Seringues, flacons cassés, perfusions... Tous les jours, les salariés du centre de tri de Sévignacq voient passer des déchets médicaux infectieux sur le tapis roulant, et risquent la piqûre. Pourtant, ces déchets doivent être rapportés à la pharmacie.
Sur la chaine de tri, le danger peut arriver à tout moment. Sylvie Garcès était à son poste ce jour-là au centre de tri de Sévignacq. En attrapant un déchet, elle se pique sur une seringue. Elle alerte ses collègues et le tapis roulant s'arrête immédiatement. La salariée doit partir pour les urgences, et faire les premières analyses.
Six mois d'analyses sanguines
Dans son malheur, Sylvie Garcès a eu de la chance : elle a pu retrouver l'aiguille qui était restée plantée dans son gant de protection. Si elle ne l'avait pas localisée, elle aurait automatiquement dû suivre un traitement de trithérapie. La procédure en vigueur.
Après une première prise de sang le jour même, Sylvie Garcès doit en refaire une 15 jours, puis trois mois après, avant d'enfin savoir si elle a été contaminée, six mois plus tard, grâce à une dernière analyse sanguine.
Je ne vous cache pas que dans la période des six mois, on est dans l'angoisse, on se pose des questions, on peut attraper quelque chose...
Sylvie Garcèsà France 3 Aquitaine
Les agents de tri sont exposés à ce risque au quotidien. Au centre de Sévignacq, trois salariés ont été victimes de piqûres en deux ans. "C'est devenu régulier, tous les jours, on trouve des seringues sur le tapis", regrette Sylvie Garcès.
La peur au ventre
La peur de se faire piquer, et d'attraper une maladie, est omniprésente dans l'esprit des salariés, qui viennent travailler la boule au ventre. D'autant que les aiguilles passent à travers les gants des agents. "Il faudrait des gants en maille de fer mais ce n'est pas possible, car il faut une certaine dextérité pour aller chercher le produit", explique le responsable centre de tri de Sévignacq, Patrick Laffite.
"Ils mettent les mains et les doigts dans les déchets et des fois, ils ressentent une piqûre, alors là, c'est l'angoisse, certains n'ont pas pu continuer", poursuit-il.
Ces quinze dernières années, le centre de tri de Sévignacq a vu le nombre de déchets médicaux augmenter fortement. "On en a de plus en plus sur les tapis : des aiguilles, des perfusions, des fioles de sangs, des poches d'urines...", liste Sylvie Garcès.
Le Dasri, un dispositif méconnu
Elle est venue alerter les élus locaux et l'Agence régionale de santé sur le sujet. Car ces seringues n'ont rien à faire là. Les déchets médicaux de certaines maladies, contagieuses, ne doivent surtout pas se retrouver dans la poubelle normale. "Il y a une liste de maladies qui font partie d'un dispositif qu'on appelle Dasri (Déchets d'activités de soins à risque infectieux), nous explique Raquel Ceniceros, ingénieure études sanitaires à l'Agence Régionale de Santé. Les patients qui viennent chercher leurs médicaments à la pharmacie doivent être informés du processus à suivre.
La pharmacie doit nous donner une boîte jaune à couvercle vert. Il faut mettre tout ce qui est piquant/coupant/tranchant dedans et ensuite la ramener en pharmacie.
Raquel Ceniceros, ingénieure études sanitaires à l'Agence Régionale de Santéà France 3 Pau Sud Aquitaine
Mais cette procédure est encore peu connue du grand public. En effet, "plusieurs centaines de litres de déchets de soins à risques infectieux se retrouvent en centre de tri tous les ans", alerte Raquel Ceniceros.
L'ARS et les élus locaux lancent donc une plaquette d'information pour rappeler les consignes à suivre en cas d'auto-traitement. Une bonne nouvelle pour les salariés du tri, comme Sylvie Garcès, qui se sentent enfin écoutés. Cette campagne d'information pourrait également permettre de réduire le nombre de déchets médicaux jetés dans la nature.