C'est le "Dry January", un mois pour s'interroger sur sa consommation d'alcool. L'enjeu est majeur, car l'alcool est une cause importante de maladie et de mortalité. À Limoges, l'hôpital Esquirol a créé une unité qui se déplace chez les patients pour les aider à se sevrer.
Ce jour-là, Séverine Prézinat, infirmière spécialisée en addictologie, se rend chez un patient qui a effectué une démarche de sevrage d'alcool en octobre dernier. Se déplacer à domicile est souvent plus efficace : "Ils sont dans leur cadre, donc c'est beaucoup plus facile de communiquer et d'être authentique".
Le sevrage à domicile a duré 8 jours, avec des médicaments et une présence quotidienne de soignants. Depuis, pour le patient, une nouvelle vie a commencé : "Je buvais beaucoup en cachette. Il faut mettre en place toute une organisation pour pouvoir consommer quand on a envie, c'est très compliqué. C'est même plus qu'obsessionnel, pour moi, c'était devenu impossible", avoue-t-il.
L'accompagnement se poursuit aujourd'hui. Pour éviter une rechute, l'infirmière donne des conseils : "Quand on est invité, s'asseoir plutôt à côté des gens qui ne boivent pas d'alcool ou qui ne vont pas vous servir un verre de vin à votre insu. Garder son verre de jus de fruit ou d'eau toujours plein..."
À domicile ou à l'hôpital selon les cas
L’Unité de Sevrage Ambulatoire de l’hôpital Esquirol permet de réduire le délai de prise en charge par rapport à l’hospitalisation. Elle permet aussi d’atteindre de nouveaux patients, comme l'explique Sylvain Cantaloube, le responsable de l'Unité : "On sait que beaucoup de patients n'osent pas franchir le pas de l'hôpital. Donc, il va falloir qu'on aille vers eux. C'est ce que fait cette équipe mobile, elle facilite l'accès au soin".
Mais pour des cas plus complexes, l’hospitalisation peut s'avérer nécessaire. À la veille de Noël, ce patient a fait volontairement la démarche. Il raconte : "Le 23 décembre au soir, j'avais bu comme d'habitude, comme tous les jours. J'en avais marre, j'ai appelé mes parents à 19h, je leur ai demandé de m'emmener aux urgences, car je n'arrivais plus à me séparer de l'alcool. Si je suis venu ici, c'est pour un renouveau. J'ai 40 ans, j'ai envie de faire autre chose de ma vie".
Le sevrage de l'alcool ne doit pas être pris à la légère. C'est pourquoi, dans certains cas, une surveillance accrue est nécessaire : "Ce qui est dangereux pour l'alcool, c'est que le sevrage peut entraîner des tremblements, voire parfois des crises d'épilepsie qui peuvent engager le pronostic vital du patient si un traitement médicamenteux n'est pas mis en place correctement", explique Anne-Laure Virevialle, psychiatre au CH Esquirol.
Pas de consommation d'alcool sans risque
Pilotée par le Pr Philippe Nubukpo, chef du pôle addictologie à Esquirol, l'Unité de Sevrage Ambulatoire est multiprofessionnelle : médecin, infirmière spécialisée, psychologue, assistante sociale.
L’enjeu de santé publique est majeur : entre cancers, accidents de la route ou violences familiales, les dangers directement liés à l’alcool sont nombreux. "Il faut accentuer la prévention, informer les gens sur les dangers de l'alcool, le fait qu'il n'y a pas de consommation d'alcool sans risque", martèle le Pr Nubukpo.
Selon Santé Publique France, même sans être un très gros consommateur ou alcoolodépendant, la consommation d’alcool a une influence sur le développement de nombreuses pathologies : cancers, maladies cardiovasculaires et digestives, maladies du système nerveux et troubles psychiques... L’alcool peut également être à l’origine de difficultés plus banales (fatigue, tension artérielle trop élevée, troubles du sommeil, problèmes de mémoire ou de concentration, etc.)
En France, en 2015, 8% des cancers étaient attribuables à l’alcool, soit environ 28 000 cancers. C’est la deuxième cause de cancers évitables après le tabac.
Toujours selon Santé Publique France, voici les recommandations en termes de consommation d'alcool :
- maximum 10 verres par semaine,
- maximum 2 verres par jour,
- des jours dans la semaine sans consommation.