Une Dacquoise de 52 ans est soupçonnée d'avoir empoisonné ses deux filles, dont l'une est décédée en 2019. Incarcérée à la maison d'arrêt de Pau, Maylis Daubon encourt une peine de trente ans de réclusion criminelle. Ses avocats ont la possibilité de faire appel de ce renvoi aux assises.
C'est une affaire hors norme, par les faits qui sont reprochés à l'accusée mais pas uniquement. C’est également un cas rare, dans lequel le syndrome de Münchhausen par procuration aurait été évoqué par au moins un expert psychiatre, au sujet de Maylis Daubon lors de l'instruction du dossier. Il s'agit d'un trouble consistant à attirer l'attention en simulant ou provoquant une pathologie sur son enfant. Reste maintenant à savoir si, aux assises, cet élément sera retenu.
"On n'a pas encore levé appel de cette décision, et c'est loin d'être exclu, réagit Me Gérard Danglade, avocat de Maylis Daubon. "Depuis le début, on a fait de madame Daubon une coupable présumée (...)", déplore-t-il.
Mais quel serait le mobile de cette femme qui adorait ses filles ? J'ai la conviction qu'il n'existe aucun mobile.
Gérard DangladeAvocat de Maylis Daubon
Soupçons d'empoisonnement sur ses deux filles
La juge d'instruction a en effet ordonné le renvoi de cette affaire aux assises de Mont-de-Marsan. L'instruction, qui a duré quatre ans, est donc close.
Maylis Daubon est soupçonnée d'avoir empoisonné ses deux filles, entraînant la mort de l'une des deux, la jeune Enea, âgé de 18 ans à l'époque. Selon les expertises, elle aurait succombé en 2019 à une surdose de médicaments, notamment des bêta bloquants. L'enquête avait révélé que la mère de famille avait, en deux ans, conduit à 32 reprises chez des médecins.
Sa mère n'a été mise en examen que deux ans après sa mort, puis placée en détention provisoire. Et c'est dans cet intervalle qu'elle est soupçonnée d'avoir empoisonné son autre fille avec des bêta bloquants, mais aussi des doses importantes d'anxiolytiques et d'antidépresseurs. Maylis Daubon est aussi renvoyée devant les assises pour instigation à l'assassinat, puisqu'elle est également soupçonnée d'avoir tenté, depuis la prison, de s'en prendre au père de ses filles.
"Comment les médicaments ont-ils été administrés ?"
Maylis Daubon a toujours nié les faits. Et pour son avocat, Me Gérard Danglade, rien ne prouve que sa cliente soit atteinte de maladie mentale. Il demande au juge d'instruction et au procureur de la République "de dire comment s'est passée l'administration des produits toxiques".
"On ne sait pas comment, et par quel procédé, ils ont été administrés (...), martèle le conseil. Ce qui est reproché aujourd'hui à madame Daubon, c'est d'avoir mis sa fille en situation de prendre ces produits là. Peut-on renvoyer devant la cour d'assises, quelqu'un que l'on suspecte d'avoir mis en œuvre une sorte de stratagème, qui aurait entraîné l'absorption de médicaments par une jeune fille à son insu, alors qu'on ne sait pas qui a pu lui mettre à la bouche ?"
On ne nous a jamais dit "c'est untel qui aurait découpé des comprimés", pas du tout.
Me Gérard Danglade
"C'est une souffrance qui perdure"
Yannick Reverdy, le père d'Enea, a longtemps dénoncé l'emprise que son ex-femme exerçait sur leurs deux filles. Il a accueilli cette nouvelle du renvoi aux assises avec beaucoup d'ambivalence. "On a un client qui, depuis des années, a un petit peu hurlé, crié la douleur, crié la souffrance qui était la sienne et celle de sa fille", explique Me Thibault Laforcade, son avocat. "Il a alerté notamment en disant que le pire pouvait potentiellement arriver. Et c'est la première fois qu'il a le sentiment d'être pleinement entendu puisqu'il y a un juge d'instruction qui a considéré qu'il y avait suffisamment d'éléments concordants. Donc c'est un soulagement, mais il faut bien entendre aussi que c'est une souffrance qui perdure.
C'est la première fois qu'on lui dit : voilà ce qui est potentiellement arrivé à votre fille aînée et également à votre fille cadette.
Me Thibault LaforcadeAvocat de Yannick Reverdy
Projet d'assassinat à l'encontre de son ex-mari
La juge d'instruction a également décidé de renvoyer Maylis Daubon devant les assises pour instigation à l'assassinat à l'encontre de son ex-mari. "C'est un nouveau soulagement", analyse son avocat. "Il ne faut pas sous-estimer l'impact que cela a eu sur lui et sa famille. Quand vous apprenez que la personne qui est depuis deux ans en détention provisoire (...) a peut-être aussi imaginé ce type d'événement et bien vous le prenez au sérieux. D'une certaine manière, vous prenez peur. Et c’est le cas pour votre entourage proche aussi".
Le procureur et la défense ont dix jours pour faire appel.