Jean-Dominique Senard, le président de Renault était auditionné ce jeudi 11 juin à l’Assemblée nationale. Il a été interrogé par le député de la Vienne, Nicolas Turquois sur l'avenir des Fonderies du Poitou, en grandes difficultés et dont Renault est le client quasi-exclusif.
Lors de son audition devant l'Assemblée nationale, Dominique Senard, le président de Renault a donné la position de son groupe sur l'avenir des Fonderies du Poitou. Il répondait à une question posée par Nicolas Turquois, député de la 4ème circonscription de la Vienne, sur la stratégie du constructeur français vis à vis des Fonderies du Poitou installées à Ingrandes-sur-Vienne, près de Châtellerault.
Renault doit leur donner les moyens. Les salariés des Fonderies n'ont pas vocation à être toujours des fondeurs mais Renault doit leur donner les moyens d'évoluer vers de nouveaux produits dont votre groupe aura besoin demain.
- Nicolas turquois, député Modem de la Vienne
Dominique Senard a tout d'abord rappelé que Renault avait tenu ses engagements financiers vis à vis des Fonderies du Poitou, pris lors du rachat il y a un an par le groupe britannique Liberty.
Les engagements financiers que nous avions pris, notamment de verser jusqu'à 11 millions d'euros sont tenus. Nous sommes aujourd'hui à plus de huit millions d'euros versés. Nous avons donc en quelque sorte subventionné cette activité.
- Dominique Senard, président de Renault
Jean-Dominique Senard a ensuite évoqué l'avenir des deux sites des Fonderies du Poitou, la partie aluminium et la partie Fonte alors que le salariés des deux sites manifestent leurs inquiétudes sur le maintien de leur emploi et l'avenir de l'entreprise.
Une reconversion de la partie Fonte envisagée
Dominique Senard s'est montré optimiste sur l'avenir de l'aluminium mais n'a pas caché son pessimisme concernant l'activité Fonte (316 salariés) qu'il juge comme condamnée par l'évolution du marché allant dans le sens d'un allègement des pièces détachées destinées aux automobiles.
Celle de l'aluminium me semble avoir honnêtement une assez belle perspective, on est dans le sens de l'histoire...l'autre partie (fonte) est plus difficile. A ce stade le groupe Renault a tenu ses engagements... On peut toujours continuer mais je ne se suis pas sûr que ce soit la solution de fond. Je crois qu'il faut qu'on prenne le problème de façon plus globale et qu'on s'attelle à cette situation de l'emploi dans nos activités fournisseurs qui n'ont probablement pas, à cause de ce qu'elles font, un avenir assuré.
- Dominique Senard, président de Renault
Cette audition du président de Renault s'est déroulée alors que les délégués du personnel et des syndicats des Fonderies du Poitou étaient reçus à Paris par Sanjeev Gupta, le patron anglo-indien du groupe britannique Liberty. Ce rendez-vous surprise qui s'est déroulé à Bercy a recoupé les éléments avancés par Dominique Senard un peu plus tôt dans la journée. La garantie des salaires pour au moins les trois prochains mois a été assurée pour les salariés des deux sites. En revanche, l'avenir de l'activité fonderie semble incertain. L'entreprise s'est engagée à proposer une reconversion rapide dès le trimestre prochain. ALVANCE, propriétaire de la fonderie fonte de Poitou et membre de GFG Alliance de Sanjeev Gupta, a annoncé dans un communiqué que le groupe "va mettre en place un groupe de travail pour étudier les possibilités de reconversion de la fonderie fonte de Poitou."
Bien que les discussions avec le client de la fonderie soient en cours, le manque de visibilité sur les commandes à venir et les perspectives toujours mauvaises pour les moteurs diesel signifient que l’entreprise ne pourra pas continuer dans sa structure actuelle pendant plus de trois à quatre mois... Nous avons clairement indiqué que la récente crise du secteur automobile a rendu la fonderie non viable dans sa forme actuelle.
- Communiqué d'ALVANCE Aluminium Group
Les syndicats "attendent de voir si les promesses seront tenues"
A la sortie de l'entrevue, Jean-Philippe Juin, délégué CGT des Fonderies Alu s'est montré prudent, "attendant de voir si les promesses faites du côté financier et sur la charge d'activité seront tenues".
De la part de Liberty, c'était au moment du rachat la promesse de 10 millions d'euros que l'on n'a pas vus. Le soutien productivité, c'est surtout Renault qui s'était engagé à mettre 700.000 pièces sur le site et on a fini à 600.000. Cette année, on aura encore moins de volume à caus ede la pandémie. Tout ça nous met en péril. On va attendre de voir si les promesses sont tenues concernant le manque de volumes de pièces et le maque d'investissements.
- Jean-Philippe Juin, délégué CGT des Fonderies Alu
Une assemblée générale rassemblera ce vendredi 12 juin les salariés des deux sites à 13h à Ingrandes-sur-Vienne. En attendant des assurances d'engagements plus concrets, les syndicats ont annoncé qu'ils allaient continuer à bloquer les expéditions de pièces pour Renault.
Le président de Renault était auditionné à l’Assemblée nationale, deux semaines après avoir annoncé un plan d’économies de deux milliards d’euros pour sortir du rouge.
Le constructeur va aussi bénéficier d’un prêt garanti par l’Etat de cinq milliards d’euros pour assurer le passage difficile de la crise du Covid-19.
Reportage de Patricia Périn, Jean-Yves Loes, Jacques Duboz et Alexia Rouy :