Ils ont dû complètement arrêter leur activité en raison du confinement. Depuis quelques jours, les restaurateurs font à nouveau parler d'eux sur les réseaux sociaux : certains rouvrent leurs cuisines et proposent de la vente à emporter. D'autres refont la décoration de leur établissement.
Un mois de confinement et déjà une si longue attente ! A Poitiers, des restaurateurs relancent depuis peu leur activité. Si la salle de restaurant reste bien fermée au public, ils proposent des plats à emporter ou livrés à domicile.
Jean-Baptiste Genevois tient la brasserie corse A Casa, place Charles VII, à Poitiers. Il a rouvert sa cuisine ce mercredi et réalisé ses premières ventes à emporter et livraisons à domicile. Neuf, mercredi soir.ça fait du bien au moral!
- Jean-Baptiste Genevois, restaurateur
"Les clients me disent 'ça fait du bien au moral!'", lâche-t-il.
"On veut se battre"
"La situation est tellement inédite et, économiquement, ce n'est pas facile malgré les mesures gouvernementales annoncées. On veut se battre", poursuit-il, conscient de l'importance de réaliser un chiffre d'affaires.Il y a certes l'enjeu économique mais le restaurateur explique qu'il a surtout "envie de recréer du contact avec [ses] clients".Je travaille en visio-conférence avec ma grand-mère qui m'accompagne de ses conseils
- Jean-Baptiste Genevois, restaurateur
Pour redémarrer, il a dû réfléchir à la mise en place des mesures barrière.
"Je suis tout seul en cuisine dans mon établissement", explique-t-il. "Je fais tout, tout seul et j'ai installé un dispositif pour le retrait des plats."
En ce moment, "il ne propose que des plats corses: les recettes de ma grand-mère que j'ai d'ailleurs en visio-conférence. Elle m'accompagne avec ses conseils."
Quelques jours avec l'annonce du confinement, Jean-Baptiste Genevois venait de recevoir une livraison de charcuterie et de fromages corses "directement de Bastia". Il dispose donc pour l'instant de la matière première pour cuisiner.
Des réouvertures progressives
D'autres restaurateurs poitevins ont récemment fait le même choix que lui et le mettent désormais en avant sur leurs réseaux sociaux.C'est le cas, par exemple, du Manhattan café, situé place Alphonse Lepetit, qui a rouvert sa cuisine le 10 avril ou du salon de thé Sweet Time & Company, rue de la Cathédrale, qui lance son offre ce samedi (voir, ci-dessous).
Place Notre-Dame, Grand Ours s'apprête lui aussi à suivre le mouvement et annonce l'ouverture d'un service d'"épicerie à vélo".
Le restaurateur spécialisé dans la cuisine végétarienne et végétalienne issue de l'agriculture biologique sort donc de son hibernation temporaire et limite pour l'instant son initiative, une fois par semaine, le mercredi, pour des "spécialités de Grand Ours à cuisiner chez vous", indique une récente publication sur les réseaux sociaux.
Dépôt de légumes et de fruits de mer
Au cabaret-restaurant Le Pince-Oreille, situé rue des Trois-Rois à Poitiers, la salle est également fermée. Mais à l'entrée, un nouveau dispositif est en cours d'élaboration pour ouvrir un espace de vente à emporter."On commence ce vendredi", explique Antoine Peurichard, l'un des trois co-gérants. "On a mis en place une carte spécifique pour les livraison et le service à emporter. On garde l'esprit de la cuisine du Pince-Oreille et on va également faire dépôt de légumes avec notre producteur et pareil avec notre producteur de fruits de mer."
Pour ce restaurateur, il s'agit de "s'entraider entre commerçants". Il constate qu'en ce moment, "tout est à la dure!"
Nous, c'est peinture et rénovation
Autre établissement connu à Poitiers, le restaurant Les bons Enfants n'a lui pas encore repris le chemin des fourneaux.
"Nous avons choisi de donner un coup de peinture", explique Béatrice Philipponneau, co-gérante du restaurant depuis 2001 avec son mari Alain.
"On a refait le plafond, l'escalier et ça change déjà tout!", explique-t-elle. "Je voulais en profiter pour changer la moquette mais on ne peut pas aller en acheter donc j'ai champouiné. Et on a aussi nettoyé la cuisine à fond."
Tous les deux envisagent la vente à emporter "si l'on n'a pas d'autres choix" mais préfèrent pour l'instant se consacrer à tout ce "qu'on reportait jusque-là aux prochaines vacances sans jamais avoir le temps de le faire", poursuit-elle.
"Quand il fait beau, nous restons à la maison, dans le jardin et nous faisons du rangement. J'ai enfin posé du carrelage, des galets, je range le grenier, le cabanon du jardin, la véranda. On a fait nos plantations dans le potager. Je dépote et je rempote mes fleurs! On s'occupe."
En 19 ans d'activité, Béatrice et son mari confient n'avoir jamais pris plus de trois semaines de vacances dans l'année, "et toujours une semaine à la fois". Un arrêt de déjà quatre semaines, voilà qui change tout.
"J'avoue que c'est très étrange, très bizarre, ce que l'on vit", ajoute-elle. "On fait les dossiers d'aides gouvernementales mais on vit surtout sur nos 19 années d'économies, de l'argent mis de côté en cas de coup dur. L'aide de 1.500 euros aux indépendants, c'est par société, pas par co-gérant. Donc, finalement, c'est peu."
En attendant, tous les deux profitent du muguet de leur jardin avec, cette année, une pointe d'amertume. Même s'il est à nouveau en avance, pour la première fois, les deux restaurateurs ne pourront pas le partager avec leurs clients.
Mobilisés pour le CHU
Pendant ce temps, d'autres poursuivent leur réflexion et se mobilisent en faveur du personnel soignant du CHU.Le restaurant Les Archives, situé rue Edouard Grimaud, participe à cette action avec le Bois de la Marche (Fontaine-le-Comte) et l'Auberge le Centre Poitou (Coulombiers). A eux trois, les chefs préparent ainsi plusieurs centaines de plats, tous les mercredis.
"Nous participons une fois par semaine", explique Mathias Martin de l'Auberge Le Centre Poitou. "On fait jusqu'à 700 petits plats à emporter. On aide à notre manière." Lui aussi envisage de rouvrir sa cuisine pour cuisiner pour ses clients.
"Je réfléchis à faire de la vente à emporter, mais ce ne sera pas pour tout de suite, peut-être à la fin du mois d'avril", poursuit Mathias Martin. "Comme on est excentré de Poitiers, il faut savoir que faire et pour qui ? Pour l'instant, je me dis que, comme nous sommes aussi hôtelier, le mieux serait de commencer par du room-service."
Des apéros à emporter
Dans les autres grands restaurants, l'idée fait également son chemin."Nous réfléchissons à une offre à emporter", explique Pauline Minsé, chargée de communication et de marketing aux Archives. "On proposerait une carte réduite et des produits plaisirs. On espère proposer notre offre d'ici à la fin du mois d'avril."
Pour son établissement, l'idée est de se rôder début mai pour être réellement prêt pour le 11 mai, la date pour l'instant annoncée de la fin du confinement.
"On envisage par exemple de proposer des cocktails embouteillés, préparés par notre barman pour une formule apéritif. Ce serait assez simple et facile à lancer", explique-t-elle.
...et finalement, idéal pour célébrer la fin du confinement.