Originaire de Poitiers, Valentin Ferron était de retour sur ces terres à l'occasion de la dernière étape du Tour Poitou-Charentes. Une ville dans laquelle il a conservé de nombreux liens, malgré l'éloignement et son arrivée dans une équipe World Tour.
Ils sont une poignée à faire le siège du car de l'équipe TotalEnergies à l'aube de l'utime étape du Tour Poitou-Charentes, à Moncoutant, vendredi 25 août. De la fenêtre entrouverte, des bribes du briefing de l'équipe sont saisies par les oreilles indiscrètes de fans, ravis de partager une telle intimité. Parmi eux, le petit Mathis Jougnot : tenue complète de la TotalEnergies sur les épaules, sourire orphelin de quelques dents de lait, il tient lui-même un briefing à Maxime, son papa. "Donne-moi les photos vite ! Et puis un crayon !" La porte, en effet, vient de s'ouvrir. "C'est Jason Tesson !" Comme pour confirmer le dicton décrétant que nul n'est prophète en son pays, Valentin Ferron n'occupe pas la première place dans le coeur de ce petit supporter.
Car il est chez lui ici. Ou plutôt, il rentre chez lui, à Poitiers, la ville d'arrivée du TPC. "C'est la seule course de l'année où j'évolue sur les routes d'entraînement avec la famille qui est proche, les amis aussi, sourit-il en se préparant. C'est une petite source de motivation en plus."
Sur le chemin qui le mène au podium de présentation des équipes, les demandes de photos et d'autographes affluent. Chacun lui lance un bon mot, avec un sourire complice. Des sollicitations qui ne sont pas un problème à entendre le coureur. "Ca va, ce n'est pas hyper dérangeant, ça fait plaisir et ça ne prend pas beaucoup de temps", glisse-t-il sobrement. Il ne s'épanche pas trop sur ce retour au bercail, concentré sur la stratégie du jour de son équipe, et encore un brin déçu de son contre-la-montre, achevé à la 15e place, jeudi.
Présente dans le public, Chloé Bironneau, sa compagne, profite un peu plus de ce retour, elle qui est originaire des Deux-Sèvres. "C'est l'occasion de revoir nos proches et de profiter en famille : on lie l'utile à l'agréable, sourit la professeure des écoles, qui vit à l'année avec Valentin Ferron près de Perpignan. C'est chouette de partager ça sur des routes qui ont bercé notre enfance à tous les deux." D'habitude, l'enseignante doit surtout se contenter des courses proches de leur domicile.
"Allez, Valentin, t'es chez toi !"
Sur l'aire d'arrivée, à Poitiers, les supporters du Poitevin vibrent. A près de 45 kilomètres de l'arrivée, Valentin Ferron sort du peloton et mène le contre. "Allez Valentin, t'es chez toi !", lancent ses supporters lors du premier des quatre passages du groupe sur le circuit final de l'étape.
Disséminés un peu partout dans la foule, les plus fervents ont tous un signe distinctif : le maillot bleu et rouge de l'UV Poitiers, le club cycliste des débuts de Valentin Ferron. "On est une quarantaine ici, assure David Ferron, son oncle, qui a battu le rappel des troupes. On le suit toujours !" Même sur les routes du Tour de France, la diaspora poitevine a surpris le coureur de la TotalEnergies. "Il n'en revenait pas : dans une étape de montagne, il a dit bonjour à quelqu'un du club", explique, non sans fierté, son oncle. Le bord des routes de la Grande Boucle, Anne-Laure Raimond les a arpentées avec ses trois filles Rose, Juline et Coralie . "On était en vacances à Limoges et le Tour passait, alors on y est allées", sourit-elle, tandis que ses filles, arborant une pancarte "Allez Valentin" dans le circuit final, listent toutes les occasions où elles sont allées voir leur champion.
Si le lien est si fort, c'est que Valentin Ferron n'a pas oublié d'où il venait. Ce "travailleur", comme le qualifie David Ferron, est une source de motivation pour les enfants du club où il possède toujours sa licence. "Même si c'est un coureur professionnel, il continue de venir au club voir les enfants. Il les encourage, répond à leurs questions : 'ça fait quoi de rouler à côté de Van der Poel ou Pogacar, qu'est-ce que tu manges au petit-déjeuner ?'". Une joie qui contamine aussi ses anciens éducateurs, fiers du destin de ce coureur. Pas nécessairement programmé pour devenir professionnel à la base, il a participé à son premier Tour de France cet été. Un sacré chemin. "Ils ont participé à son évolution", insiste son oncle, lui-même membre du club.
Au final, le contre mené par l'enfant de Poitiers n'aura pas réussi à rebattre les cartes d'une étape remportée au sprint par Marc Sarreau (AG2R Citroën). Une déception qui ne brise pas les rêves suscités par le Pictavien. "J'aimerais bien être comme lui dans l'avenir", souffle, songeur, un jeune de l'UV Poitiers, appuyé sur une rambarde, le regard fixé sur le dossard 43.