Les bailleurs sociaux appliquent une hausse des loyers au 1ᵉʳ janvier 2024 plafonnée par l'État à 3,5% pour faire face à leurs obligations. Problème, ce n'est pas suffisant.
À Grand Poitiers, comme ailleurs, c'est chaque année le même casse-tête pour les bailleurs sociaux. Faire face à des dépenses toujours à la hausse, avec des revenus (les loyers des logements sociaux) modérés, inférieurs à ceux du parc privé.
Les bailleurs sociaux l'affirment, ils n'ont pas d'autre choix que d'augmenter les loyers de leurs locataires. +3,5% au 1er janvier 2024, pour faire face à leurs différentes obligations. Parmi elles, financer du logement neuf, rénover l'ancien et financer la Réduction de loyer de solidarité, la RLS, cette baisse de loyer instaurée par la Loi de finances 2018 et appliquée par les bailleurs sociaux aux locataires.
Merci l'État ?
La nouvelle hausse annoncée intervient après une première augmentation de 3,6% appliquée le 1er janvier dernier. Celle qui s'annonce reste donc du même ordre. Pourtant, si les bailleurs sociaux avaient suivi l'indice de révision des loyers, elle aurait dû s'élever à 6,1% ! L’État a choisi d’intervenir et de le plafonner à 3 et demi %.
Si les locataires peuvent faire grise mine, c’est toutefois "moins pire" que prévu.
La hausse médiane des loyers sera de 8€ par mois, soit, en moyenne, un peu moins de 100€ sur une année. Elle va être indolore si les locataires touchent les allocations logements (APL) car elles aussi viennent d’être revues à la hausse.
En revanche, la moitié des locataires qui ne touchent pas les APL subira la hausse, en dépit de ses revenus modestes.
Un manque à gagner pour les bailleurs sociaux.
Mais les bailleurs sociaux se retrouvent pris dans une équation compliquée. Car les loyers sont modérés : en moyenne 300€ moins cher que dans le privé. Les rentrées d'argent sont donc moins importantes, avec en face, des obligations à tenir toujours plus coûteuses.
L’État demande aux bailleurs de financer la Réduction de loyer de solidarité, la RLS. C’est indolore pour les locataires, mais pour un bailleur social comme Ekidom, à Poitiers, ça correspond à une dépense de 4 millions d’euros. C’est l’équivalent du budget nécessaire à l’isolation de deux immeubles collectifs à Grand Poitiers.
Dans le même temps, les bailleurs doivent continuer à construire des logements neufs. La demande est forte et les capacités de financement se retrouvent limitées. Quand un bailleur social construit des logements neufs, il finance le projet à 20% sur ses fonds propres et reçoit 10% d'aides (dont 2,5% de l'État). Le reste, soit 70% du budget, est emprunté aux banques. Le logement social étant financé par le Livret A, nos économies, le taux auquel emprunte le bailleur social est indexé sur le taux du livret. Quand il était à 0,5%, ça ne coûtait pas cher d'emprunter. Mais, depuis le 1er août 2023, le taux du livret A est passé à 3%. Le logement social est donc plus cher à financer !
Conséquence, le déficit en logements sociaux ne se comble pas. À Grand Poitiers, par exemple, tous bailleurs sociaux confondus, il faudrait construire 250 logements neufs chaque année. On parvient à en construire 150 actuellement. Le constat est donc celui d'un déficit de 100 logements à l’année.