Au quatrième jour du procès de Claude Gorsky, poursuivi pour tentative d'assassinat, les jurés ont pu écouter l'enregistrement de l'appel que l'accusé a passé au commissariat, quelques minutes après avoir vidé son chargeur sur son voisin.
"Je sais que je vais dormir à la gendarmerie ce soir. (…) J'ai conscience de ce que j'ai fait ". Ces mots ont prononcés par Claude Gorsky, le 20 mai 2018. Ce jour-là, ce retraité, habitant d'Ychoux, appelle la gendarmerie pour se dénoncer. Il leur explique qu'il a tiré sur son voisin, Saïd El Barkaoui. " Ca fait plusieurs années qu'il m'emmerde (…) J'ai voulu arrêter de me faire emmerder, surtout par un Arabe", se justifie Gorsky.
En ce quatrième jour de procès, l'enregistrement audio de cet appel passé à la gendarmerie a été diffusé dans l'enceinte de la cour d'Assises. Claude Gorsky y apparaît extrêmement calme, serein, décline son CV et décrit la victime comme le "voyou du village".
Cinq balles dans le corps
Ce dimanche de mai 2018, avant de composer le 17, Claude Gorsky venait de tirer à cinq reprises sur Saïd El Barkaoui. Ce dernier, âgé de 38 ans, et père de six enfants est décédé quinze jours plus tard d'une rupture d'anévrisme. Les expertises n'ont pas établi de lien entre son décès et les blessures infligées.
"Un racisme décomplexé et assumé"
Depuis l'ouverture de son procès pour tentative d'assassinat, Claude Gorsky se défend de toute intention raciste. Une question au cœur du procès". Et ce, en dépit des témoignages assurant l'avoir entendu qualifier Saïd El Barkaoui, gisant sur le sol, de "sale Arabe". "Une manière de parler", se défend l'accusé. "S'il avait été Chinois, ça aurait été la même chose", avance-t-il.
Des arguments peu convaincants, pour Frédéric Dutin, l'avocat de la famille de Saïd El Barkaoui. "En réalité les éléments du dossier témoignent parfaitement que les choses sont enkystées, ancrées en lui, et on est sur l'archétype d'une personne raciste, y compris au niveau familial. Il s'agit d'un racisme décomplexé et assumé", maintient l'avocat.
Psychorigide
Les experts ont évoqué une personnalité psychorigide, incapable de se remettre en question, même lorsqu'il est confronté à des faits établis, comme le rapport des médecins légistes. Pour la sœur de la victime, Jamila El Barkaoui, l'écoute de l'enregistrement n'a fait que conforter sa perception de l'accusé. "C'est quelqu'un qui n'a aucune humanité. Il avait préparé ça depuis très longtemps, avait fait une fixette sur mon frère, il voulait qu'il sorte de l'échiquier", explique-t-elle.
Pour la première fois, Claude Gorsky a eu, très brièvement des mots pour la famille de la victime, expliquant "comprendre leur tristesse". Des mots "qui ne changent rien du tout, assure la sœur de Saïd El Barkaoui. Nous ne sommes pas dupes, on sait très bien que c'est une stratégie des avocats des parties adverses, qui lui ont conseillé de dire ça".
Je pense qu'il a peur. Il a voulu justifier son acte en salissant la mémoire de mon frère, en disant qu'il était un indic, un trafiquant de drogue, ou impliqué dans des bagarres à coup de couteau.
Il a été prouvé que c'était faux, que mon frère était un travailleur, un papa adorable, un ami super… Toutes les personnes qui ont défilé, jusqu'à ses anciens employeurs, ont pu en témoigner.
Le verdict doit être rendu ce jeudi. Claude Gorsky encourt la réclusion criminelle à perpétuité.