Ségolène Royal, qui représentait la France aux funérailles de Fidel Castro, a essuyé dimanche une volée de bois vert, après avoir relativisé la veille les accusations de violations des droits de l'Homme à Cuba. Ses propos sont contestés jusqu'au sein du gouvernement.
Les réactions les plus vives sont venues de l'opposition, mais aussi d'intellectuels cubains en exil en France. La numéro 3 du gouvernement s'est défendue en dénonçant "une polémique déplacée". La ministre de l'Écologie était la seule membre d'un exécutif européen, avec le Premier ministre grec Alexis Tsipras, à assister à Cuba aux cérémonies en l'honneur de Fidel Castro, mort le 25 novembre.Elle y avait salué samedi la mémoire du "Comandante" et a évoqué "beaucoup de désinformation" sur les violations des droits de l'Homme. "Ma gauche à moi, ça n'est pas cette gauche qui encense Fidel Castro", a réagi sur BFMTV Juliette Méadel, secrétaire d'État chargée de l'aide aux victimes. Député écologiste, candidat à la primaire à gauche, François de Rugy a demandé au "président de la République de désavouer ces propos contraires aux valeurs de la France". Des parlementaires de droite ont fustigé une "insulte" à la mémoire des victimes du castrisme.
Pour le sénateur LR Bruno Retailleau, proche de François Fillon, le gouvernement avait fait "une erreur" en envoyant Mme Royal à Cuba, la France n'ayant "pas à honorer les dictatures". Mais en sus, Mme Royal "a commis une faute d'une extrême gravité en foulant du pied les droits de l'homme". Le président du Conseil national des Républicains Luc Chatel a, lui, pressé François Hollande "de préciser la position de la France".
"Aveugle ou fanatisée ?"
Ni l'Élysée, ni Matignon n'ont réagi à la polémique. Mais le Quai d'Orsay, dans un tweet, a jugé "inutile de polémiquer sur Fidel Castro", renvoyant notamment au communiqué du président Hollande, après le décès du leader cubain, qui évoquait aussi bien "les espoirs" que "les désillusions" nés de la révolution cubaine.
Ségolène Royal avait relativisé samedi les violations des droits de l'Homme reprochées au régime notamment par l'ONU et Amnesty International. "Il y a toujours du positif et du négatif dans les histoires, mais on sait qu'ici, quand on demande des listes de prisonniers politiques, on n'en a pas. Fournissez-moi des listes de prisonniers politiques, à ce moment-là on pourra faire quelque chose", avait-elle dit.
"Je suis prêt à lui fournir une liste immédiatement", a rétorqué, "indigné" l'écrivain Jacobo Machover, exilé en France. "Mme Royal est complètement aveugle ou fanatisée par la propagande cubaine", a ajouté sur France info l'auteur de "Cuba, une utopie cauchemardesque" en évoquant "les milliers d'emprisonnés", de condamnés "pour rien du tout", les "fusillés", et tous les morts en mer "qui essayaient d'échapper au paradis socialiste dépeint par Mme Royal".
Au lendemain de la mort de Castro, Amnesty International avait rappelé "la répression systématique des libertés fondamentales" tout au long de son règne. "L'état actuel de la liberté d'expression à Cuba, où des militants continuent d'être arrêtés ou d'être victimes de harcèlement est le plus sombre héritage de Fidel Castro", soulignait l'organisation.