Jugés il y a un mois pour transport et détention d'armes, de munitions et d'explosifs en lien avec une entreprise terroriste, les deux Artisans de la paix, Jean-Noël Etcheverry et Béatrice Molle Harran sont reconnus coupables mais dispensés de peine par la 16e chambre correctionnelle de Paris. Le parquet avait requis deux ans et un an de sursis envers les deux leaders du désarmement du groupe terroriste basque ETA.
Une décision en forme de profonde délivrance. Ce jeudi, les Artisans de la paix ont gagné le droit à la liberté, huit ans après leur arrestation pour détention d'armes, de munitions et d'explosifs en lien avec une entreprise terroriste. "Une grande satisfaction, pour ces deux militants dont on devrait saluer le combat", selon l'un de leurs avocats, maître Patrick Baudouin.
Fin 2016, cinq personnes avaient été arrêtées à Louhossoa dans le Pays Basque, après qu'un arsenal d'armes, appartenant au groupe terroriste basque ETA, a été retrouvé dans une propriété. Les autorités pensent alors qu'un attentat est en cours de préparation.
Un "jugement acrobatique"
Parmi les mis en cause, Jean-Noël Etcheverry, militant écologiste et Béatrice Molle Harran, journaliste à Mediabask, sont les seuls prévenus présents à la barre lors du procès début avril. Deux ans et un an de prison avec sursis avaient respectivement été requis contre eux. Mais la 16e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris a finalement décidé de ne pas suivre les réquisitions du parquet.
Le tribunal a retenu la défense des intéressés, qui ont plaidé leur combat tout au long du procès. Ce lot d'armes était en fait voué à la destruction dans l'optique de commencer le désarmement de l'ETA. Elle les dispense de peine, mais reconnait leur culpabilité.
Maître Patrick Baudouin souligne le "jugement acrobatique" du tribunal : "Désarmer des terroristes, ce qui était la volonté de mon client, parait difficilement conciliable avec la notion d'entreprise. Nous regrettons l'absence d'évolution dans l'appréciation de cette infraction."
Il faut perpétuer le travail de mémoire, de vérité, et continuer à poser les conditions du vivre ensemble dans la société basque.
Jean-Noël EtcheverryMilitant écologiste
Poursuivre le travail de pacification
La notion de culpabilité est, elle, sans importance pour Jean-Noël Etcheverry : "On aurait préféré la relaxe, mais le plus important était surtout de ne pas être inscrit au fichier antiterroriste." "Notre démarche est pacifiste. Il s'agissait de neutraliser les armes pour que cesse la violence au Pays basque", avait notamment déclaré Béatrice Molle Harran à la barre. Un désarmement nécessaire après le cessez-le-feu prononcé par le groupe terroriste en 2011.
A la sortie de la salle d'audience, le soulagement redessine les visages, longtemps crispés par le sentiment d'injustice : "S'il fallait le refaire, on le referait, lance Jean-Noël Etcheverry. L'acte collectif a été utile pour tout le monde, mais il faut perpétuer le travail de mémoire, de vérité et continuer à poser les conditions du vivre ensemble dans la société basque. Cette décision nous y encourage."
Un jugement d'apaisement donc et une victoire pour la poursuite de la pacification au Pays basque. Le parquet a encore une dizaine de jours pour faire appel de la condamnation.