Les petites salles de spectacle espèrent un déconfinement rapide

La crise du Covid19 a stoppé brutalement toutes les représentations culturelles et artistiques. Les petites salles de théâtre et de concerts, du Pays basque espèrent rallumer les lumières en septembre. Mais rien n'est certain

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"Le petit bijou", à Biarritz, porte bien son nom. Un écrin de culture populaire, avec 135 places et une scène entièrement dédiée à la grande tradition du café-théâtre. L'établissement a ouvert ses portes en septembre 2019 mais le 14 mars, le rideau est tombé sur toutes les représentations, en raison du confinement.

"Nous n'avons travaillé finalement, que six mois" déplore Mehdi El Glaoui, comédien (ndlr: rendu célèbre par la série télé "Belle et Sébastien") et co-fondateur du lieu, avec Virginie Stevenoot, également artiste, et grand nom du théâtre français.

"Le 14 mars, à 20heures, les acteurs étaient sur scène. A minuit, nous avons tout éteint, et depuis, c'est catastrophique".


Plus de spectacles, cela veut dire, plus de rentrées financières. " Nous n'avons aucune recette" explique Mehdi El Galoui. "La trésorerie est au plus bas. Nous proposons aux spectateurs qui avaient acheté leurs billets, de reporter à une date inconnue, les représentations. Avec des places entre 14 et 20 Euros, certains jouent le jeu, et nous soutiennent. Mais d'autres veulent être remboursés. Il faut ajouter que nous ne percevons, aucune subvention".

"Ce qui est compliqué, d'autre part, c'est de gérer notre future programmation. Nous espérons pouvoir reprendre en septembre, mais rien n'est certain. Et puis, réserver des tournées, c'est un casse-tête. Cela se cale, en principe, un an à l'avance. Actuellement, les comédiens sont souvent déjà pris pour des dates, à l'automne, par exemple. Nous avons envisagé des séances pour février-mars 2021. C'est une situation difficile à gérer".

La voix de la Province

"Le petit bijou" programme depuis son lancement un spectacle "adultes", et un spectacle "enfants", par semaine.
Mehdi El Glaoui admet que "tout le monde est dans le même bateau" et que "la situation est dramatique pour tous les artistes".
Mais cette crise du Covid19 a révélé des problèmes spécifiques pour les petites structures comme son café-théâtre.

"Nous avons réalisé, que nous étions très mal organisés, en province" raconte-t-il. "Les autorités culturelles ne semblaient s'intéresser qu'aux théâtres parisiens. Alors, avec deux cents autres établissements, nous avons créé il y a une semaine l'Association des théâtres privés en région. Nous ne voulons pas être oubliés et on souhaite que le Ministre de la Culture entende notre voix".

Première demande via l'association: l'annulation des charges de fonctionnement des petits théâtres, durant le confinement. Les loyers sont déjà suspendus.  Au "Petit bijou", le régisseur est en chômage partiel. Le CDI de la serveuse du bar a été rompu.

Reste, enfin, à imaginer, une réouverture. "Mais sous quelles conditions ?" s'interroge Mehdi El Glaoui. "Je ne vois pas comment les comédiens pourraient jouer avec des masques, par exemple. Et pour le public, habituellement serré sur les bancs, comme le veut la tradition du café-théâtre, allons-nous l'installer avec des distances de 1 mètre ?".


Solidarité essentielle et urgente

La situation est également critique pour les artistes. Deux pétitions ont été lancées, nationalement, auprès d'Emmanuel Macron, de la Ministre du Travail, et du Ministre de la Culture.  Elles demandent "une prolongation de douze mois des droits des intermittents, pour répondre à l'impossibilité de travailler durant le confinement, et donc d'ouvrir, ou de rouvrir des droits à l'assurance chômage".

