Depuis ce vendredi 29 mars, les particuliers n'auront plus à se limiter à l'achat d'une seule cartouche de cigarettes lorsqu'ils traversent la frontière européenne. Une annonce qui satisfait les fumeurs, mais qui inquiète les buralistes français. Réactions à la frontière espagnole.
"C'est bien d'avoir la liberté d'acheter ce qu'on veut." Ce dimanche 31 mars, peu de Français traversaient le col de Pourtalet, pour venir acheter des cigarettes à la frontière espagnole, dans l'une des trois "ventas" ouvertes en hiver. Mais ceux qui se sont décidés à braver les conditions météorologiques exécrables étaient bien au courant de l'évolution de la réglementation.
Des prix attractifs à la frontière
Jusqu'à présent, les consommateurs étaient restreints à l'achat de 200 cigarettes. Mais depuis le décret publié par le gouvernement vendredi 29 mars, il n'y a plus aucune limite. "Pour moi, ça ne va pas changer grand-chose, lance un Français, venu acheter ses cigarettes à la frontière. On venait seulement pour une cartouche."
Mais pour Tonya Guillen, qui travaille à la Venta Anaye, cette évolution ne peut être que positive. Car les prix dans ces établissements bien que plus élevés que chez les vendeurs classiques, restent très attractifs : "Nous, ça nous semble bien si les gens en achètent trois quatre, au lieu d'en acheter qu'une, c'est mieux, pointe la gérante. La France a dû se plier à la loi européenne, on ne sait pas combien de temps ça va durer."
Interrogé au micro de Sud Radio, vendredi 29 mars, le ministre délégué chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave, justifiait ce décret par la volonté de "permettre aux douaniers de systématiquement sanctionner ceux qui veulent faire du commerce en allant de l’autre côté de la frontière".
Plus de contrôles
Cette nouvelle annonce, bien que connue par les buralistes français, est bien loin de les satisfaire. "On savait que ce décret allait tomber, mais notre première inquiétude était de savoir si l'État français allait se doter d'un moyen de lutter contre le trafic du quotidien", détaille Philippe Coy, président de la Confédération des buralistes. Avec la fin de cette limitation, il espère un contrôle plus accru des douaniers pour juguler les trafics.
"Ce n'est pas open bar pour les consommateurs, la question du contrôle du tabac aujourd'hui ne se pose plus, insiste Philippe Coy. Cette semaine, 27 tonnes de tabac ont été saisies en huit jours d'opération. Il faut donner les moyens à nos douaniers sur le cadre réglementaire puisque la situation est provoquée par l'Europe."
Réduire l'écart des prix européens
Car la fin de la limite ne sous-entend pas la levée des contrôles."Nous avons changé complètement la logique, nous ne nous appuyons plus du tout sur une logique de volume et de cartouches, détaillait Thomas Cazenave, lors d'un point presse. Les douaniers ont désormais la possibilité de s’appuyer sur un faisceau d’indices, de saisir et de sanctionner […] ceux pour lesquels il y a une présomption de commerce et donc de commerce illégal."
Nous sommes le pays où les prix sont les plus élevés, nous sommes arrivés à un sommet irraisonnable, nous ne pouvons plus supporter cette situation.
Philippe CoyPrésident de la Confédération des buralistes
Néanmoins, pour les buralistes, reste le problème majeur de l'écart des prix qu'ils jugent trop importants entre les différents pays européens. "La France a fait une politique fiscale très agressive pour accompagner des enjeux de santé publique, note le président de la Confédération des buralistes. Ce qui ne fonctionne pas, car des voies de contournement ont été utilisées par des consommateurs."
L'ensemble des 23 000 commerçants français demandent une harmonisation des prix en Europe et un moratoire de la fiscalité pour revenir à une politique européenne commune. Un projet qui devrait être abordé après les élections européennes, en 2025.