Témoignage. "Quand on repense aux débuts…" : l’Open de Limoges, le petit tournoi qui a bien grandi

Depuis ses débuts en 2006 à Couzeix (87), au plus bas niveau professionnel, jusqu’à sa 17ᵉ édition dont le tournoi final a commencé ce lundi 11 décembre au Palais des Sports de Beaublanc, l’Open de tennis féminin de Limoges a bien changé. Retour sur son histoire, avec Pascal Bioujout, son directeur.

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Si le nom de famille Biojout est à jamais indissociable de l’histoire du Limoges CSP, le prénom qu’on y accole peut désormais vous faire radicalement changer de sport, même dans le chaudron de Beaublanc. À Jean-Claude, le père, la grosse balle orange bien sûr, mais à Pascal, le fils… la petite balle jaune !

En ce premier jour du tournoi final, l’ambiance est encore feutrée, et les gradins clairsemés. Sur le court, ce n’est que le premier match, mais Pascal Biojout, le directeur du tournoi donc, est tout de même un homme très sollicité, et très occupé. D’autant plus, concède-t-il, qu’il n’est déjà plus vraiment dans cette édition, mais déjà dans la suivante. 

Pourtant, il a bien voulu (ou pu) prendre une vingtaine de minutes pour revenir sur cette incroyable histoire, celle d’un "petit" tournoi qui, au fil des ans, s’est taillé une place de choix dans le monde du tennis professionnel féminin en France. 

"C’est vrai que quand on repense aux débuts, à Couzeix…"

"On était alors un tournoi ITF, doté de 10 000 dollars. On était vraiment en deuxième division, le plus bas niveau professionnel qui soit. Cependant, et j’y tiens, il faut toujours se souvenir d’où l’on vient, et Couzeix, c’est la base, c’est l’ancrage. D’ailleurs, même depuis que l’on a déménagé à Beaublanc, la ville est toujours partenaire du tournoi.

Pourquoi avoir créé un tournoi ?

"C’est une histoire de passionnés, une histoire de rencontre et une histoire d’une volonté. Il y avait d’un côté à Couzeix un club qui fonctionnait bien, et de l’autre, nous, et notre métier, qui est d’organiser des évènements sportifs. 

Et puis il n’y avait rien, enfin, pas de tournoi pro dans la ligue du Limousin, et c’était dommage. Alors, j’en ai parlé à Dominique Malcotti [NDLR : ancien président de la Ligue du Limousin, décédé en 2018], et il m’avait répondu : oui, oui, on est partant, mais on prend zéro risque financier (rires).

Et c’est comme ça que c’est parti. Mais en vrai, on ne savait absolument pas où on allait."

Des débuts avec les moyens du bord !

"Évidemment, si on compare avec aujourd’hui… Mais ça n’aurait aucun sens. Alors oui, on peut dire qu’au début, c’était un peu du bricolage, mais quand même. On a toujours essayé de bien faire, et de s’améliorer.

En s’appuyant sur le club de Couzeix, et la Ligue, on a eu très vite un esprit convivial, familial même, mais tout en essayant de garder cet esprit, on a toujours voulu avoir une démarche professionnelle, pour proposer un vrai accueil aux joueuses et au public.

Je me souviens d’une année où on avait un peu froid sous la "bulle" de Couzeix. Alors les services de la ville ont percé un trou dans la structure de la charpente, et ont pu faire passer une gaine de chauffage d’air pulsé, pour réchauffer la tribune, pour que les gens n’aient pas trop froid. C’est une anecdote, mais elle veut dire beaucoup, et c’est avec ces petits détails qu’au bout d’un moment, les spectateurs et les joueuses, ont apprécié ce tournoi. Et c’est ce qui nous a permis de nous développer."

La montée en puissance

 "Au bout de trois ans, en 2009, on a réussi à monter en gamme, avec une dotation de 25 000 dollars, puis à 50 000 en 2011. Ce qui était bien, le tournoi avait trouvé sa place, dans le calendrier ITF.

Mais, quelque part, on avait atteint une limite. Les gens auraient pu se lasser, et même nous, pour nous donner de nouveaux objectifs. Mais après huit ans, qu’est-ce qu’on pouvait faire de plus, ou de mieux, même s’il ne faut pas grossir à tout prix ?

Et c’est là qu’a été créée une toute nouvelle catégorie de tournoi, les WTA 125. C’est un juge-arbitre français qui m’en a parlé. Il m’a dit qu’il partait à Taipei, la capitale de Taïwan, pour arbitrer lors du tout premier 125. Je ne savais pas ce que c’était, il m’explique, et là, je me suis dit que c’était exactement ce qu’il nous irait.

