Indiscrète, la manufacture de lingerie, installée à Chauvigny dans la Vienne, fête cette année ses dix ans d'existence. L'histoire de l'entreprise a été marquée par des difficultés et des drames, comme le suicide de l'un de ses fondateurs, mais depuis deux ans une embellie se confirme.
Alain Rousset, président de la region Nouvelle-Aquitaine, s'est rendu, mercredi 7 octobre, dans les locaux de l'entreprise Indiscrète à Chauvigny. Il s'est dit impressionné par "la volonté de repartir malgré les difficultés" dont on fait preuve les salariées et l'équipe dirigeante d'Indiscrète.
Produire une lingerie 100% française
L'entreprise de confection, spécialisée dans la lingerie haut de gamme et entièrement réalisée en France, a été créée en 2010 par trois anciens salariés d'Aubade, licenciés après la délocalisation de la marque de lingerie en Tunisie.Indiscrète se donne pour objectif de maintenir la production de ces produits dans sa totalité en France et fait, alors, travailler 23 couturières dans ses ateliers de Chauvigny.
Difficultés financières et suicide du fondateur
La faillite d'un de ses principaux clients, une marque de maillots de bain haut de gamme, entraîne de très importantes difficultés de trésorerie pour la manufacture chauvinoise. Elle est placée en redressement judiciaire en juillet 2018 avec un délai d'observation de six mois. Quelques jours plus tard, en août 2018, cette situation conduit l'un des créateurs et dirigeant, Didier Legrand, à se donner la mort dans les locaux de l'entreprise. Le drame est terrible pour les employées mais il suscite un formidable élan de solidarité qui permet de poursuivre l'activité.La vente à domicile et sur internet se développe pour permettre de maintenir les commandes qui se multiplient et le soulagement est bien réel, cette fois, quand le tribunal de commerce, en janvier 2019, valide le plan de continuation de l'entreprise présenté par un investisseur et homme d'affaires, Michel Gouzon. Une relance qui se fait sans aucun licenciement.
La renaissance de l'entreprise
A 72 ans, l'investisseur injecte des fonds importants dans la manufacture de corseterie, il apporte 350.000 euros de fonds propres et la garantie d'une avance bancaire supplémentaire de 230.000 euros.L'investisseur vient aussi avec des projets. Il souhaite développer une collection pour hommes, moderniser l'outil de production, ouvrir une boutique, développer en parallèle la vente sur internet et agrandir les locaux.
Des projets qui aujourd'hui se concrétisent. Dernièrement, une nouvelle machine de coupe a été installée et un nouveau bâtiment de 311 m² a été construit pour permettre d'étendre le travail à façon. La qualité du travail réalisé par les couturières de Chauvigny est reconnu dans la profession et les nouveaux clients affluent.
Malgré tout, le PDG d'Indiscrète ne veut pas céder à un trop grand enthousiasme qu'il juge imprudent. L'histoire d'Indiscrète est là pour lui rappeler, l'avenir peut très vite devenir sombre. Le traumatisme du cambriolage dans les ateliers de confection en février dernier a été vite surmonté mais produire une lingerie 100% française et à des prix abordables est plus que jamais un défi économique alors que les coûts des matériaux ont augmenté en raison de la crise sanitaire.En raison de la qualité du travail du personnel, beaucoup d'entreprises nous sollicitent pour faire de la fabrication pour elles, ça c'est l'espoir.
Cependant, Indiscrète ne dévie pas de sa marque de fabrique : ne rien céder sur la qualité et ne pas cesser de se développer à partir de l'assise historique de ses locaux de Chauvigny. Une belle histoire industrielle où la résilience et l'esprit d'équipe de toutes et tous a permis de ne pas céder devant les obstacles. Une histoire dont les "Indiscrètes" sont fières.
L'anniversaire des dix ans de l'entreprise se fera dans la discrétion, par respect pour la mémoire de Didier Legrand. A noter tout de même qu'une collection spéciale "dixième anniversaire" sera dévoilée en novembre prochain.Je suis très émue d'avoir participé aux débuts d'Indiscrète et de la voir évoluer comme ça évolue.
Le reportage de Félicie Gaudillat, Thomas Chapuzot et Philippe Ritaine :