Dax, première agglomération thermale de France, souffre de la pandémie qui a fermé ses 16 établissements, locomotives de l'économie locale, après une année 2020 qui a vu deux tiers de curistes en moins profiter des bienfaits des boues et eaux chaudes.
Fermés depuis fin octobre après à peine quatre mois d'activité l'an passé et une perte de chiffre d'affaires moyenne de 66%, les thermes de Dax ont longtemps espéré rouvrir début février. Mais leurs espoirs ont été douchés et certains craignent de devoir attendre le printemps pour revoir des clients sous les jets térébenthinés.
Aujourd'hui, on gère au fil de l'eau, on déréserve de 15 jours en 15 jours avec des dates de report. C'est un travail dans le vide mais il faut qu'on soit prêt quand on aura le top départ du gouvernement
Réservations timides
Aux Thermes de Borda qu'il dirige, 45% de réservations seulement ont été faites pour la saison haute : selon lui, "d'habitude à cette époque, on est déjà à 80% de remplissage" pour l'automne.
Mais "on reste optimiste, beaucoup de curistes ne veulent pas annuler, ils ont besoin de venir en soin, leurs douleurs sont revenues", note Virginie Bérot, des thermes du même nom, qui compte beaucoup sur la vaccination.
Cette non visibilité est très compliquée à vivre. Nous sommes le seul secteur remboursé par l'Assurance maladie aujourd'hui fermé. Une part de nous trouve ça injuste d'autant qu'il n'y a eu aucun cluster en établissement thermal et que nos protocoles sanitaires sont très stricts
"On peut supporter une année comme ça, mais pas deux", dit-elle, appelant à des aides pour les charges fixes afin de compléter les dispositifs de prêt garanti par l'Etat ou de chômage partiel.
Effet domino sur les artisans et fournisseurs
Conséquence, "les investissements sont à l'arrêt", affirment les deux dirigeants qui ont repoussé sine die des travaux de modernisation : "derrière, ce sont des artisans et fournisseurs qui vont moins travailler aussi". Un effet domino sur l'activité économique locale d'un secteur qui compte ici 900 emplois directs.
D'ordinaire, 60.000 curistes viennent chaque année à Dax et Saint-Paul-lès-Dax et y dépensent en moyenne 34,7 euros par jour et par personne, au coeur d'un département où les établissements thermaux génèrent 80 millions de chiffre d'affaires, selon la dernière étude de l'Observatoire économique du thermalisme.
Moins d'acheteurs dans les commerces
En plus de la baisse d'activité liée au Covid, la plupart des commerçants sont touchés à des degrés divers par l'absence de visiteurs. "30% de nos clients sont d'habitude des curistes", relèvent Sabrina et Marion qui tiennent la boutique de confits et foies gras de la Maison Lafitte, qui est également touchée par la crise de la grippe aviaire.
En plus des campings et hôtels, les petits propriétaires d'appartements meublés font grise mine. "On passe notre temps à déréserver, faire des avoirs, psychologiquement et financièrement c'est difficile", confie Delphine Carrère de l'agence Immobilière Thermale qui a dû mettre ses employés au chômage partiel et se séparer de femmes de ménage intérimaires.
Plus globalement, l'arrêt des cures a représenté en 2020 "600.000 euros de taxes de séjour non perçues par l'Office de tourisme", relève le maire de Dax, Julien Dubois, qui pointe aussi "des impôts en moins qui rentrent, des taxes perdues sur les jeux de casinos, et des pertes conséquentes (1,2MEUR) pour la régie municipale qui vend aux établissements privés l'eau et les boues thermales".
Au final, "tout l'enjeu est d'être prêt quand l'activité va repartir", résume celui qui est aussi président de l'agglomération. Dans cette perspective, le Grand Dax sponsorise actuellement l'émission TV Questions pour un champion, au public âgé cible, tandis que le Conseil départemental va lancer une opération "Landissimes thermales", avec chèques cadeaux pour inciter les curistes à revenir.
→ Regardez le reportage d'Alexandre Perrin et Laurent Montiel
