L'annonce de la mort de Michel Fourniret a été un choc pour les proches de Marion Wagon,. La piste de ce tueur en série était évoquée pour expliquer la disparition de la fillette en 1996, à Agen. Pourtant, en s'éteignant, le criminel n'a pas emporté avec lui tout espoir de découvrir la vérité.
Il est parti, emportant avec lui ses sombres secrets. Ce lundi 10 mai 2021, Michel Fourniret est mort à l'hôpital. Ce tueur en série, reconnu coupable de la mort de huit femmes ou jeunes filles, est soupçonné d'avoir violé et tué de nombreuses autres victimes.
Son nom a notamment été évoqué dans l'affaire de la disparition de Marion Wagon. Le 14 novembre 1996, à l'heure du déjeuner, la petite fille, âgée de 10 ans, avait disparu à la sortie de l'école, à Agen en Lot-et-Garonne. Elle n'a jamais été retrouvée.
"Une porte qui se ferme"
Depuis vingt-cinq ans, la famille de Marion, épaulée par La Mouette, association qui lutte pour la protection de l'enfance, cherche à connaître la vérité. Tous ont été ébranlés par l'annonce du décès du criminel. "Ça a été un choc. On a toujours gardé espoir, et là, on se retrouve devant une évidence. C'est une porte qui se ferme", commente Annie Gourgue, présidente de l'association agenaise La Mouette.
Les secrets de Monique Olivier
Michel Fourniret avait commencé à livrer des aveux, reconnaissant notamment avoir enlevé et tué une autre enfant, Estelle Mouzin, disparue en 2003. Mais jamais il ne se sera exprimé sur la disparition de Marion Wagon, laissant les proches de l'enfant dans le doute le plus total.
Monique Olivier, qui fut la femme et la complice de nombreux crimes de Michel Fourniret, a longtemps couvert son ex-époux, avant de l'accuser de l'enlèvement, du viol et du meurtre d'Estelle Mouzin. "Notre seul espoir, désormais, repose sur son ex-épouse, Peut-être qu'elle voudra désormais libérer sa conscience", espère Annie Gourgue.
Cela fait vingt-cinq ans qu'on ne sait rien, et vingt-cinq ans qu'on espère chaque jour. C'est très important pour les parents de savoir, et de retrouver le corps, afin de le porter dans sa dernière demeure.
Un matelas pourrait parler
Le doute sur l'implication de Fourniret dans la disparition de Marion Wagon, un temps levé, est revenu après un nouvel examen d'un matelas, saisi en 2003 chez la sœur du tueur en série, alors décédée.
Ces prélèvements, effectués en 2020, ont révélé la présence d'une dizaine d'ADN, dont celui d'Estelle Mouzin. De nouvelles analyses sont en cours, afin de voir si les autres traces détectées peuvent correspondre avec l'ADN de Marion, ou celui d'autres personnes portées disparues. Elles pourraient notamment permettre de découvrir de nouvelles victimes du tueur, sur la période 1990-2000.
Retrouver l'ADN de Marion
Retenu aux assises ce mardi 11 mai, Maître Georges Catala, avocat des parents de Marion Wagon, n'a pu être joint ce jour. Dans une interview accordée à nos confrères de la Dépêche du midi hier lundi, il rappelle que la piste Fourniret "était suffisamment crédible pour qu'on se plonge dedans, au moins pour tenter de refermer une porte".
Sur la question de l'analyse de l'ADN, il déplore notamment que les enquêteurs, n'ont, pendant longtemps, disposé que de l'ADN des parents de Marion. L'ADN de la fillette, recueilli à l'époque, a disparu. "On sait combien cela était insuffisant pour croiser les éléments, quand on dispose d'un ADN incomplet", rajoute l'avocat.
Une tentative de récupérer de l'ADN sur des affaires appartenant à l'enfant a donc été effectuée, vingt-cinq ans après sa disparition, dans le but de le croiser avec celui retrouvé dans la planque du tueur en série.
Ces éléments seront-ils suffisants? Le laboratoire privé d'hématologie médico-légale de Bordeaux, en charge des analyses, est spécialisé dans l'analyse des éléments de preuve dans les affaires criminelles anciennes. Soumis au secret de l'instruction, son directeur, le professeur Christian Doutremepuich se refuse à communiquer sur l'affaire. Mais il assure disposer d'éléments suffisants pour faire son travail. "Les analyses sont en cours, et c'est quelque chose que nous savons faire", précise-t-il.
Incertitudes
Près de 1 000 kilomètres séparent la ville d'Agen de la maison de Ville-sur-Lume, dans les Ardennes, où le couple détenait ses victimes. Mais Michel Fourniret pouvait aussi tuer ailleurs. En 2008, il était condamné pour l'enlèvement et le meurtre de Natacha Danais. L'adolescente de 13 ans avait été enlevée sur un parking de Rezé en Loire-Atlantique. Son corps a été découvert trois jours plus tard, sur une plage vendéenne.
Si elles révèlent la présence de l'ADN de Marion Wagon, les analyses des cellules prélevées sur le matelas permettront d'établir avec certitude que Fourniret est à l'origine de sa disparition. Mais dans le cas contraire, la piste ne peut non plus être formellement écartée. En l'absence d'aveux, l'incertitude et le doute pourraient malheureusement, encore perdurer.