronophage. "C'est très long", semble s'impatienter Pierre-Antoine Faye. "Il faut environ 3 à 4 mois pour déconstruire la cellule et 2 à 3 semaines pour la reprogrammer".
A cela s'ajoute une autre contrainte : le transport. "C'est beau d'avoir un concept, que ça pousse dans une boîte, mais il faut qu'on puisse s'en servir, déplacer ces cellules pour que le chirurgien puisse les manipuler".
Pierre-Antoine Faye vient de recevoir le prix jeune chercheur de la Casden et de la Fondation de l'avenir, soit 16 000 euros pour développer encore cette recherche. C'est un début, mais il lui faudra sans doute encore un peu de temps... et d'argent. Ce qui est enthousiasmant, c'est que la méthode est porteuse d'avenir, car elle concerne de nombreuses maladies liées au vieillissement.