Vives réactions de colère à la faculté de médecine de Limoges suite à l’affaire d’un étudiant accusé de viol à Tours, transféré à… Limoges

Comment un étudiant placé sous contrôle judiciaire après des accusations de viol à l’Université de Tours, a-t-il pu être transféré à Limoges ? Le comble, c’est qu’il aurait été en stage… en gynécologie. Sur le campus ce vendredi matin, c’est l’effarement, la consternation, et le temps des questions qui attendent des réponses.

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« Moi, je me sens en insécurité avec cette histoire », confie émue une étudiante rencontrée ce matin sur le campus de la faculté de médecine de Limoges et qui est quatrième année comme l’étudiant incriminé. La présence d’un étudiant de quatrième année, gardé à vue à Tours en septembre 2020, placé sous contrôle judiciaire qui a pu s’inscrire à la faculté de Limoges, la consterne. « On fait des gardes avec toutes sortes de personnes, on a des chambres de garde, on dort sur place, on fait des soirées, donc apprendre ça ne me rassure pas». Elle se fait même accusatrice tant la nouvelle l’a bouleversée : « Le doyen était forcément au courant, et ils ont mis sciemment en insécurité les étudiantes. Je l’ai su il y a trois semaines, au cours d’une conversation qui n’a rien à voir. Et je me suis demandée, mais comment est-ce possible ? Quand on voit qu’il y a des choses qui ne sont pas acceptées à la fac qui n’ont pas de poids et qui devraient l’être, et que ce genre de chose on le tolère, ça n’a aucune logique, aucune éthique », s’étrangle-t-elle.

Une autre étudiante raconte qu’elle a été au courant de l’histoire en décembre dernier, par l’intermédiaire d’autres étudiants de Tours.

« Depuis l’affaire s’était un peu calmée, la personne avait été blacklistée des associations étudiantes, parce que les présidents d’associations avaient été mis au courant. Le communiqué de l’Association nationale des étudiants en médecine de France qui dénonce une omerta dans les universités qui cherchent à étouffer cette affaire ne me surprend pas, même si je suis choquée. On n’a pas très bien compris. On n’était pas nombreux à être au courant, au tout début, c’était un peu compliqué de gérer parce qu’on ne sait pas comment réagir. On ne connaissait pas forcément les étudiants qui ont contacté la personne. Il semble que la personne en cause aurait avouée lui-même les agressions sexuelles mais pas les viols. Le fait que cet homme puisse continuer sa scolarité ici, le fait qu’il côtoie d’autres étudiantes je trouve cela inacceptable. On ne comprend pas trop ce qu’il fait là. Qu’il y ait eu un transfert de faculté alors qu’il n’a pas été jugé, on ne comprend vraiment pas ce qu’il fait là »  témoigne sous anonymat une autre étudiante.

Complaisance de l’Université de Limoges ?

« Il n’y a pas eu de complaisance, à l’égard de cet étudiant, rectifie la présidente de l’Université de Limoges, Isabelle Klocke Fontanille. Il y a une instruction qui est en cours, et dans le cadre de cette instruction, le procureur de la République (de Tours, ndlr) n’a pas suspendu la scolarisation de cet étudiant. Il y a eu des échanges entre le procureur de la république de Tours et le doyen de la faculté de médecine de Tours, pour autoriser l’étudiant à chercher une faculté qui l’accepterait. Le doyen de la faculté de Tours a contacté ses homologues, dans d’autres universités. Certaines ont refusées, le doyen de la faculté de médecine de Limoges lui, a prêté une oreille bienveillante. A la suite de cela, l’étudiant a pris contact avec lui au mois de mai 2021. Le doyen de la faculté de médecine de Limoges l’a reçu, d’abord seul, avec ses parents. Suite à quoi, il a estimé que, connaissant le dossier, et se fondant sur la présomption d’innocence, il a estimé qu’il n’était pas en capacité de rejeter la demande d’inscription. Et moi, le 24 août 2021, j’ai reçu une lettre du tribunal judiciaire de Tours notifiant le transfert du dossier de cet étudiant vers l’université de Limoges. »

