Treize hommes accusés d'avoir participé à un réseau de passeurs de migrants étaient appelés à comparaître ce lundi devant le tribunal de Poitiers. Seuls six d'entre eux étaient présents.
Six hommes sur les treize accusés sont jugés depuis ce matin à Poitiers. Les autres dont quatre sont en fuite et trois sous contrôle judiciaire ne se sont pas présentés devant le tribunal correctionnel.
Les six accusés présents ce matin à la barre sont tous originaires du Kurdistan Irakien. Ils sont soupçonnés d'appartenir à un réseau de passeurs de migrants vers le Royaume-Uni à partir de la Vienne, les Deux-Sèvres et la Charente-Maritime.
Dans la région de Poitiers, les migrants attendaient les passeurs dans les hôtels situés le long de l'autoroute notamment dans la zone du Futuroscope ou dans les bois alentour. Ils étaient ensuite transportés dans des camions de nuit vers le Royaume-Uni.
Une fusillade violente et nourrie
Ce réseau qui avait des ramifications en Indre-et-Loire et à l'étranger a été démantelé à la suite d'une fusillade survenue sur l'aire d'autoroute de Chincé, près de Poitiers en juin 2017. Une fusillade, violente et nourrie, s'était déroulée dans la nuit sans faire de victime et aurait pu être causée par un réglement de comptes entre groupes de passeurs. Quatre poids-lourds avaient été touchés par des projectiles, trois autres s'étaient fichés dans la structure d'une station-service. Les gendarmes ont retrouvé sur les lieux 67 étuis de calibres 9 mn et 7.65. Les enquêteurs ont ensuite remonté pendant plusieurs mois la filière pour parvenir à identifier les passeurs appartenant au réseau.
Les suspects sont poursuivis notamment pour aide au séjour irrégulier en bande organisée, violences avec arme, transport d'armes de guerre, détention de faux documents et refus d'obtempérer. La qualification de tentative de meurtre en bande organisée a été abandonnée au cours de l'instruction. Les accusés risquent jusqu'à dix ans de prison et plus en cas de récidive.
Un réseau de passeurs très organisé
Sur les 13 impliqués présumés figurent deux Roumains, un Niortais, et 10 Kurdes irakiens. Ces derniers sont présentés comme les principaux protagonistes d'un réseau très organisé.Le système mis en place à la logistique sophistiquée prévoyait des Audi et des BMW avec des jeux de plaques d'immatriculation britanniques, de faux titres de séjour et des comptes en banque basés en Angleterre ou au Kurdistan qui servaient aux passeurs à payer les nuits d'hôtels sur les autoroutes.
Une semaine après la fusillade, la découverte d'un fourgon avec à bord sept migrants Iraniens et Irakiens, des armes, a fait progresser l'enquête qui s'est vite orientée vers une confrontation armée entre groupes de passeurs de migrants. L'ADN, des images de vidéosurveillance d'autoroutes et hôtels, les flashes de radars automatiques, la géolocalisation des portables permettaient de remonter jusqu'aux suspects. Les interpellations se sont échelonnées jusqu'en novembre 2018.
A l'audience, les prévenus, âgés de 21 à une trentaine d'années, ont cherché à minimiser leur rôle, indiquant, comme en auditions, qu'ils "donnaient un coup de main" logistique pour faire passer des compatriotes et n'avaient rien à voir avec la fusillade de l'A10. En auditions toutefois, certains avaient chargé les absents et expliqué que la fusillade de l'A10 intervenait après un différend sur la répartition des aires de repos. Le chef présumé du réseau avait cinq aires "en concession" mais un conflit l'opposait à un concurrent. De premiers "règlements de compte" avaient eu lieu peu auparavant vers Niort et Châtellerault.
Le procès qui s'est ouvert ce lundi à Poitiers devrait durer jusqu'à vendredi.