Plan de déconfinement du gouvernement: qu'en pensent les élus qui devront l'appliquer en Aquitaine ?

Ce mardi, le Premier ministre, Edouard Philippe a présenté son plan de déconfinement aux députés. Écoles, transports, tourisme. Une sortie du confinement progressif selon les départements. Voici les réactions des élus de la région qui auront la responsabilité de le décliner localement. 

A Bordeaux, le maire veut rouvrir les quais

Le maire de Bordeaux, comme ses homologues, est en première ligne pour réussir le confinement mais aussi l’étape d’après, la fin de cette période. Les transports en commun de la métropole, les écoles maternelles et primaires, l’ouverture des lieux publics, pour tous ces sujets du quotidien, le maire de Bordeaux était suspendu au plan du gouvernement pour se préparer à la fin du confinement. Et il y a de quoi poursuivre le travail pour être prêt car Nicolas Florian a entendu les consignes du Premier Ministre :  « Sur les transports, pour moi ça a été une découverte d’apprendre que c’est une place sur deux ( un siège sur deux condamné dans les bus ou tram NDLR ), avec ces mesures de distanciation… ça va demander un peu de préparation pour l’organiser dès demain avec notre exploitant . »
Dans les transports en commun mais plus largement là où les habitants sont dans l’espace public, Nicolas Florian veut imposer le port du masque. L’enjeu de ce masque protecteur a été évalué rapidement par le maire et son équipe qui ont pris les devants pour que les Bordelais puissent en disposer. Ils seront distribués aux alentours du 11 Mai. 

Il y a des lieux où je vais imposer le port du masque. Sur les quais des stations de tram et arrêts de bus. De même, je demanderai que les habitants qui vont dans les parcs et jardins portent un masque. J’ai compris que c’était du ressort du maire de rouvrir les lieux publics, je vais prendre un arrêté qui listera tous les lieux publics où le port du masque sera obligatoire, cela concerne aussi les services municipaux.  
 


Et les quais de la Garonne chers aux Bordelais, mais interdits d’accès depuis le confinement ?

Les quais de la Garonne, je vais les rouvrir avec un cheminement bien encadré, avec respect des usages. Je vais en appeler surtout à la responsabilité des habitants pour qu’ils respectent les gestes barrière. Si je m’aperçois que ce n’est pas respecté au bout de deux ou trois jours, je les refermerai.  


Pour les écoles, pas de grande manoeuvre en vue car l’équipe municipale s’est préparée pour assumer ses responsabilités : la restauration scolaire, la désinfection des locaux. Mais des questions restent en suspens. 

La vraie nouveauté, c’est la base du volontariat des parents, avant ce n’était pas vraiment formalisé comme ça. Mais est-qu’il y aura les ressources humaines nécessaires pour assurer la classe ? Il faut le professeur pour faire la classe. 

Au vu de cette décision qui reviendra officiellement aux parents d’envoyer ou non son enfant en classe, le maire de Bordeaux prend l’initiative :

Je vais adresser en urgence un courrier à tous les parents d’élèves pour leur demander si leur enfant sera scolarisé ou s’ils ont un moyen de garde pour bien recenser les besoins. 

Dans les petites communes landaises : c'est "jouable" selon Philippe Dubourg


Le président des maires ruraux des Landes, lui, a adhéré, globalement au discours d'Edouard Philippe.

Le Premier ministre a donné avec beaucoup de prudence et pragmatisme des moyens de prendre en charge une situation compliquée. C’était cohérent à condition que les gens fassent preuve de civilité….


À propos des écoles maternelles et élémentaires ouvertes progressivement à partir du 11 mai, le Premier ministre a imposé des conditions sanitaires strictes : 15 élèves maximum par classe, distribution de gel hydro-alcoolique, respect des gestes barrières, masques pour les adultes. Selon Philippe Dubourg,  le délai est "un peu court" mais ne veut pas s'opposer "par principe" et veut au contraire faire preuve de bonne volonté et d'"humilité". 

À première vue, c'est jouable si on établit précisément et concrètement les mesures avec les enseignants et les parents.  Ça va se faire progressivement. Ça va nous demander des investissements. Fallait-il rouvrir ?  J’en doute mais face aux doubles enjeux économique et de la santé, j’accepte le principe du retour progressif. 


