Parents et enseignants face au casse-tête du protocole sanitaire dans les écoles

Jour 1 pour l’application du plan sanitaire de niveau 3 dans les établissements scolaires. Les plus petits doivent à présent respecter gestes barrières et distanciation sociale jusque dans la cour. Des mesures difficilement applicables, qui contraignent parents et enseignants à s’adapter en permanence.

Comment organiser une simple sortie scolaire par temps de covid ? « On ne peut pas, on ne fait plus », répond Jean-Pierre Fréchic, président de la Fédération des Conseils de Parents d’Élèves du Lot-et-Garonne (FCPE 47). En théorie, l’infirmière doit vérifier les carnets de santé de tous les enfants, puis dire qui peut sortir ou non. Face à la lourdeur du protocole, la plupart des excursions organisées dans les écoles primaires sont tout simplement annulées.

On ne fait même plus le sapin de noël.

J.P. Fréchic, président de la FCPE 47

À compter d’aujourd’hui, les activités sportives avec contact sont restreintes. Le brassage des élèves interdit à la cantine. Quant au port du masque, il s’impose à l’intérieur comme à l'extérieur pour le personnel et les enfants à partir du CP. Un protocole appliqué « sans difficulté particulière » dans toutes les écoles d’après l'Académie de Bordeaux.  

Les sports de faible intensité sont pratiqués à l’intérieur et sous les masques : « Cela concerne la danse, les arts du cirque ou encore la gymnastique à condition qu'il n'y ai pas de contact. Mais aussi les sports individuels comme le tennis de table », précise l’Académie.

Pour le reste, les injonctions semblent impossibles à faire respecter selon Jean-Pierre Fréchic : « Essayez de faire porter un masque toute la journée à 20 gosses, leur expliquer qu’ils ne doivent pas se rapprocher les uns des autres en jouant, ou respecter une distance à la cantine. Comment voulez-vous ? Les enfants qui aimaient aller à l’école ne veulent plus y aller, ils y sont brimés toute la journée. On ne fait même plus le sapin de Noël ! », constate-t-il, lui-même père de famille.

Les mesures sanitaires ne sont pas sans conséquence sur la santé mentale des jeunes élèves : « Certains ont démarré leur scolarité en même temps que le covid. Ils n’ont jamais fait une sortie ou un gouter d’anniversaire, rappelle Sandrine Tastayre, co-secrétaire départementale du SNUipp FSU 47, il faut se poser la question du monde dans lequel on souhaite les voir grandir. »

Jusqu’à présent, le protocole permettait la poursuite des activités : « Vendredi dernier on a organisé un petit marché de noël à l’école maternelle. Les enfants ont chanté devant les parents et grands-parents. Tout le monde masqué bien sûr, avec le pass sanitaire vérifié à l’entrée », témoigne la mère de Valentine, 5 ans. D’après cette professeure de lycée, la problématique du protocole concerne surtout les plus grands : « On bataille pour que les lycéens portent le masque en cours, ils ont tendance à le baisser. Puis sur le parvis ils se font la bise, échangent des cigarettes, y’a des accolades … difficile de leur faire respecter les gestes barrières », regrette-t-elle. Si l’école maternelle de Valentine est pour l’instant épargnée, huit cas positifs ont été déclarés dans la classe de 6e de sa grande sœur.

Les enfants testés quasi-quotidiennement

Le contexte sanitaire du département est critique. Avec un taux d’incidence dépassant les 660 pour 100.000 habitants, les enfants testés positif ne sont pas rares, et pas toujours signalés : « Les cas positifs sont annoncés au compte-goutte, explique Jean-Pierre Fréchic, il faut attendre que l’élève cas contact rentre chez lui faire un test, et lorsque le test s’avère positif, on ne dit pas toujours. Lorsqu’il y a trop de cas ils doivent fermer les classes ».

Le protocole impose la fermeture de la classe durant une semaine à partir de 3 cas positifs.   Lorsqu’un élève est contaminé, tous ses camarades doivent effectuer un test. Résultat, les parents sont amenés à tester leurs enfants presque tous les jours, ce qui n’est pas toujours évident : « Il y a beaucoup de familles monoparentales sur le département du Lot-et-Garonne, et elles sont débordées, épuisées par ces deux dernières années. D’autant que si le petit est testé positif, il faut rester à la maison et c’est une journée de travail en moins. Les gens ont autre chose à penser ! », souligne Jean-Pierre Fréchic.  

À chaque cas positif signalé, le programme des cours tout comme celui des parents est perturbé : « Certains gamins sont en classe, et on prévient les parents au pied levé pour venir les chercher. D’autres élèves partent faire des tests en pleine journée. Tout est chamboulé », ajoute-t-il.

Enseignants et parents livrés à eux-mêmes

Pour faire respecter les nouvelles règles, l’Académie s’appuie sur un personnel parfois démuni : « On demande aux enseignants de réussir à créer du collectif en dépit de la lourdeur du protocole qu’on nous impose, cela demande une énergie folle ! On n’a même plus de moments conviviaux pour échanger avec les parents », témoigne Sandrine Tastayre, également institutrice en école maternelle.  

Face à cette situation, la solidarité entre parents et corps enseignant est de mise : « Avec les professeurs, les parents sont dans la compréhension. Ils savent qu’on n’est pas aidé et que la situation est difficile. », pointe Jean-Pierre Fréchic. Il insiste sur l’état d’épuisement physique et moral des enseignants et auxiliaires de vie scolaire, d’autant que ces derniers sont rares :  « On nous avait promis 200 auxiliaires de vie scolaire supplémentaires pour aider les élèves en situation de handicap dans le département. Nous les attendons toujours, l’Académie dit qu’il n’y a pas de candidat. Et les profs qui partent sont rarement remplacés, mais ça date d’avant le covid », complète-t-il. Mélanger les classes d’un même niveau lorsqu’un professeur s’absente est interdit par le nouveau protocole.

Un personnel trop peu nombreux, et des moyens rudimentaires

L’apprentissage à distance imposé pendant 10 jours aux élèves contaminés n’est possible que lorsque le matériel adéquat est mis à disposition. Tel n’est pas le cas dans toute la région, comme le souligne le président du FCPE : « Pour palier l’effet covid dans les écoles, il aurait fallu développer suffisamment le numérique. Mais c’est loin d’être le cas, se désole-t-il, avec un peu de chance j’aurais peut-être la fibre avant la fin de l’année dans mon département, elle devait arriver l’an dernier avant noël … ».  Dans ce type de situation, l’académie de Bordeaux explique que la continuité des cours est assurée par courrier, ou par transmission de documents papiers aux parents d'élèves.

Pour la secrétaire du SNUipp FSU 47, la situation est intenable : « On comprend le coté urgence mais quand l’urgence s’installe et que la pression devient un système de management qui perdure, c’est notre rôle de dire que ça va pas tenir », conclut-elle.  

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