Boom des mangas en France : la tendance profite également aux éditeurs et libraires locaux

Depuis 2021, une bande dessinée sur deux achetée en France est un manga. À Poitiers, l'engouement bénéficie aux libraires et éditeurs spécialisés.

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"Non désolé, nous n’avons plus d’édition disponible, tout a été précommandé depuis le mois de juin". Ce mercredi 8 décembre, les appels de clients s’enchaînent, à la librairie Bulles d’Encre de Poitiers, pour tenter de dénicher le graal : le 100e manga de One Piece.

Depuis sa sortie, ce mercredi matin, tout le monde s’arrache le dernier tome de la saga, qui retrace l’aventure de Luffy et son périple pour devenir un pirate. À l’image de l’intérêt grandissant dont profitent ces BD japonaises - en 2021, une bande dessinée sur deux achetées en France est un manga -, plus de 250.000 exemplaires du tome inédit de One Piece ont été édités dans l’Hexagone (soit l’équivalent du tirage d’un prix Goncourt), dont des éditions collectors limitées, sont déjà revendues à des prix exorbitants sur Internet.

Une demande en constante évolution

Installé dans le cœur de Poitiers depuis 25 ans, la librairie Bulles d’Encre a observé, depuis quelques années, une montée en puissance du manga dans la région. "À nos débuts, nous avions deux ou trois étagères remplies de sagas classiques comme Akira, mais il y a six ans, face à la demande, on a réorganisé la boutique pour ajouter deux étagères de plus et on en aurait bien besoin d’une troisième aujourd’hui", plaisante Claude Thomas, vendeur de la librairie.

Chez le Lézard Noir, éditeur poitevin, les mangas représentent aujourd'hui plus de 95% des publications. "Ce n’était pas du tout notre domaine lorsqu’on a commencé notre activité en 2004. Mais force est de constater qu’en 2021, sur les 33 nouveaux livres que nous avons édités, 30 sont des mangas", explique le gérant, Stéphane Duval. Son best-seller : La Cantine de Minuit, un manga centré autour d'un restaurant. Il s’est vendu à plus de 150.000 exemplaires en 2021.

Cet engouement est l’un des effets inattendus du confinement sur les habitudes des Français. Si avant la pandémie de Covid-19, l’intérêt pour la lecture était plutôt en baisse, "la tendance s’est inversée avec le confinement", assure Stéphane Duval. Et contre toute attente, les mangas ont été parmi les premiers ouvrages à bénéficier de cette nouvelle mode. "Un manga comme Daruchan, édité chez nous, qui se serait vendu à 900 exemplaires, il y a un an, se vend désormais à plus de 1.800 exemplaires", ajoute l’éditeur.  

Un format fédérateur pas uniquement réservé aux jeunes

À l’instar des grandes productions de séries sur les plateformes de streaming, les scénarios des mangas sont très variés et développés sur le long terme. Cette construction narrative, accrocheuse, qui peut plaire à tout type de public, est, selon Stéphane Duval, l’un des facteurs principaux du succès de la BD japonaise. "On y retrouve beaucoup de personnages auxquels on s’attache vite et autour desquels se développe une véritable communauté. Les histoires permettent aussi parfois aux lecteurs de mieux appréhender la culture japonaise, qui fascine beaucoup les occidentaux", précise l’éditeur.

Chez Bulles d’Encre, les shonen, (adolescent, en japonais), dont sont issues les sagas One Piece ou Naruto sont les formats les plus appréciés par les lecteurs. Un succès avant tout "générationnel", selon Claude Thomas : "Les enfants et adolescents d’aujourd’hui grandissent directement dans l’univers des mangas. Tout le monde en lit à l’école, on voit des animés sur toutes les plateformes de streaming et les ouvrages sont très accessibles niveau prix, donc difficile de passer à côté de la tendance", confie le libraire.

Pourtant, Stéphane Duval l’affirme : "L’univers des mangas est tellement vaste, qu’il serait réducteur de dire qu’il est réservé aux jeunes." Afin de toucher un public plus large, l’éditeur privilégie alors dans sa collection les seinen, des chroniques sociales qui illustrent souvent les tranches de vie de trentenaires. 

À la différence des best-sellers habituels, le Lézard Noir édite certains de ses ouvrages en reprenant les codes de la BD franco-belge : des planches en couleurs, avec des dimensions plus grandes, sans jaquette... "Ce sont des détails qui plaisent davantage à un public, qui a grandi en lisant des incontournables comme Astérix et Obélix ou Tintin", précise Stéphane Duval.

Si la tendance manga profite aux éditeurs et aux libraires locaux en terme de ventes, ce boom de la BD japonaise donne également l'opportunité à Stéphane Duval de se permettre quelques plaisirs. Dans le manga Gamma Draconis, réalisé par Eldo Yoshimizu, l’éditeur note l’apparition de la gare de Poitiers sur l’une des planches. "C’est un manga que l’on a vendu à des éditeurs américains, ou allemands. Grâce à cet engouement, on peut se permettre de faire rayonner notre région à l'international, c'est quelque chose qui aurait été impensable il y a quelques années", se félicite-il. 

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