La Coordination rurale de Haute-Vienne appelle à enfreindre la loi. Le syndicat à la tête de la chambre de l'Agriculture du département s’apprête à imprimer des affiches proposant une prime de 1 000 euros pour tout loup abattu dans le département, alors que l’espèce est protégée.
C'est une action coup de poing. La Coordination rurale de la Haute-Vienne entend exprimer son point de vue de manière radical. À travers un communiqué de presse posté sur ses réseaux sociaux, elle critique la politique de l'Office Française pour la Biodiversité (OFB), ainsi que de l'État de vouloir laisser s'installer le loup.
Le post est accompagné d'une affiche qui incite à abattre l'animal, contre une prime de 1 000 euros, afin de limiter les attaques de troupeaux. La campagne d’affichage est prévue début août dans tout le département.
⚠️🐺 Face au laisser-faire de l’OFB et de l’État dans la colonisation de notre département d’élevage par les loups, soutenu par les quelques associations de soi-disant préservation de la nature, la CR 87 dit une fois de plus : non aux loups ! ❌ pic.twitter.com/X0lXY2A8o2
— CR87 (@CR_HauteVienne) July 26, 2024
Pour le syndicat, la situation est grave au point d'enfreindre la loi. En effet, le loup est une espèce protégée : "Si on laisse le loup s'installer, il n'y aura plus d'élevage, nous, on existera plus. Donc, on est prêt à se défendre. S'il fallait tuer un loup pour protéger ce que j'ai, non, ça ne me poserait pas de problème, même si c'est hors-la-loi", assure Thomas Hégarty, président de la Coordination rurale de la Haute-Vienne.
Donc, on est prêt à se défendre.
Thomas HégartyPrésident de la Coordination rurale de la Haute-Vienne
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"Trois ans d'emprisonnement"
L’initiative est soutenue par la présidence de la chambre d’Agriculture, alors qu’elle contrevient au Code de l’environnement. Les auteurs s'exposent à trois ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende : "Je tiens appeler que l'article six du Code civil, interdit par des conventions particulières de déroger aux lois, à l'ordre public et aux bonnes mœurs et l'affiche contrevient totalement à l'ensemble des dispositions législatives de notre droit, ce qui, de la part d'un syndicat, est chose étrange", rappelle Dorian Guinard en visioconférence, maître de conférence en droit public à l'université de Grenoble-Alpes.
Ainsi, le 17 juillet 2024, le tribunal correctionnel de Grenoble a condamné un chasseur à quatre mois de prison et 61.301 euros de dommages et intérêt pour avoir abattu un aigle pygargue à queue blanche, une espèce rare.
Mais, la Coordination rurale, n'en est pas à son premier coup d'éclat. Déjà, en 2019, elle avait saccagé à coup de pelleteuses le site naturel de la Caussade (Lot-et-Garonne) après le projet d'un barrage controversé de la préfecture du département.
Tuer les loups, contre-sens scientifique
Selon, Marc Giraud, membre de l'Association pour la protection des animaux sauvages, cet appel à l’abattage du loup, est clairement une incitation au braconnage, mais est également un non-sens scientifique : " On ne peut pas stériliser la nature quand on a un problème. Moi, j'ai des merles dans mon jardin qui mangent mes cerises, je ne vais pas éliminer les merles, ce n'est pas la solution.
On sait que scientifiquement quand on abat un loup, ça désorganise la meute et les autres loups, qui ne sont pas forcément des dominants, vont se rabattre sur les animaux domestiques. Ça fait des années qu'en France, on ne comprend pas ça. Les scientifiques du monde entier le disent : tuer les loups ne sert à rien", insiste le naturaliste.
On ne peut pas stériliser la nature quand on a un problème.
Marc Giraudmembre de l'Association pour la protection des animaux sauvage
Contacté par téléphone, l’un des représentants de France Nature Environnement Limousin, enjoint les autorités à réagir face à cette campagne. L'association de défense des animaux One Voice a décidé de porter plainte.