Il y a deux mois, les agriculteurs de toute la France manifestaient leur colère pour demander, entre autres, une juste rémunération de leurs productions. Nous sommes retournés voir deux d'entre eux, l'un est en conventionnel, l'autre en bio. Les mesures annoncées par le gouvernement n'ont pas les mêmes effets pour chacun d'eau, et la confiance reste fragile.
Son mari Martial faisait partie des agriculteurs mobilisés dans la Vienne en début d'année, et quand nous étions venus à Orches dans la ferme des Léau. À ce moment-là, l'ambiance était tendue. Ce 29 mars, occupée à nourrir son troupeau de chèvres, Valérie a retrouvé le sourire. Pour ce couple d'éleveurs en agriculture conventionnelle, le mouvement a payé : "Les aides ont été touchées pour ceux qui ont fait les demandes très rapidement. On a touché quasiment la totalité de nos aides PAC."
À quelques kilomètres de là, Sébastien Desgris, céréalier en agriculture biologique, est beaucoup moins satisfait : au plus fort du mouvement des agriculteurs, lui s'inquiétait beaucoup de la fin des aides sur le carburant non routier : "je fais le plein comme tous les matins avant de démarrer, et c'est quelques centaines d'euros qui partent tous les jours", nous disait-il alors. Ces aides ont finalement été maintenues, mais lui attend toujours le versement de ses 13 000 € de subvention de la PAC : "Il y a du retard, mais c'est pas forcément lié à nos administrations locales, c'est Bruxelles et c'est l'État, les deux organismes qui nous ralentissent aujourd'hui."
La confiance en l'avenir reste fragile
Pour Valérie comme pour Sébastien, leur activité demeure incertaine et précaire.
"Des conditions climatiques catastrophiques, des semis de blé qui ont été compliqués à faire, donc une inquiétude face à ça avec un prix du blé qui se casse la figure" explique l'éleveuse.
Pour Sébastien, c'est le fonctionnement de sa filière qui est à revoir : "Si on veut s'en sortir demain, il faut qu'on change complètement notre mode de commercialisation, pour moi, c'est la seule issue. Ce n'est plus en passant par l'industrie et la grande distribution. Moi, je ne compte pas sur eux, clairement."
Des engagements jugés insuffisants
Le gouvernement affiche 67 engagements pris pour "simplifier et améliorer le quotidien des agriculteurs et l’exercice de leur métier", dont 52% seraient déjà tenus.
Des engagements insuffisants pour bon nombre d'agriculteurs qui continuent à mener des actions sporadiques sur l'ensemble du territoire.
Annoncé pour ce 29 mars, le projet de loi d'orientation agricole sera finalement dévoilé ce mercredi 3 avril en conseil des ministres, avant d'être présenté le 13 mai à l'Assemblée nationale, et durant la deuxième quinzaine du mois de juin au Sénat, a indiqué le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau en clôture du congrès annuel de la FNSEA ce 28 mars.
Les syndicats agricoles espèrent revoir prochainement le gouvernement pour conforter les avancées obtenues.