TÉMOIGNAGES : Limoges, les enseignants des lycées professionnels inquiets pour l’avenir de leurs élèves

Ils sont professeurs en lycée professionnels et ont tous une raison d'être opposés à la réforme de l'enseignement professionnel voulue par Emmanuel Macron. Ils nous expliquent pourquoi à l'occasion de la journée de grève.

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Comment assurer une meilleure insertion des jeunes issus d’une formation en lycée professionnel ? Pour le gouvernement, la réponse passe par plus de temps en entreprise. La réforme souhaitée par le Président de la République prévoit donc l’augmentation des périodes de stage, de 22 à 33 semaines sur trois ans.

Pour les enseignants des lycées professionnels, ce projet risque, au contraire, de dévaluer encore plus la qualité d’une formation déjà très déséquilibrée. Ils étaient une centaine ce matin devant les grilles du rectorat.

50% des professeurs de lycées professionnels étaient en grève ce mardi dans l'Académie de Limoges. Ils étaient environ 200 à manifester ce mardi matin à Limoges. Nous sommes allés à la rencontre de ces enseignants désabusés pour connaître les raisons de leur colère.

Marc Pocris, Enseignant en mécanique au lycée Lavoisier de Brive

Ancien formateur chez PSA, Marc connaît bien son domaine. Blouse grise sur le dos, il enseigne depuis 10 ans au lycée Lavoisier de Brive-la-Gaillarde. Il a vu le nombre d’heures de cours diminuer au fil des réformes, au profit des stages.

Quand ils reviennent en cours, il faut qu’on les forme sur les points qu’ils n’ont pas pu voir en stage.

Marc Pocris, Enseignant en mécanique au lycée Lavoisier de Brive

Pour lui, l’augmentation du temps en entreprise ne signifie pas une meilleure connaissance du métier. « Quand on a le retour des livrets de stage, on se rend souvent compte que l’élève n’a fait que 5 activités sur les 10 qui étaient proposées. Moi, en mécanique par exemple, lors des stages mes élèves sont dépendants des véhicules qui rentrent au garage pour travailler sur certaines thématiques. Quand ils reviennent en cours, il faut qu’on les forme sur les points qu’ils n’ont pas pu voir en stage. »

Une fois revenu en classe, la remise à niveau du groupe demande beaucoup de travail d’adaptation.  Une situation que la réforme ne risque pas d’arranger. « Il va falloir s’adapter au cas par cas avec des élèves. Cela demande des outils pédagogiques dont on ne dispose pas aujourd’hui. Ça va nous demander une grosse adaptation et peut être pas pour une meilleure qualité de formation. »

Christophe Tristan Enseignant en boucherie au Lycée hôtelier Jean Monnet

Même constat pour Christophe. Il est l’un des très rares professeurs de boucherie au Lycée hôtelier Jean Monnet à Limoges. Il craint que cette réforme ne permette plus aux enseignants de dispenser aux lycéens l’ensemble des compétences liées à un métier.

Pour leur permettre de changer un jour de métier ou simplement d’évoluer dans ce métier il est important pour eux qu’ils voient toutes les compétences qui sont liées à ce métier.

Christophe Tristan, Enseignant en boucherie au lycée hôtelier Jean Monnet à Limoges

En 17 ans d’enseignement, Christophe a également pu constater de grosses disparités dans les entreprises. « Certaines entreprises jouent le jeu. Elles accompagnent, forment et évaluent les élèves. D’autres entreprises les prennent comme une main d’œuvre qui les aide pendant une période donnée. Ils les embauchent pour faire des besognes un peu secondaires comme faire le ménage, le nettoyage, éplucher les légumes… ». Des dérives que la réforme ne permettra pas de combattre selon lui.

Mathilde Treille Enseignante d’Histoire-Géographie et Français au Lycée Maryse Bastié de Limoges

Pour Mathilde, la situation est déjà très compliquée. Sur une de ces classes de première, seulement 3 h par semaine pour enseigner le Français, l’Histoire et la Géographie. Le projet de réforme prévoit de laisser la main aux chefs d’établissements pour les choix des enseignements « fondamentaux ». Un terme flou qui laisse planer un doute quant au maintien de certaines matières dans le programme.

Si on ne forme que des travailleurs pour des métiers de filières locales, le jour ou la filière locale s’écroule, qu’est-ce qu’il reste ? Il ne reste plus rien.

Mathilde Treille, Enseignante d’Histoire-Géographie et Français au Lycée Maryse Bastié de Limoges

Pourtant, Mathilde insiste, ces élèves ont les mêmes droits à l’enseignement culturel et sportif que les autres. « On ne forme pas que des travailleurs. On forme aussi des citoyens. Des gens qui auront un sens de l’éthique, qui aimeront leur pays et qui auront envie de bien faire pour leur pays. »

En attendant plus de précisions sur ces « enseignements fondamentaux », des discussions entre la ministre délégué à l'enseignement professionnel et les syndicats enseignants doivent s’ouvrir prochainement. 

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