Au Pays basque, ces pétitions ont été relayées par l'association Ezkandrai, qui organise le festival multi-culturel "Les éthiopiques" (ndlr : la 12ème édition, a été annulée fin mars, à Bayonne), et  Errobiko Festibala (festival musical qui doit se tenir, en principe, du 18 au 21 juillet à Itxassou).
Le directeur artistique de ces événements, Beñat Achiary défend "une solidarité essentielle et urgente autour des intermittents du spectacle, durement impactés par la crise du coronavirus". Il ajoute :" les artistes sont un ferment indispensable à notre vie en société".


Equipe solide et solidaire

Des artistes, que défend également "La luna negra", salle de spectacle de 100 places, qui existe depuis 25 ans à Bayonne.
Son directeur artistique, Luc Pelletier a reporté la cinquantaine de représentations, prévue jusqu'à mi-juin.
Il a fourni des attestations aux musiciens, comédiens etc... qui devaient se produire sur scène.
Mais lui aussi s'interroge : "quand pourrons-nous réellement redémarrer une programmation? En septembre ? Nous avons déjà des spectacles prévus jusqu'en janvier 2021; il est compliqué d'y intercaler de nouvelles dates".

La structure est fermée. L'équipe de cinq salariés est en chômage partiel. "La luna negra" est une association. Des adhérents bénévoles ont pris en charge toute la partie administrative, notamment pour monter des dossiers de demande d'aides au fonctionnement.

Selon Luc Pelletier "le moral est bon mais économiquement c'est catastrophique. Le théâtre, fermé, il n'y a pas de rentrées financières, faute de billetterie. Nous demandons des aides; c'est complexe, mais nous avons la chance que cela existe en France".

Il ajoute que l'équipe, "solide et solidaire", est inquiète pour les artistes, mais aussi les mécènes, et les partenaires de l'établissement.

"Quinze restaurateurs travaillent habituellement avec nous, pour accueillir les groupes, ou troupes en tournée. La situation est dramatique pour eux aussi".


"La luna negra" garde le contact avec son public fidèle, via notamment sa page Facebook, sur laquelle, l'association publie régulièrement des nouvelles.

Ouverture en septembre ?

Côté musique, l'Atabal, de Biarritz, est aussi dans la tourmente.  Cette Scène de musiques actuelles (SMAC), est composée d'une salle de concert de 700 places, de trois studios de répétition, et d'une école de musique. Etablissement public, elle est subventionnée à 30%  "mais les 70% restants, nous les générons avec notre billetterie, les recettes du bar, des studios etc." précise François Maton, le directeur. Actuellement, la priorité est de maintenir les salaires de l'équipe, qui est en partie, au chômage partiel.

Depuis mi-mars, toute la structure est fermée. Les dates de concerts ont d'abord été reportées à juin et juillet. Mais désormais, l'Atabal mise sur une ouverture en septembre. Sans aucune certitude.
"Comment envisager de redémarrer les concerts, les répétitions en studios, les cours de musique; et dans quelles conditions sanitaires ?" se demande François Maton.

"Le public voudra-t-il revenir dans des salles fermées ? Ou préférera-t-il des événements en extérieur ?".


Pour les concerts annulés, comme Lysistrata, Inma de Yard, ou David Cairol, par exemple, les billets ont été remboursés. 
D'autres artistes ont pu être reprogrammés comme Salut c'est cool, Kompromat ou encore Chinese man. Mais, concède François Maton "c'est cinq mois de perdus, au moment le plus important de l'année. Nous déplaçons des dates à l'automne, mais ce sera assez surchargé. D'ici quelques semaines, nous annoncerons des nouvelles têtes d'affiche importantes, sans compter, cependant, sur des groupes américains, qui reportent tous leurs tournées européennes à 2021".

François Maton craint que le secteur culturel soit le plus touché par cette crise du Covid19. "Et ce qui est inquiétant", conclut-il, "c'est que nous serons, sans doute, les derniers à redémarrer nos activités".



 
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