Philippe Dubourg regrette que, dans cette sortie du confinement, présentée par le gouvernement, "on oublie les petits maires. On reconnaît notre utilité  mais au niveau des préfets et des conseils départementaux". 
 

Pas de réouverture des plages avant le 2 juin

Alain Rousset devra gérer le déconfinement dans les TER. Le président de la région Nouvelle-Aquitaine a écouté attentivement le "discours prudent que mérite la période" d'Edouard Philippe  mais qui laisse pour les Régions "un certain nombre d’interrogations voire de possibilités de précisions". 
Alain Rousset s'interroge :

Aurons-nous la possibilité de permettre à nos concitoyens de s’équiper de masques ?  Même si nous accompagnerons toutes les entreprises néo-aquitaines qui se sont lancées dans la fabrique de masques alternatifs. Comment cela va-t-il se passer pour les lignes très fréquentées ? 

La région a commencé à travailler à la commande de gels hydro-alcooliques et de masques.  

Concernant la rentrée des lycées, autre compétence de la Région, elle ne se ferait pas avant le 2 juin, Alain Rousset note que la priorité serait donnée aux lycées professionnels : 

Devant le risque de décrochage massif, il fallait se préoccuper des jeunes dont l'environnement culturel ne permettait pas une stimulation et accompagnement des parents. 
 


La Région disposera également d'un délai supplémentaire pour préparer la réouverture des plages qui resteront fermées au moins jusqu'au 2 juin tout comme les bars et les restaurants. Alain Rousset estime qu'il faut se préparer dès maintenant. Le déconfinement sera sûrement "plus complexe" que le "confinement qui a été décidé du jour au lendemain". 

La Nouvelle-Aquitaine part avec un gros avantage. Le Premier ministre a conditionné la sortie du confinement aux indicateurs de santé. Seuls les départements qui seront dans le vert pourront "déconfiner". Or la Nouvelle-Aquitaine est relativement épargnée par le Covid 19. Son président "plaide pour un suivi très fin" pour reconfiner les secteurs touchés et éviter une reprise de l'épidémie.

Il faudra prendre des habitudes de protection avec les gestes barrière et le port de masque. Il y a une éducation collective que nous devons tous porter. 



D'autant, critique Alain Rousset que nous avons pris un "retard incroyable" sur les tests et que "nous n'avons pas suffisamment de masques". L'élu socialiste aurait aimé que le gouvernement tire les enseignements de ses erreurs et envoie un message fort sur le modèle capitaliste qui a montré ses limites, sur un changement de cap économique. 

Aujourd'hui, ce sont les hôtesses de caisse, les pompiers, les éboueurs, les infirmières, les médecins qui sont en première ligne, les classes populaires et le service public. Il doit y avoir une autre réflexion sur notre organisation. 
 

Imprécision et improvisation selon loïc Prud'homme


Pour respecter les règles sanitaires au sein de l’hémicycle, le Premier Ministre a présenté son plan devant 75 députés dont 3 élus de la France Insoumise. Loïc Prud’homme n’en faisait pas partie mais il a suivi,  lui- aussi,  avec beaucoup d’attention, l’intervention d’Edouard Philippe. 


J’ai essayé de noter des éléments précis et factuels mais les Français auront bien du bien du mal à y trouver de quoi se rassurer tant ce discours était flou.  La seule chose précise, c’est qu’il n’y a pas de masques : il va falloir les faire vous-mêmes. C’est inacceptable.  

Le gouvernement a pris les choses à l’envers. Il a décrété qu’on sortait le 11 mai. Il présente ensuite un plan pour essayer de caler à la date du 11 mai. Date incertaine puisque, si les indicateurs sanitaires ne sont pas bons, on reste confinés.
 

