C'est une satisfaction pour les associations écologistes qui dénoncent les excès de l'irrigation des terres agricoles. La justice s'est prononcée sur le bassin de l'Adour trop sollicité au vue des changements climatiques et des déficits en eau à venir. Les agriculteurs landais sont déçus.
Quand la gestion de l'eau et les effets des changements climatiques s'invitent au tribunal. C'est à Pau, au tribunal administratif, que ce sujet saillant a été pour l'heure tranché. Il concerne les prélèvements d'eau effectués pour irriguer les cultures. Les magistrats viennent d'annuler l’autorisation pluriannuelle délivrée au syndicat Irrigadour pour prélever les eaux du bassin de l’Adour amont de 2017 à 2022.
En clair, il faut que les irrigants revoient leur copie à la baisse pour les années à venir, après 2022.
Ce sont les associations France Nature Environnement Midi-Pyrénées, FNE 65, les Amis de la Terre 32 et la SEPANSO Landes qui contestaient les autorisations données à ce syndicat, après instruction des demandes initiales délivrées en 2016 et qui devaient prendre fin le 31 mai 2022.
Tous les organismes consultés (Office français de la biodiversité et mission régionale de l’autorité environnementale) ainsi que les commissions d’enquêtes publiques, avaient souligné les graves insuffisances des dossiers déposés.
Les associations ont pointé du doigt des inexactitudes : les incidences des prélèvements étaient mal évaluées, les volumes sollicités n’étaient pas justifiés par rapport aux besoins des irrigants, les autorisations devaient rester limitées dans le temps et ainsi permettre aux organismes uniques de déposer des dossiers complets d’ici 2020/21.
Outre ces critiques, ni l’Etat ni le syndicat IRRIGADOUR n’ont pris en compte les effets du changement climatique sur les milieux aquatiques. Les effets du changement climatique continuent d’être ignorés dans la gestion quantitative de l’eau
La déception des agriculteurs irrigants et des incertitudes pour l'avenir
Le prélèvement de l'eau concerne 4 000 irrigants dans le secteur administré par Irrigadour. Les cultures sont le maïs, les haricots, les carottes entre autres. " A partir de 2022, il faudra demander de nouvelles autorisations de prélèvement à usage d'irrigation dont on ne connait pas aujourd'hui le contenu. " explique un représentant des agriculteurs usagers. Ce qui remet en cause pour certains les investissements en cours et les réalisations.
La justice sensible aux enjeux de l'eau
Certaines activités de l'agriculture sont gourmandes en eau on le sait. Un arrosage qui n'est pas sans conséquence comme le souligne Jean Olivier, le président de FNE Midi-Pyrénées : "Toujours plus d’eau pour au final en gaspiller et en polluer toujours plus. Voilà ce que voulait IRRIGADOUR, suivi comme toujours fidèlement par les services de l’Etat. Cette autorisation était totalement irresponsable par rapport à la ressource existante et précieuse, notamment en été. Aujourd’hui, le Tribunal administratif a sanctionné cette fuite en avant désastreuse. Soyons clair, ces ressources en eau sont d’un intérêt public majeur pour la totalité des habitants (1.500.000) des départements concernés, il est inimaginable que 5000 irrigants veuillent s’en arroger une telle quantité (280 millions de m³) pour une agriculture intensive toujours plus impactante sur les milieux et les espèces…"
A l'heure où les prévisions pour les années à venir laissent apparaître une baisse des précipitations en été, les débits des cours d'eau s'annoncent par conséquent aussi à la baisse. D'où une fragilisation de la ressource. Le tribunal administratif de Pau a retenu cette hypothèse d'accroissement du déficit d'eau. Mais au regard des enjeux économiques liés à l'annulation de cet arrêté, il a repoussé à 2022 la révision de la copie.