"J'ai enfin pu parler" : la justice restaurative, un temps d'échange unique entre victimes et auteurs d'infractions

Originaire du Canada et effective en France depuis dix ans, la justice restaurative est en plein essor. Elle offre un temps d'échange humain et authentique entre victimes et auteurs d'infractions. Du 7 au 11 novembre, elle est au cœur du festival de la fondation Michel Serres-Institut de France, à Agen.

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"L'objectif, ce n'est pas le pardon. C'est la rencontre". En ces termes, Paul Mbanzoulou, directeur de recherches à l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire (Enap), définit la philosophie de la justice restaurative. Celle-ci permet d'offrir un temps d'échange unique entre des victimes et des auteurs d'infractions. En plein développement, cette vision de la justice axée sur la paix est présentée lors du festival de la fondation Michel Serres, qui se tient du 7 au 11 novembre à Agen, dans le Lot-et-Garonne.

Responsabiliser les auteurs, réparer les victimes

Originaire du Canada, la justice restaurative a été importée en France il y a dix ans, dans une loi du 15 août 2014. Elle répond à un constat : "Durant les procès, on observe un formatage de la parole, relève Paul Mbanzoulou. D'un côté, l'auteur des faits se défend. De l'autre, la victime demande réparation." Pour le pénaliste diplômé de psychologie, "cela bloque les victimes dans leur quête d'apaisement et les auteurs des faits sont freinés dans leur prise de conscience."

Concrètement, ces espaces d'échanges débutent par des entretiens individuels et confidentiels, menés par l'un des 4 730 professionnels formés. Les victimes ne rencontrent pas les auteurs directs de leurs préjudices, mais des auteurs de faits similaires. Ces échanges s'opèrent sur cinq séances de trois heures, à l'issue desquelles un bilan est écrit. "Les individus font alors le point sur leurs rencontres, sur ce qu'il reste à travailler et sur les conseils qu'elles peuvent apporter", précise Paul Mbanzoulou. 

"J'ai enfin pu parler"

À l'issue de ces séances de dialogue, "les victimes arrivent souvent à tourner la page, remarque Paul Mbanzoulou. Soit, elles ont obtenu les réponses à leurs questions, soit elles ont compris qu'il n'y en avait pas. Et cet argument leur suffit." Le pénaliste salue "l'humanité" qui se dégage dans ces échanges et "l'authenticité" des individus. "C’est un mécanisme de paix envers les autres, conclut-il. Mais aussi envers soi." Très souvent, les victimes comme les auteurs d'infraction ressortent de ces temps d'échange en disant "j'ai enfin pu parler", affirme le pénaliste.

La justice restaurative, qui a une place importante dans le processus de paix, est mise en avant au festival de la fondation Michel Serres-Institut de France, qui se tient du 7 au 11 novembre à Agen. "Durant ce festival, on donne la parole à des fabricants de paix, explique Marie Serres, de la famille du philosophe décédé en 2019. C’est-à-dire à des philosophes, des artistes, des sociologues, des sportifs..."

Pour sa quatrième édition, le festival a choisi de se pencher sur la question de "la paix dans l'intime, la cité et la terre". À cette occasion, elle a invité l'Ecole nationale d'administration publique (Enap) a participer à un colloque sur la justice restaurative. Marie Serres en profite pour saluer le travail de l'institution : "la paix est à la base de cette justice. Elle est aussi utile pour la victime que pour l'auteur des faits. C'est un dialogue vertueux."

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