"Hurlements", insultes", "menaces", les agents de la commune de Pouillon alertent sur leur mal-être au travail

Dans une lettre ouverte, les employés de la mairie de Pouillon, dans les Landes, alertent sur leur "épuisement professionnel avec des risques importants de burn out, voire de suicide". Ils dénoncent "l'autoritarisme" du maire.

Les écritures en pattes de mouches ou en majuscules, tracées au marqueur ou au stylo bille, remplissent presque entièrement la feuille A4. Quarante-et-un des quarante-huit agents de la commune de Pouillon ont apposé leur nom et signature au bas de cette lettre ouverte. 

Dans cet appel au secours, ils alertent sur la méthode de gestion du maire Patrick Vilhem, et dénoncent notamment "des tentatives de déstabilisation et de division", "une pression exercée pour le départ de certains agents", ou encore "des ordres contradictoires et illégaux". 

"Tous les jours, il y a quelqu'un qui prend" 

Selon Maryline Salvy, comptable de la commune depuis trois ans, le maire entend mener à bien tous ses projets, y compris avec des méthodes "illicites""Il ne veut pas entendre que les montages, les procédures, les financements prennent du temps.(...) Mais ce temps, on ne l'a pas, regrette-t-elle. Et si on le lui dit, c'est des hurlements, et puis c'est lui qui décide, 'c'est moi qui commande', comme il dit." 

Il n'y a pas un jour sans qu'un agent se fasse insulter, agresser, menacer, c'est plus possible !

Maryline Salvy, comptable

France 3 Aquitaine

À cause de ces comportements, la comptable refuse désormais tout contact direct avec le maire, pour se "préserver". "Quand on va au travail, on se demande qui est-ce qui va prendre. Parce que tous les jours, il y a quelqu'un qui prend." 

Ce climat autoritaire a des conséquences sur les agents. "Complètement à bout", Maryline Salvy pense tout le temps à son travail."Jours, nuits, week-ends, je me dis : mais quand est-ce que ça va s'arrêter, qu'est-ce qu'on peut encore subir ?" 

Risques de burn out et de suicides

Preuve de l'urgence de la situation, le directeur général des services, pourtant soumis à une certaine réserve, a décidé d'alerter. En tant que DGS, Guillaume Boy est tiraillé entre "la fidélité aux élus" et "le soutien à ces personnels". 

Mais, face au manque de réaction de la préfecture, pourtant alertée depuis plusieurs semaines du mal-être qui règne à la mairie de Pouillon, il a décidé de s'exprimer. "Aujourd'hui, vu l'ampleur de la situation des personnels, j'ai clairement choisi de protéger les agents", assume Guillaume Boy

D'autant qu'en l'état, la municipalité est ingérable, selon lui. "C'est une commune qui a besoin d'un audit financier, d'un audit RH, d'une analyse des risques psychosociaux", explique le DGS. La santé des employés l'inquiète par-dessus tout.

Il y a des risques psychosociaux importants, de burn out, moi je pense même de suicide, en tout cas ce sont des mots qui ont été prononcés.

Guillaume Boy - Directeur général des Services de Pouillon 

France 3 Aquitaine

Le maire veut engager une médiation 

Joint par téléphone, le maire, Patrick Vilhem se dit "terriblement abattu" et reconnait "des problèmes de communication avec ses équipes". Il certifie que lire cette lettre "lui pose un problème de conscience"C’est pour cela qu’il a sollicité l’avocat de la commune pour ouvrir une médiation "sur laquelle il n’interférera pas".

Le maire assure également qu’il coupe tout contact direct avec le personnel, sauf avec son DGS. Son premier adjoint met en avant l'intervention d'une psychologue du travail et la sollicitation d'un cabinet de conseil pour améliorer la situation. 

Interdit de mairie

En attendant, les agents ont au moins l'assurance de ne pas croiser Patrick Vilhem en personne en mairie. Accusé de harcèlement et d'agressions sexuelles dans une affaire distincte de celle-ci, l'élu a interdiction de pénétrer dans le bâtiment de la mairie.

Patrick Vilhem n'a pas encore été jugé, mais il est mis en examen depuis un an. ll n'a pas le droit d'entrer en contact avec les plaignantes, certaines étant toujours employées par la commune. Selon les employés de la mairie, le mal-être qu'ils vivent date d'avant les accusations d'agression sexuelle. 

Avec cette lettre ouverte, le personnel communal espère que son cri d'alarme sera entendu. Le directeur général des services en appelle à la préfecture, "non pas pour sanctionner Monsieur le Maire" mais "pour que l'État comprenne" le mal-être du personnel. "Aujourd'hui, on refuse de voir que la commune de Pouillon va mal." 

Retrouvez le reportage de Maria Laforcade et d'Alexis Dumoulin. 

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Quarante-et-un employés de la commune dénoncent des "tentatives de déstabilisation et de division" de la part du maire. ©France télévisions

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