Santé. "On fait cinq ans d'études, pour parfois gagner moins que le SMIC" : les orthophonistes manifestent pour plus de reconnaissance

Ce jeudi 5 octobre 2023, les orthophonistes en exercice ont interpellé les pouvoirs publics lors d'un mouvement national de mobilisation. À Poitiers, les étudiants de la filière ont manifesté devant l'Hôtel de Ville pour faire connaître aux passants leurs conditions d'étude et leurs futures conditions d'exercice.

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"Quel est le salaire d'un orthophoniste qui s'occuperait d'enfants dans un institut médico-éducatif ?", demande Ambre à un passant devant l'Hôtel de ville de Poitiers. "Entre 2 800 et 3 000 euros bruts", suppose le jeune homme. Une affirmation bien éloignée de la réalité pour ceux qui seront, l'année prochaine, diplômés en orthophonie.

"En début de carrière, dans certains secteurs médico-éducatifs, les orthophonistes peuvent gagner moins que le SMIC, alors qu'ils ont fait cinq ans d'études", s'indigne Ambre. "Nous, ce qu'on réclame, c'est d'avoir un salaire au niveau de la durée de notre cursus." Ce salaire d'environ 1 800 euros bruts s'applique pour des orthophonistes travaillant dans certaines structures médico-sociales.

Je m'attendais au métier en lui-même, mais pas aux conditions de travail.

Coralie Guyon

Étudiante en quatrième année d'orthophonie

"Pourtant, en réalité, 80 % des orthophonistes exercent en libéral", explique Mariette Guillaud à trois adolescents surpris. Moins un choix qu'une décision contrainte selon cette étudiante : "J'aimerais vraiment exercer en structure, mais je suis encore en réflexion, parce que la rémunération est un vrai frein."

Pour exposer leurs revendications, les orthophonistes ont donc organisé une manifestation nationale ce jeudi 5 octobre 2023. Ils demandent à l'État davantage de reconnaissance ainsi qu'une amélioration de leurs conditions de travail. Devant l'Hôtel de Ville de Poitiers, la quinzaine d'étudiants présents enchaînent les questions-réponses avec les patients pour mieux faire connaître leur métier. Sur les pancartes, des slogans comme "Hôpital déserté, libéral surchargé", ou "Orthophoniste en voie de disparition."

Un an pour trouver un stage

À cela s'ajoute une recherche de stage très stressante pour les étudiants rencontrés, car sans stages, pas de diplôme au bout des cinq ans d'étude. "Je subis depuis quatre ans la recherche de stages", résume Mariette Guillaud. "En fait, c'est un cercle vicieux : comme nous ne trouvons pas de stage dans des structures, nous n'avons pas envie d'y travailler. Il m'a fallu un an pour trouver un stage au CHU de Poitiers", complète Coralie Guyon.

Ce manque de terrains de stage trouve son origine dans un manque criant d'orthophonistes. Le 8 août 2023, la Fédération nationale des orthophonistes s'est "alarmée" des choix des ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur concernant le numerus clausus. Dans un communiqué, elle écrit : "Alors même que le ministre de la Santé et de la Prévention avait fait figurer l’augmentation des places en formation initiale pour les orthophonistes comme une priorité en janvier 2023, force est de constater que le compte n’y est pas puisque ce nombre est le même que celui de la dernière rentrée." Soit 975 places ouvertes pour la rentrée 2023.

"J'ai la chance de faire un stage dans une structure, avec des enfants qui ont des besoins vraiment spécifiques. J'ai aussi la chance d'avoir ma propre voiture, mais l'essence est à ma charge, alors que nous ne sommes pas rémunérés", raconte Hana Echayeb, étudiante en quatrième année.

"On a beaucoup de cours en visioconférence, les équipes éducatives sont épuisées. Et les orthophonistes ne sont pas du tout valorisés s'ils encadrent les étudiants lors de mémoires, ou de stages, ce qui n'encourage pas à prendre des stagiaires", énumère Coralie Leroy, étudiante en quatrième année.

Pierre Bruneau, étudiant en quatrième année, a déjà vu des élèves abandonner, voire des orthophonistes déjà en exercice. "Avec le vieillissement de la population, les besoins vont forcément augmenter. Mais là, on se sent surmené, et c'est difficile de se projeter dans un métier qui va beaucoup nous en demander", alors que les délais dépassent déjà un an pour prendre un rendez-vous.

Nos cris ne sont pas entendus.

Pierre Bruneau

Etudiant en quatrième année

Avec ce manque chronique de professionnels, difficile pour les étudiants non seulement de trouver des terrains de stage qui correspondent à leurs envies, mais aussi de parfaire leur formation en direction de publics aux besoins bien précis. "Il y a encore des domaines d'action de l'orthophonie que je n'ai pas vus en stage, mais si je dois prendre en soin un bébé qui a des troubles de l'oralité, je n'ai pas de formation théorique sur le sujet", craint Mariette Guillaud.

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