Est-ce que d’un point de vue éthique, le doyen de la faculté de médecine de Limoges aurait-il dû en conscience, accepter l’inscription de cet étudiant ? A cela la présidente de l’Université de Limoges semble défendre le doyen de la faculté de médecine de Limoges. « Je ne veux pas répondre à sa place, mais il y a une instruction en cours, il y a la présomption d’innocence, il y a le fait qu’il n’y a pas eu de sanctions disciplinaires à Tours. Il y a le fait que le procureur de la république n’a pas suspendu la scolarisation, le doyen de la faculté de médecine a estimé que tant que l’instruction était en cours, cet étudiant pouvait continuer sa scolarité ».

Consternation du président de l’association nationale des étudiants en médecine de France. Et il s’interroge : « Quelles mesures ont été prises vis-à-vis des autres étudiants. Est-ce que ça a été réfléchit, est-ce que ça a été discuté ? Ça n’en a pas l’air, qu’est-ce qu’il en est vis-à-vis des patients ? A Limoges, le seul stage obligatoire, c’est un stage en médecine générale. Une personne accusée de viol ne devrait pas se retrouver dans un stage de gynécologie, c’est juste du bon sens ».

Mesures disciplinaires ?

Que compte faire l’Université de Limoges surtout avec les répercutions médiatiques sur l’Université ? « Dans la mesure où il y a une instruction en cours à Tours, répète Isabelle Klocke Fontanille, j’ai demandé à mon directeur des affaires juridiques de prendre contact avec le procureur de la république de Tours pour voir si la publicité qui a été faite sur cette affaire changeait quelque chose dans le cours de l’instruction. Sur place à Limoges, je vais aller à la rencontre des étudiants pour discuter avec eux, et voir s’il y a danger ou en tous cas, un problème de sécurité qu’elle soit physique ou morale pour nos étudiants, et je prendrai des décisions éventuellement après ».

N’est-il pas possible en attendant qu’il y ait une suspension de de l’étudiant le temps que l’instruction aille à son terme ? Gênée aux entournures la présidente de l’université de Limoges, renvoie la balle à ses collègues de Tours : « La suspension ça pouvait être le doyen de la faculté de médecine de Tours ou le président de l’Université qui auraient pu prendre cette décision. C’est leur choix. Pour Limoges, on n’est pas dans le cadre d’une demande de suspension ».

Il y a-t-il eu laxisme ?

Elle se défend néanmoins de tout laxisme, car « à la suite de la transmission du dossier du tribunal de Tours, nous avons pris des mesures de surveillance de cet étudiant », martèle la présidente. Une surveillance un peu légère puisqu’on apprend aujourd’hui que cette personne a été en stage dans le service gynécologie du CHU de Limoges. « Les mesures de surveillance portent sur la sécurité de ses camarades, en particulier, rétorque la présidente de l’Université. Mais le stage évoqué, est un stage obligatoire, qui fait partie du parcours obligatoire, des étudiants, donc il a fait ce stage en octobre et il en a fait un autre en chirurgie thoracique et il est en train d’en faire un autre en dermatologie, donc c’est un stage obligatoire. Là aussi, il y a eu un algorithme, ce stage lui a été attribué dans ce cadre-là, et le doyen a estimé qu’il pouvait suivre une scolarité normale, la même que les autres. »

Ces propos ne sont pour le moins pas du tout rassurants pour ce camarade de promotion de l’étudiant en cause, qui témoigne de manière anonyme : « On a été mis au courant de cette histoire, et globalement, ce qui s’en dégage au sein de l’université, c’est une grosse incompréhension. En 2022, on ne comprend pas comment cet enchaînement a pu être possible, comment, cet étudiant a pu atterrir dans notre université. C’est comme si on avait laissé le loup rentrer dans la bergerie. Qu’il ait pu faire un stage en plus en gynécologie, je trouve tout juste fou ».

Pour rappel, dans ce type d’affaire, si le mis en cause est poursuivi devant une cour d'assises, l’étudiant, qui est pour l’heure présumé innocent, risque une peine pouvant aller jusqu'à vingt ans de prison.

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