Mais pour cela, il fallait basculer, quitter Couzeix, et déménager au Palais des Sports de Beaublanc".

Le soutien des politiques

"Je suis allé voir le maire de Limoges de l’époque, Alain Rodet, qui a très vite été d’accord. Et j’en ai aussi bien sûr parlé à Jean-Marc Gabouty, qui était son homologue à Couzeix. C’est son ouverture d’esprit qui nous a permis ce changement, parce qu’il avait compris que ce n’était pas juste pour quitter Couzeix, mais pour continuer à raconter l’histoire. Et ça s’est fait comme ça. On l’a d’ailleurs officialisé au Couzeix Country-Club.

Et puis, entre-temps, Limoges a basculé, et c’est Émile-Roger Lombertie qui a pris la suite. Mais lui aussi, et ses équipes, avec bien sûr Sylvie Rozette aux sports (et passionnée de tennis), nous ont toujours soutenus."

2014 : le tournoi désormais chez lui, à Beaublanc

"On déménage donc de lieu, pour l’édition 2014. [NDLR : et de dates, après des débuts en septembre, puis en octobre, puis en novembre, le voici aujourd’hui en décembre], et aujourd’hui, on est le plus vieux tournoi WTA 215 du monde ! En France, on va dire qu’on vient après Roland-Garros et le tournoi de Strasbourg, qui passe cette année WTA 500.

On s’est imposé, on a trouvé notre place. Déjà, on s’est installé dans un lieu mythique, le Palais des Sports, et que le CSP, et désormais le LH aussi, nous cèdent leur place durant deux semaines, ça veut tout dire, en tout cas que le tournoi s’est intégré, dans le paysage limougeaud, limousin et même au-delà. 

Le tournoi fédère, la famille du tennis bien sûr, mais autour aussi, avec les sponsors, les partenaires, c’est très important. On le sait, désormais, on ne vient pas que pour voir du tennis, et pour se développer, c’est très important. Rendez-vous compte, on a triplé notre organisation depuis les débuts ? Et je ne vous parle même pas des budgets (estimé à près de 800 000 euros pour cette édition)."

Un tournoi dans lequel viennent les joueuses

"Déjà la date, elle est atypique, mais elle nous sert. On est, selon comment on regarde, soit le dernier tournoi de l’année, soit le premier de la saison suivante, donc ça peut attirer les joueuses.

Je vous l’ai dit, on a toujours voulu être au top sur l’accueil des joueuses, mais comme on peut toujours mieux faire, on s’améliore donc, édition après édition. Et c’est un tout petit monde, où les joueuses se parlent entre elles, et quelque part, celles qui viennent nous font de la pub. 

C’est l’une des raisons pour laquelle on a installé le Hawk-Eye, cette année (une sorte d’arbitrage vidéo adapté au tennis). Cela coûte très cher, mais c’est un vrai plus. Tous les tournois supérieurs, les 250, les 500 et bien sur les Grand Chelem en sont dotés. Alors pour se démarquer à notre niveau, il faut l’avoir. Là encore, après cette édition, les joueuses diront : ah, à Limoges, ils ont le Hawk-Eye… 

Alors c’est vrai, on n’aura jamais les dix premières mondiales, il ne faut pas rêver. Mais alors que depuis près de dix ans, le tennis féminin traverse une période difficile, en quête d’identité, avec peut-être moins de têtes d’affiche qu’avant, on arrive quand même, année après année, à proposer un joli plateau, de qualité, pour notre niveau." 

Le futur

"Déjà, on va fêter les 10 ans à Beaublanc l’an prochain, et on les veut exceptionnels. On aurait dû le faire cette année, mais comme la Covid a annulé l’édition 2020…  

Je ne peux encore rien vous dire, même si on est déjà à fond dans cette édition, mais disons que l’on va essayer de faire tout un peu mieux, et sur le plan sportif, et sur les à-côtés. Et ainsi de même les années suivantes… 

Quant à monter encore une fois en gamme, c’est inenvisageable aujourd’hui. D’une part, il y aurait la surface financière, le partenariat, le sponsoring, à quasiment doubler. Mais passe encore. Mais la vraie impossibilité, tout simplement, c’est que le cahier des charges des tournois WTA 250 impose la présence de deux courts. Et là, à Beaublanc, ou même ailleurs à Limoges, c’est impossible.

Mais qui sait, il va y avoir des travaux, sur Beaublanc, à la préparation desquels on a été intégré. Et quand il y aura les deux nouvelles salles, celle pour le LH, celle pour l’entrainement du CSP, et que le Palais des Sports aura été rénové, là…

On en reparle vers 2028 !"

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