"Slow démocratie : il est temps de ralentir et de reprendre son destin en main"

David Djaïz, 29 ans, est originaire d'Agen. Enarque et normalien, il vient de publier un deuxième essai "Slow Démocratie" (Edition Allary) où il propose un nouveau concept politique de "slow démocratie", référence à la "slow food" développée depuis le début des années 90 en Italie. 

La mondialisation nous a mis dans un processus d'accélération qui parfois nous a fait perdre le sens de la délibération publique.
David Djaïz

Slow démocratie, c'est quoi ?


David Djaïz est né en 1990 à Agen. Normalien, énarque, il est aujourd’hui haut fonctionnaire et enseigne à Sciences Po. A 29 ans, ce haut fonctionnaire, fils d'enseignants, s'interroge sur notre société malmenée par la mondialisation. "Dans les années 90, il y a eu une rébellion contre l'impérialisme des fast-food, cette nourriture industrielle venue avec la mondialisation en Italie qui était le pays d'Europe où il y avait le plus de chaînes de fast-food. La slow démocratie, c'est la même chose. Le point de départ, c'est de dire que les 40 dernières années qui viennent de s'écouler ont été marquées par la mondialisation, ont imposé un rythme d'accélérations permanentes avec la finance et les nouvelles technologies qui fait que nous avons l'impression que notre vie nous échappe et que collectivement notre destin nous échappe".

Slow démocratie c'est une proposition politique pour ralentir le rythme de la mondialisation. Montrer que la politique et la démocratie appartiennent à une autre sphère que celle de l'économie et qui nécessite de prendre son temps et de retrouver la totalité et la richesse de l'expérience civique.
David Djaïz


Selon l'auteur, la démocratie et la nation sont deux clés pour reprendre notre destin en main. Il regrette que "seule l'extrême-droite s'empare du thème de la nation pour en parler sur un mode identitaire, village gaulois qui n'a rien à voir avec ce qu'est la nation démocratique".

Ce qui est très important aujourd'hui, c'est de réapprendre à parler positivement de la nation. David Djaïz

 

Bordeaux, ville emblématique des transformations de la mondialisation

Pour David Djaïz, Bordeaux est une ville emblématique des transformations de la mondialisation de ces 40 dernières années, car "c'est une ville devenue très attractive dans laquelle se concentre les activités économiques à haute valeur ajoutée et les emplois de cadre très qualifiés donc il y a une explosion des rémunérations et de l'immobilier. Les classes moyennes et populaires ont beaucoup de mal à se loger à Bordeaux et sont releguées dans les villes de la périphérie".

Cette dynamique de fragmentation territoriale et d'éloignement du lieu de vie par rapport au lieu de travail, qui restent Bordeaux et son agglomération, peut être génératrice de tensions et de ressentiment. C'est ce que l'on a vu pendant la crise des Gilets jaunes où Bordeaux a été une ville particulièrement touchée avec de nombreuses manifestations parfois violentes, il y a eu beaucoup de casse avec en ligne de mire ce ressentiment envers la capitale régionale qui concentre les richesses et n'est plus accessible aux classes moyennes et populaires.
David Djaïz.


"Donc, il faut impérativement construire un discours où l'on ne va pas enlever à Bordeaux ce qu'elle a, car c'est la locomotive économique de la région, mais dans lequel il y a un développement territorial plus équilibré et où l'on construit des coopérations entre Bordeaux et les villes moyennes en Gironde et en Aquitaine".
 

"Le message des gilets jaunes doit être pris en compte par les politiques publiques"


David Djaïz n'est pas surpris par le mouvement des Gilets jaunes en France. Il explique qu'avec "la mondialisation, 1% des plus riches a vu une augmentation de leurs revenus, et à côté de cela, les classes moyennes asiatiques notamment en Inde et en Chine ont connu aussi une hausse spectaculaire de leurs revenus puisque beaucoup sont sortis de la pauvreté absolue. Mais entre ces deux groupes de gagnants, vous avez un groupe de vrais perdants, ce sont les classes moyennes et populaires en Occident qui ont vu leurs revenus stagner voire diminuer."

Dans ce malaise social, économique et démocratique, il y a une forme de rébellion contre la mondialisation qui a laissé des miettes aux classes moyennes et populaires.


"La question territoriale qui se pose avec encore plus de force depuis la crise financière de 2008, aggrave le ressentiment des Gilets jaunes qui ont été nombreux dans les villes moyennes".

Aux prochaines élections municipales, "pas sûrs que les Gilets jaunes soient tentés par les extrêmes. Au départ du mouvement, il y a eu une sorte d'insurrection populaire qui touchait au pouvoir d'achat, à la voiture et à l'essence. Puis, dans un second temps, le mouvement a pu être capté par des militants de partis politiques qui n'avaient plus rien à voir avec l'esprit initial du mouvement. Ce message dont les Gilets jaunes étaient porteurs au début, doit être pris en compte dans les politiques publiques".

Pour ce faire, il faut élargir la participation démocratique à tous les niveaux, et en particulier au niveau local où tout se décide.
David Djaïz

"La politique, non merci !"

Haut fonctionnaire brillant à moins de 30 ans (bac avec 19,97 de moyenne, normalien sorti major de sa promo en 2014), David Djaïz a été contacté par plusieurs hommes politiques ces dernières semaines.

Pour le moment, je ne veux pas travailler pour un politique en particulier, car je ne souhaite pas que mes idées soient associées à un parti. Je voudrais que mon message passe auprès du plus grand nombre. Pour le moment, la politique ne m'intéresse pas.
David Djaïz.


Par le passé, David Djaïz a fait l'expérience d'une campagne électorale auprès d'Arnaud Montebourg. Il participait à la rédaction des discours du candidat à la primaire citoyenne de 2011 organisée par le Parti socialiste et le Parti radical de gauche. Il a par ailleurs eu l'occasion de côtoyer Emmanuel Macron quand il était ministre de l'Economie. 

"J’ai toujours eu un intérêt pour la politique. 2011 et 2012 sont des années très importantes, entre la crise et la présidentielle. J’ai donc décidé de m’engager dans ce que je sais le mieux faire. Et pour l’instant, c’est écrire", déclarait-il en 2011 au journal Sud-Ouest.

En 2019, l'écriture reste une valeur sûre.

Ce n'est pas le haut fonctionnaire qui a écrit ce livre, mais le citoyen. Ce n'est pas un programme politique. Dans ce livre, je donne des clés aux personnes de bonne volonté qui souhaitent reprendre leur destin en main et celui de la France.
David Djaïz.

VIDEO : l'intégralité de l'interview de David Djaïz, auteur de Slow démocratie :
 

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