Avec 1 800 autres propriétaires de véhicules Renault et Nissan, Michel Rebérat, habitant de Haute-Vienne, a décidé d'entamer un bras de fer contre le constructeur. Il témoigne, ainsi que son avocat.
"Comme des milliers de Français, le 10 avril, j’ai été victime d’une panne qui nécessite le changement de mon moteur essence." Voici les premières lignes de la lettre qu’a adressée Michel Rebérat au constructeur automobile Renault, le 2 mai 2023, alors qu’il venait de se faire peur au volant de sa voiture, un Nissan Quasqhai de 2016. Un véhicule équipé d'un moteur Renault.
Ce Haut-Viennois fait partie des dizaines de propriétaires de véhicules Renault, Dacia, Nissan, victimes d’une panne en raison d'un moteur défaillant. "Mon moteur a lâché sur l’autoroute, j’étais en train de doubler en côte et il a ralenti d’un seul coup. Le volant vibrait et j’ai senti tout de suite une perte de vitesse", confie Michel Rebérat.
Rapidement, il se rend compte qu'il n'est pas le seul dans cette situation.
J'ai commencé à chercher sur internet, et j'ai tout de suite trouvé l'histoire du motorgate.
Michel Rebérat
Ce lundi 5 juin 2023, ils sont 1 800 propriétaires à entamer un bras de fer avec le groupe Renault et déposent une plainte collective devant le tribunal correctionnel de Nanterre pour trois infractions : "tromperie, pratique commerciale trompeuse et mise en danger de la vie d'autrui".
Pour cette action collective conjointe, les participants sont représentés par Maître Christophe Lèguevaques, avocat au barreau de Paris.
Le moteur 1.2TCe
Au cœur de ces plaintes, le moteur 1.2TCe équipé entre octobre 2012 et juin 2016. En France, 133 050 véhicules seraient concernés par cet équipement, ils sont 400 000 en Europe.
"Le moteur, nous dit-on, a été conçu un peu rapidement sous la pression de Monsieur (Carlos) Ghosn et il n’a pas forcément passé tous les tests de sécurité et de qualité. Ils ont commencé à le commercialiser en 2012. Très vite, ils vont s’apercevoir que ce moteur présente un vice de fonctionnement", confie Maître Christophe Lèguevaques.
Ce défaut de fabrication entraînerait des microfuites d'huile. "Cette huile est mélangée à l'essence dans la chambre de combustion qui, en plus de brûler de l'essence, brûle l'huile. Celle-ci fabrique de la calamine (des déchets carbonés) qui finit par s'agglutiner autour des soupapes jusqu'à la casse de certaines d'entre elles, dans le moteur", explique-t-il.
Comme les nombreux témoignages le confirment, ce processus engage une perte de puissance du véhicule en seulement quelques secondes. "Ces incidents surviennent une fois que le véhicule a roulé entre 40 000 et 80 000 kilomètres".
Ce dépôt de plainte du 5 juin 2023 vise à permettre aux participants de faire sanctionner le "comportement du Groupe Renault (peine pénale demandée) et à indemniser les automobilistes des préjudices (remboursement intégral du prix du véhicule, des travaux effectués et du préjudice moral).".
Le combat des automobilistes
Avant de mener cette action collective, plusieurs démarches avaient été enclenchées auprès du constructeur.
Les premiers cas auraient été enregistrés dès 2014. "Dès les premières remontées, Renault commence à créer une commission de vérification (2015) et à la fin de l'année, ils donnent des instructions au réseau pour la mise en place des modifications lors de l'entretien, mais sans avertir les automobilistes", précise Maître Christophe Lèguevaques.
"Nous avons commencé par faire une demande à Renault qui nous a envoyés paître. Nous sommes donc passés à la phase 1". Cette phase consistait en une procédure de référé probatoire qui a permis au collectif d'obtenir une décision de justice en mars 2023 ordonnant à Renault de communiquer des documents tels que ses rapports qualité et les études menées sur les véhicules concernés à partir de 2015.
"Ils ont fait appel de cette décision et c'est ainsi que nous sommes passés à la phase 3 avec cette action collective.", confie Maître Christophe Lèguevaques.
Dès 2019, l'UFC-Que-Choisir avait déjà alerté sur le problème et notamment sur le fait que les conducteurs victimes se retrouvaient à régler la quasi-totalité du changement de moteur (près de 10 000 euros pour le Haut-Viennois).
Les conducteurs concernés ont jusqu'au 30 juin pour rejoindre cette plainte collective. Michel Rebérat l'a fait ce lundi. Nissan France, contacté, a affirmé bien vouloir analyser son cas, mais attendre pour s'exprimer sur l'ensemble de cette affaire.
Les modèles concernés
Renault
- Mégane III
- Mégane IV
- Captur
- Clio IV
- Kadjar
- Kangoo 2
- Scenic
- Grand Scenic III
Dacia
- Duster
- Duster II
- Lodgy
- Dokker
Nissan
- Juke
- Qashqai
- Pulsar