Sur les réseaux sociaux, le groupe parlementaire de la France Insoumise a publié son propre plan de sortie du confinement qui chiffre précisément les moyens  nécessaires à cette sortie de confinement mais il n’a pas pu être débattu à l’assemblée se plaint Loïc Prud’homme

Edouard Philippe estime qu’il faudra 700 000 tests par semaine. Nous pensons qu’il en faudrait 1,8 millions. Et il ne nous a pas dit comment il compte produire ces tests. 
Il ne nous dit rien sur le nombre de places qu’il faudra réquisitionner pour isoler les malades, ni où on les réquisitionne. Selon nous, il faudra au moins 70 000 chambres par tranche de 15 jours. 

 


 

"Tout cela est assez inquiétant"  estime Loïc Prud’homme, particulièrement remonté contre « ce choix cornélien remis sur le dos des Français : celui de l’école" :   est ce que je choisis la santé de mon gamin ou mon boulot et je le renvoie à l'école? Un choix qui sera plus pesant pour les familles précaires s'inquiète l'élu LFI. « Certains n’auront pas le choix ».  
 

Autre imprécision relevée par le député de la Gironde : 

Le gouvernement a dit : pas plus de 15 élèves par classe. Comment ça se passe s’ils sont plus nombreux. Les enseignants devront-ils reprendre le boulot ? Quand on sait qu’une bonne partie sont des enseignantes qui ont aussi leurs enfants à gérer

Quant au déconfinement progressif, selon les indicateurs sanitaires du département, « c’est du bon sens ».
 

On a la grande chance d’être dans une région peu touchée. En espérant que le déconfinement ne produise pas une seconde vague dans la mesure où tout le monde ne disposera pas ni de masque ni de gel. 
 

"On est dans l’impréparation. Tout cela est improvisé" conclut Loïc Prud'homme. 

 

Un dispositif fragile, une intervention qui ne rassure pas selon Olivier Dartigolles


Olivier Dartigolles, conseiller municipal de Pau, ancien porte-parole du PCF se montre tout aussi critique :

Le Premier ministre a fait de son mieux, le gouvernement semble de bonne volonté. Mais les grands problèmes subsistent, et notamment la crainte d'un manque de moyens concernant les masques et les tests. Rien ne permet de dire que l'on peut compter sur l'efficacité de ce gouvernement et de l'Etat.
 

Je suis préoccupé par la façon dont le gouvernement renvoie la patate chaude du déconfinement aux élus locaux et en particulier aux maires. Auront-ils des moyens supplémentaires pour faire face à ces dépenses, comme la désinfection des salles de classe?
Sur la reprise économique, il y aura de graves fractures sociales. Certaines catégories ne sont pas concernées par le télétravail, il y a des gens qui n'auront pas le choix et devront retourner sur les chaines de production, ils devront mettre leurs enfants à l'école pour pouvoir travailler, ce sera la double pleine pour eux. Et dans quelles conditions iront-ils travailler? Je ne fais pas confiance à certains groupes qui veulent que le travail redémarre coûte que coûte. 
En résumé, ce dispositif semble fragile et l'intervention n'est pas rassurante. Je souhaite que le gouvernement réussisse ce déconfinement alors qu'il n'a pas réussi la gestion de cette crise.


David Habib, député socialiste des Pyrénées-Atlantiques, est resté sur sa faim : 


Tout ce qu'il a annoncé, on le savait ou on le supposait déjà. J'ai l'impression qu'Edouard Philippe nous dit de nous adapter à une date décidée par le Président de la République, mais que dans certains cas, ce ne sera pas possible.
Concernant l'interdiction de circulation entre les régions très touchées par le virus et celles bien moins touchées comme la nôtre, c'est une mesure que j'avais souhaitée. 
Ce qui est sûr, c'est qu'il aurait fallu attendre un peu pour déconfiner et mettre le paquet sur la protection dans les entreprises et les transports.  
Pour la fermeture des plages jusqu'à début juin, c'est logique, il ne faut pas faire un appel d'air pour que les gens se précipitent côte à côte sur la plage. Mais on aurait pu faire au cas par cas, différencier par exemple les plages très étendues d'Aquitaine et celles de la Méditerranée. 

David Habib a voté contre ces mesures, "il faudrait attendre plus longtemps pour déconfiner et surtout, il aurait fallu tester massivement dès le début, comme en Allemagne, en Israël et en Corée du Sud." justifie-t-il. 

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