Première étape : ne plus avoir honte. En 2023, la France compte encore 7% de sa population en situation d'illettrisme. Des hommes et des femmes qui tentent d'en sortir par l'intermédiaire de l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) , première instance de lutte contre ce handicap social. Rencontres.
Sur le tableau, des post-it déposés avec des écritures encore fébriles. "Honte", "courage", "subir la dépendance". Ce sont celles des quelques dizaines de personnes qui se sont décidées à lutter contre ce grand handicap social qu'est l'illettrisme ce jeudi 14 septembre 2023.
"Il faut les mettre en confiance d'abord, après un peu de travail, on finit par y arriver", explique Hamama Ghezali, formatrice à l'Afpa, professeure en linguistique. L'enjeu de cette journée qui s'inscrit dans les journées nationales de lutte contre l'illettrisme, c'est bien de prouver qu'il n'y a pas d'âge pour apprendre.
(Re)découvrir les bancs de l'école
Membre fondateur de l'Agence Nationale de Lutte Contre l'Illettrisme (ANLCI), l'Afpa accueille chaque année en formation 10 000 personnes ayant des difficultés avec l'écrit.
Tout au long de l'année, des cours sont proposés à des personnes qui souffrent d'illettrisme. Pendant dix semaines, les volontaires abordent la lecture et l’écriture par le jeu, le théâtre, des mises en situation qu’ils rencontreront dans la vie réelle.
On parle d’illettrisme pour des personnes qui, après avoir été scolarisées en France, n’ont pas acquis une maîtrise suffisante de la lecture, de l’écriture, du calcul, des compétences de base, pour être autonomes dans les situations simples de la vie courante.
Par exemple, faire une liste de courses, lire une notice de médicament ou une consigne de sécurité, rédiger un chèque, utiliser un appareil, lire le carnet scolaire de son enfant.
De multiples causes
C'est le cas de Bernard Pellegrin, 64 ans, qui, après une enfance difficile, n'a pas pu suivre un cursus scolaire complet : "ma mère ne voulait pas que j'aille à l'école pour s'occuper de ma grand-mère, de mon papa malade".
Des hommes et les femmes de tous les âges et qui vivent dans différents contextes y sont confrontés ; les situations de rupture (échec scolaire, travail, santé, famille…) peuvent contribuer à cet effritement des connaissances.
Sami Azizi, réfugié afghan installé en France depuis sept ans, a passé sa scolarité sous les bombes de Kaboul, il n'a pas pu aller au bout de sa formation. Aujourd'hui, il veut faire une formation en plomberie : "apprendre une langue sans lire ou écrire, il y a toujours eu un freinage (...) Pour suivre une formation, il faut savoir écrire", explique-t-il.
En 2023, encore 2,5 millions de personnes sont touchées par l’illettrisme et c'est une situation toujours délicate à identifier. L'idée, c'est d'ouvrir les portes à ceux qui peuvent et veulent y remédier.
Quelques chiffres
L'illettrisme touche tous les domaines, tous les âges, tous les espaces de vie.
- La moitié des personnes en situation d’illettrisme a plus de 45 ans
- Plus de la moitié exerce une activité professionnelle
- 60,5 % sont des hommes
- La moitié des personnes en situation d’illettrisme vit dans des zones faiblement peuplées
- 20 % des allocataires du RSA sont en situation d’illettrisme