C'est un sujet méconnu, sensible et douloureux, celui du suicide forcé. Ce processus d’emprise qui conduit certaines personnes à se donner la mort. L'avocate Yaël Mellul, spécialiste de cette question, était mercredi 22 février 2023 à l'espace Simone-Veil de Limoges, pour une conférence en présence d'avocats, de gendarmes, de soignants, d'associations et de victimes de violences conjugales.
La fuite pour survivre. Cette jeune femme a connu les insultes, le contrôle, l'isolement… Elle a cependant eu la chance de parvenir à trouver la force de s'extirper de cette relation conjugale violente : "C'était arrivé à un point ou je ne pouvais plus vivre, je ne supportais plus, je ne pouvais plus. Si j'ai eu ce déclic, c'était pour me sauver, me sauver la vie carrément, parce que ce serait peut-être à moi que j'aurais fait du mal."
200 décès chaque année en France
D'autres n'ont pas cette chance. Beaucoup en arrivent à se donner la mort. Plus de 200 femmes chaque année. C’est ce que l'on appelle le suicide forcé.
Yaël Mellul, avocate, a passé 10 ans à tenter de l’inscrire dans la loi. C’est chose faite depuis 2020, une véritable avancée pour elle, mais aussi pour toutes les victimes de violences psychologiques :
"Cela permet de voir consacrer le principe selon lequel le harcèlement moral tue, lui aussi. Que les violences psychologiques peuvent tuer. De la même manière que les violences physiques. Cela permet aussi de toucher les familles qui sont endeuillées par ce drame absolu. Cela permet de leur faire prendre conscience du fait qu'elles peuvent agir en justice," explique Yaël Mellul.
L'avocate a d'ailleurs écrit un livre à ce sujet "Mon combat contre l'emprise et le suicide forcé" paru en 2020 aux éditions Michel Lafon.
La conférence qu'elle a donnée mercredi à Limoges a réuni avocats, soignants, gendarmes et particuliers. Comme cette mère de famille qui a perdu sa fille. Adeline s’est suicidée. La culpabilité du conjoint a été reconnue, et condamnée par la justice : "Pour nous, c'était très important qu'il soit reconnu responsable. Parce que pour nous évidemment il est responsable de sa mort. C'est évident. Parce que sans ce harcèlement quotidien, elle serait sûrement encore là. Et pour les autres, cela permet peut-être de sauver d'autres personnes. "
Encore peu connu dans les affaires de violences conjugales, le suicide forcé peut être une circonstance aggravante. Les peines sont portées à 10 ans de prison et à 150 000 euros d’amende.