La situation est catastrophique selon les viticulteurs. Les températures de ces deux dernières nuits ont dépassé les moins trois degrés dans les Landes et le Gers. 70% du vignoble ont été détruits par le gel. Du jamais vu depuis trente ans.
« Ca m’a fait un choc, c’est la première fois que je vois les feuilles passer du vert au gris en à peine une nuit », se désole Stéphane de Luze.
Installé à Mauvezin d’Armagnac, ce propriétaire viticole ne peut que déplorer les dégâts sur ses neuf hectares et demi de vignes. Des feuilles et des bourgeons « brûlés » par le gel. 80% de son domaine sont aujourd’hui détruits.
« A quel degré les bourgeons ont-ils été gelés ? Certains pourront-ils survivre ? Ce sont des questions auxquelles je n’ai pas de réponse dans l’immédiat. Mais selon un expert, c’est quasiment foutu » regrette Stéphane de Luze.
Sur une récolte où nous devions faire 800 hectolitres, nous allons en obtenir 20 environ. Avec si peu, ça ne vaut même pas la peine de faire venir l’alambic pour distiller.
Il n'a pas vu un tel phénomène climatique à cette époque de l’année depuis plus de trente ans.
Malgré les dégâts constatés dans ses vignes, Stéphane de Luze compte sur son important stock de bouteilles d’Armagnac pour limiter les pertes économiques. « C’est moins dramatique qu’un vigneron qui produit du vin de table. En Armagnac, on fait du vin que l’on distille et fait vieillir dix à quinze ans. Ce n’est pas vraiment l’aspect financier qui m’inquiète. Par contre, je suis désolé quand je vois tout le travail d’une année dans la vigne foutu en l’air ! Nous apportons beaucoup de soin à lutter contre les maladies auxquelles certains cépages sont sensibles. C’est rageant ! »
Le Bas-Armagnac touché à presque 100%
Comme Stéphane de Luze, la grande majorité des viticulteurs se sont réveillés groggy mercredi 7 avril et ce jeudi matin. Olivier Goujon déclare sans équivoque : « C’est grave, c’est compliqué ! » Le directeur du Bureau National Interprofessionnel de l’Armagnac (B.N.I.A.) détaille les dégâts. Dans le Bas-Armagnac, la situation est dramatique, presque toutes les parcelles de vignes sont ravagées. « Certains cépages comme le Baco et la Folle blanche sont précoces, ils n’ont pas résisté ».
Aujourd’hui, 70% du domaine de l’Armagnac ont été détruits par ces gelées printanières tant redoutées des viticulteurs. La production d’alcool pur qui s’élève normalement à 18000 hectolitres devrait cette année s’effondrer à 7000 hectolitres. « Nous réfléchissons aujourd’hui à produire davantage sur les terres qui n’ont pas été touchées afin d’aider les viticulteurs les plus sinistrés » souligne Olivier Goujon.
Après une année noire liée à la crise sanitaire qui a fait chuter les exportations, les professionnels de l’Armagnac subissent maintenant de plein fouet les assauts du froid. Le directeur du B.N.I.A., comme tous les viticulteurs de l’Armagnac, redoute le début de semaine prochaine. « Après un week-end pluvieux, de nouvelles gelées sont attendues dans la nuit de lundi à mardi prochain » soupire Olivier Gougon. Rien de bon pour la vigne et ce qu'il en reste.